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11/06/2020 | FRANCE | N°18NC02097

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 11 juin 2020, 18NC02097


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le directeur académique des services de l'éducation nationale de la Marne a déclaré non imputables au service les faits survenus le 15 septembre 2016, ensemble la décision du 15 mars 2017 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1700943 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les décisions en litige et enjoint à la rec

trice de l'académie de Reims de reconnaître l'imputabilité au service des faits s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le directeur académique des services de l'éducation nationale de la Marne a déclaré non imputables au service les faits survenus le 15 septembre 2016, ensemble la décision du 15 mars 2017 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1700943 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les décisions en litige et enjoint à la rectrice de l'académie de Reims de reconnaître l'imputabilité au service des faits survenus le 15 septembre 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2018, le ministre de l'éducation nationale demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1700943 du 24 mai 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par M. C....

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que M. C... avait été victime d'un accident, une telle notion renvoyant nécessairement à une altération corporelle à l'exclusion d'une altération psychique ;

- ne pouvant se prévaloir de la présomption d'imputabilité admise pour les accidents survenus sur le lieu et dans le temps du service, il appartenait à l'agent concerné d'établir que sa pathologie présentait un lien direct et déterminant avec les conditions dans lesquelles il a accompli son service.

- l'existence d'un tel lien a été écarté par la commission de réforme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2018, M. A... C..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par le ministre de l'éducation nationale ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Meisse, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Professeur des écoles, M. A... C... exerce, depuis le 1e septembre 1998, les fonctions de conseiller pédagogique de circonscription en éducation physique et sportive auprès des écoles de la circonscription de Reims Est. A la suite d'un incident survenu dans la matinée du 15 septembre 2016, le requérant a bénéficié d'un arrêt de travail du 15 septembre 2016 au 14 septembre 2017, puis a été placé d'office en disponibilité pour raisons de santé à compter du 15 septembre 2017. M. C... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'incident du 15 septembre 2016. La commission de réforme de la Marne du 21 janvier 2017 ayant émis un avis défavorable le 21 janvier 2017, le directeur académique des services de l'éducation nationale de la Marne a refusé de faire droit à sa demande par une décision du 18 janvier 2017. Par un courrier du 1er février 2017, l'intéressé a formé contre cette décision un recours gracieux, qui a été rejeté le 15 mars 2017. M. C... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation des décisions des 18 janvier et 15 mars 2017. Le ministre de l'éducation nationale relève appel du jugement n° 1700943 du 24 mai 2018, qui annule les décisions en litige et enjoint à la rectrice de l'académie de Reims de reconnaître l'imputabilité au service des faits survenus le 15 septembre 2016.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Constitue un accident de service, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

3. Il ressort des pièces du dossier, spécialement du témoignage de trois agents présents au moment de la survenance des faits, ainsi que de celui de l'inspecteur du travail arrivé peu après sur les lieux, que M. C..., après avoir répondu à un coup de téléphone dans la matinée du 15 septembre 2016, est sorti brusquement de son bureau en criant son incapacité à régler le problème auquel il était confronté, a jeté son téléphone, ainsi que ses lunettes, au sol et a donné de violents coups dans les murs et les placards. Il a ensuite éprouvé des difficultés à se calmer, alternant entre pleurs, colère et sensation d'épuisement, jusqu'à ce que son épouse vienne le chercher pour le conduire chez son médecin. Le certificat médical d'arrêt de travail, daté du même jour, fait état d'un " burn out professionnel ". De même, le médecin conseiller technique de l'académie de Reims, qui a examiné M. C... à sa demande le 19 septembre 2019, indique qu' " il existe une altération de son état de santé avec survenue d'un malaise en réunion qui est en lien avec une situation d'épuisement ". Alors même que la lésion qui en est résulté n'est pas corporelle mais psychique, l'incident du 15 septembre 2016, survenu sur le lieu et dans le temps du travail, a le caractère d'un accident de service. En outre, à supposer même que l'intéressé, compte tenu de sa personnalité, se serait imposé des objectifs difficilement atteignables, qui ne lui avaient pas été assignés par sa hiérarchie, et qu'il aurait été placé à plusieurs reprises, depuis 2008, en congé de maladie ordinaire, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé souffrait d'une pathologie de type dépressive avant l'incident du 15 septembre 2016. Dans ces conditions, les éléments dont se prévaut l'administration à son encontre ne sauraient caractériser une faute personnelle de l'agent, ni une circonstance particulière de nature à détacher l'accident du service.

4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale n'est pas fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les décisions des 18 janvier et 15 mars 2017.

Sur les frais de justice :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'éducation nationale est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour M. A... C... en application des dispositions de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée et au ministre de l'éducation nationale.

N° 18NC02097 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02097
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Questions d'ordre général.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : RAHOLA DELVAL CREUSAT ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-11;18nc02097 ?
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