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08/04/2020 | FRANCE | N°18NC01413

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 08 avril 2020, 18NC01413


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert auprès des autorités allemandes, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande d'asile sous astreinte de 100 euros par jour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 j

uillet 1991.

Par un jugement n° 1800680 du 12 février 2018, le tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert auprès des autorités allemandes, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande d'asile sous astreinte de 100 euros par jour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1800680 du 12 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 18NC01413 le 8 mai 2018, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 février 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert auprès des autorités allemandes ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et un formulaire de demande d'asile sous astreinte de 100 euros par jour, dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- elle n'a pas bénéficié d'un entretien individuel effectif dans les conditions prévues par l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 ;

- en ne lui faisant pas application de l'article 17 de ce règlement, le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2019, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Le préfet du Bas-Rhin fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 10 juillet 2018.

Par un courrier en date du 7 décembre 2018, les parties ont été informées de ce que la cour était, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions à fins d'annulation de la décision de transfert attaquée, dès lors que la France devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale à l'expiration du délai de six mois défini à l'article 29 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissante géorgienne, née le 11 août 1989, est entrée sur le territoire français, selon ses déclarations, le 6 novembre 2017 pour déposer une demande d'asile. Les autorités allemandes ont donné leur accord pour la reprise en charge de l'intéressée. Par un arrêté du 12 janvier 2018, le préfet du Bas-Rhin a décidé de transférer Mme D... auprès des autorités allemandes. Mme D... relève appel du jugement du 12 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision de transfert :

2. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de sept jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit enfin que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statue au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné la remise de Mme D... aux autorités allemandes est intervenu moins de six mois après la décision par laquelle l'Allemagne a donné son accord pour sa réadmission. Ce délai a été interrompu par la demande d'annulation introduite par l'intéressé contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Strasbourg le 2 février 2018. Un nouveau délai de six mois a recommencé à courir à compter de la notification au préfet, le 13 février 2018, du jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 février 2018 rejetant la demande d'annulation de l'arrêté contesté. Si ce délai, qui aurait dû ainsi expirer le 13 août 2018, a été ensuite prolongé jusqu'au 13 août 2019, en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement susvisé du 26 juin 2013, dès lors que l'intéressée a été déclarée en fuite et que le préfet du Bas-Rhin a informé de ce report les autorités allemandes, par courrier du 3 juillet 2018, il est constant que ce nouveau délai est expiré depuis le 13 août 2019 et que l'Allemagne est libérée de son obligation de reprise en charge de Mme D... et de l'examen de sa demande d'asile. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à l'annulation du jugement du 12 février 2018 rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2018 décidant sa remise aux autorités allemandes sont devenues sans objet, de même que les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté et les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte. Il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme que le conseil de Mme D... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A... D... tendant à l'annulation du jugement du 12 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg et de l'arrêté du 12 janvier 2018 du préfet du Bas-Rhin ainsi que sur ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

3

N° 18NC01413


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NC01413
Date de la décision : 08/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-04-08;18nc01413 ?
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