La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/06/2020 | FRANCE | N°19NC01696

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 11 juin 2020, 19NC01696


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler un avis des sommes à payer émis à son encontre le 19 juin 2017 par le centre hospitalier de Pfastatt en vue du recouvrement de la somme de 16 571,44 euros et de la décharger du paiement de la somme en cause.

Par un jugement n° 1703707 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2019, sous le n° 19NC00

022, Mme A... E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler un avis des sommes à payer émis à son encontre le 19 juin 2017 par le centre hospitalier de Pfastatt en vue du recouvrement de la somme de 16 571,44 euros et de la décharger du paiement de la somme en cause.

Par un jugement n° 1703707 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2019, sous le n° 19NC00022, Mme A... E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703707 du tribunal administratif de Strasbourg du 6 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'avis des sommes à payer émis et rendu exécutoire le 19 juin 2017 ;

3°) de la décharger du paiement de la somme ainsi réclamée ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Pfastatt la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'avis des sommes à payer en litige ne mentionne pas les bases de liquidation ;

- la réalité de la créance du centre hospitalier de Pfastatt n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2019, le centre hospitalier de Pfastatt, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation de Mme E... aux dépens de l'instance et à la mise à sa charge d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par Mme E... ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 31 mai 2019, sous le n° 19NC01696, Mme A... E..., représentée par Me C..., demande à la cour de prononcer, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution du jugement n° 1703707 du 6 novembre 2018 du tribunal administratif de Strasbourg.

Elle soutient que :

- l'avis des sommes à payer en litige ne mentionne pas les bases de liquidation ;

- la réalité de la créance du centre hospitalier de Pfastatt n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2019, le centre hospitalier de Pfastatt, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation de Mme E... aux dépens et à la mise à sa charge de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la requête est irrecevable et subsidiairement qu'elle n'est pas fondée.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 eu 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Meisse, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour Mme E... et de Me D... pour le centre hospitalier de Pfastatt.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 19NC00022 et 19NC01696, présentées pour Mme E..., sont relatives à la situation d'un même praticien hospitalier et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Mme A... E... a été employée par le centre hospitalier de Pfastatt, en qualité de praticienne hospitalière à temps plein, de juillet 2002 à décembre 2015. Elle a sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, dont elle a été victime le 16 octobre 2014, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, qui a fait droit à cette demande le 9 décembre 2014. Placée en congé pour accident imputable au service du 20 octobre 2014 au 14 juillet 2015, elle a bénéficié, durant cette période, de la totalité de ses émoluments et, pour une période de six mois, du 20 octobre 2014 au 20 avril 2015, de ses indemnités d'engagement de service public exclusif. Par un courrier du 17 décembre 2014, le centre hospitalier de Pfastatt a contesté la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident du 16 octobre 2014 devant la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, qui, par une décision du 19 mai 2016, confirmée par un jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Strasbourg du 27 février 2017, a fait droit à la demande et déclaré inopposable à l'employeur la décision de prise en charge du 9 décembre 2014. Par un courrier du 7 juin 2017, le centre hospitalier de Pfastatt a informé la requérante que son accident était dépourvu de tout lien avec le service, et que, en conséquence, la période allant du 20 octobre 2014 au 14 juillet 2015 devait être requalifiée en congé de maladie ordinaire et donner lieu à une régularisation des traitements et indemnités indûment versés. Un avis des sommes à payer a ainsi été émis et rendu exécutoire le 19 juin 2017 en vue du recouvrement de la somme totale de 16 571,44 euros. Mme E... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de cet avis des sommes à payer et à la décharge du paiement de la créance ainsi réclamée. Elle relève appel du jugement n° 1703707 du 6 novembre 2018 qui rejette sa demande. Par une requête distincte, l'intéressée sollicite également le sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". Les collectivités publiques ne peuvent mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre de perception lui-même, soit par une référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels elles se sont fondées pour déterminer le montant de la créance.

4. Mme E... soutient, à juste titre, que la simple mention " régularisation absentéisme ", qui figure dans la rubrique " Objet et détail de la recette " de l'avis des sommes à payer litigieux ne permettait pas de déterminer l'origine de la créance, non plus que les bases et les éléments de calcul sur lesquels s'est fondé le centre hospitalier de Pfastatt pour en déterminer le montant. Toutefois, il résulte de l'instruction, d'une part, que l'avis des sommes à payer contesté était accompagné d'un bulletin de paie sur lequel figuraient le détail des calculs et le libellé respectif des montants à déduire et, d'autre part, que, par une lettre recommandée du 7 juin 2017, l'administration a précisé à Mme E... les motifs fondant sa créance, les périodes concernées et le détail des calculs. Ce même courrier indiquait à l'intéressée qu'un avis des sommes à payer lui serait adressé prochainement. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne disposait pas des éléments nécessaires pour contester utilement l'avis des sommes à payer émis et rendu exécutoire le 19 juin 2017.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : " Le personnel des établissements publics de santé comprend, outre les agents relevant de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et les personnels enseignants et hospitaliers mentionnés à l'article L. 952-21 du code de l'éducation : 1° Des médecins, des odontologistes et des pharmaciens dont le statut, qui peut prévoir des dispositions spécifiques selon que ces praticiens consacrent tout ou partie de leur activité à ces établissements, est établi par voie réglementaire ; (...) ". Aux termes de l'article R. 6152-35 du même code, inséré dans la section relative au statut des praticiens hospitaliers à temps plein, dans sa rédaction alors applicable : " Les praticiens régis par la présente section ont droit : (...) 4° A des congés de maladie, longue maladie, longue durée dans des conditions fixées aux articles R. 6152-37 à R. 6152-39 ; (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 6152-36 de ce code : " Un comité médical, placé auprès de chaque préfet, est chargé de donner un avis sur l'aptitude physique et mentale des praticiens régis par le présent statut à exercer leurs fonctions, ainsi que sur toute question d'ordre médical les intéressant pour l'application des dispositions du présent statut. ". Aux termes de l'article R. 6152-37 dudit code : " En cas de maladie dûment constatée et attestée par un certificat médical mettant un praticien dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé par décision du directeur de l'établissement. / Le praticien en congé de maladie conserve la totalité des émoluments prévus au 1° de l'article R. 6152-23, pendant une durée de trois mois ; ces émoluments sont réduits à la moitié pendant les neuf mois suivants. / Lorsqu'à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un praticien est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsqu'un praticien a obtenu des congés de maladie d'une durée totale de douze mois consécutifs, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical ; en cas d'avis défavorable, il est mis en disponibilité. ". Aux termes de l'article R. 6152-41 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Les dispositions des articles R. 6152-37 à R. 6152-39 ne s'appliquent pas en cas de maladie imputable au service ou d'accident survenu dans l'exercice des fonctions ou à l'occasion desdites fonctions. En ce cas, l'intéressé continue à percevoir la totalité des émoluments qui lui sont accordés en application du 1° de l'article R. 6152-23 dans la limite d'une année. A l'issue de cette période, son cas est soumis par le préfet du département au comité médical qui propose, soit sa réintégration, soit la prolongation du congé dans les mêmes limites de durée et de rémunération, à concurrence d'un total de cinq années. ". Aux termes de l'article D. 6152-23-1 du même code : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : / (...) 6° Une indemnité d'engagement de service public exclusif versée aux praticiens qui s'engagent, pour une période de trois ans renouvelable, à ne pas exercer une activité libérale telle que prévue à l'article L. 6154-1. Le versement de cette indemnité est maintenu durant les congés et jours de récupération mentionnés aux 1°, 2°, 3° et 5° de l'article R. 6152-35. Pour les praticiens placés en congé de maladie au titre des articles R. 6152-37 à R. 6152-39, le versement de cette indemnité est maintenu pendant une période qui ne peut excéder trois mois par contrat d'engagement de service public exclusif. La durée de cette période est portée à six mois en cas de congé de maladie accordé au titre de l'article R. 6152-41. ".

6. Il résulte de l'instruction que, le 24 novembre 2014, Mme E... a déclaré un accident du travail survenu dans son service le 16 octobre 2014. Le 9 décembre 2014, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a reconnu le caractère professionnel de cet accident et a estimé que l'intéressée devait être prise en charge à ce titre. Du 20 octobre 2014 au 14 juillet 2015, la requérante a été placée en congé pour accident imputable au service et a perçu, au cours de la période considérée, la totalité de ses émoluments prévus au 1° de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique, ainsi que, sur une période de six mois, du 20 octobre 2014 au 20 avril 2015, ses indemnités d'engagement de service public exclusif. Le 17 décembre 2014, le centre hospitalier de Pfastatt a saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin afin de contester la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident survenu le 16 octobre 2014. Par une décision du 19 mai 2016, confirmée par un jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Strasbourg du 27 février 2017, la commission de recours a déclaré inopposable à l'employeur la prise en charge de Mme E... au titre de la législation professionnelle. Mme E... ne saurait utilement se prévaloir de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 22 juin 2015, qui la place en congé de maladie imputable à un accident de service survenu dans le cadre de ses fonctions du 20 octobre 2014 au 14 juillet 2015, dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne donnait compétence à l'autorité préfectorale pour prendre une telle mesure. Si la décision du 19 mai 2016 et le jugement du 27 février 2017 n'ont d'effet qu'entre la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin et le centre hospitalier de Pfastatt et ne remettent pas en cause la prise en charge de Mme E... au titre de la législation professionnelle, en revanche, cette prise en charge étant désormais inopposable à l'employeur, ce dernier pouvait légalement requalifier en congé de maladie ordinaire la période du 20 octobre 2014 au 14 juillet 2015 et réclamer à l'agent le remboursement des émoluments et indemnités indûment versés. Par suite et alors que Mme E... ne conteste pas l'exactitude du montant de 16 571,44 euros qui lui est ainsi réclamé, elle n'est pas fondée à soutenir que la créance de l'administration ne serait pas établie et que l'avis des sommes à payer en litige serait dépourvu de base légale. Par suite, ce moyen doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'avis des sommes à payer émis à son encontre et rendu exécutoire le 19 juin 2017 par le centre hospitalier de Pfastatt en vue du recouvrement de la somme de 16 571,44 euros, ainsi que la décharge du paiement de la créance ainsi réclamée. Par suite, elle n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent elles aussi être rejetées.

8. La présente instance n'ayant pas généré de dépens, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le centre hospitalier de Pfastatt en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... la somme réclamée par le défendeur au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Sur les conclusions à fin de sursis à l'exécution du jugement et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par le centre hospitalier de Pfastatt :

9. La cour statuant par le présent arrêt sur la requête tendant à l'annulation du jugement n° 1703707 du 6 novembre 2018 du tribunal administratif de Strasbourg, les conclusions de la requérante tendant au sursis à exécution de ce jugement ont perdu leur objet et il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions du centre hospitalier de Pfastatt à fin d'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de Mme E... à fin de sursis à exécution du jugement de première instance.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme E... est rejeté

Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Pfastatt, dans les deux instances, en application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... pour Mme A... E... en application des dispositions de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée et au centre hospitalier de Pfastatt.

N° 19NC00022 et 19NC01696 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01696
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Questions d'ordre général.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : DANGEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-11;19nc01696 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award