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05/03/2020 | FRANCE | N°18NC03234

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 05 mars 2020, 18NC03234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté en date du 18 octobre 2017 par lequel le maire de la commune d'Oeting l'a licencié pour motif disciplinaire à compter du 1er décembre 2017.

Par un jugement n° 1706273 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n°18NC03234 le 30 novembre 2018, la commune d'Oeting, représentée par Me D

..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté en date du 18 octobre 2017 par lequel le maire de la commune d'Oeting l'a licencié pour motif disciplinaire à compter du 1er décembre 2017.

Par un jugement n° 1706273 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n°18NC03234 le 30 novembre 2018, la commune d'Oeting, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 octobre 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif ne pouvait pas, au regard des exigences du contradictoire et de l'obligation de prendre en compte les allégations en défense de la commune, s'estimer dispensé d'examiner les autres moyens de la requête ;

- il s'est en outre substitué au requérant et a été au-delà de ce qui était exposé dans la requête, car M. B... avait bien analysé l'arrêté litigieux comme procédant à un licenciement pour motif disciplinaire et s'était prévalu d'une erreur de droit ;

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif n'est pas fondé, dès lors que les faits reprochés à l'intéressé étaient bien constitutifs de fautes disciplinaire, même si certains d'entre eux peuvent également relever de l'insuffisance professionnelle ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. B... ne pouvaient pas prospérer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2019, M. C... B..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Oeting sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B... a été recruté par la commune d'Oeting le 1er mai 2000, par contrat à durée déterminée à temps partiel, en vue d'exercer notamment des fonctions en lien avec la gestion du budget et de la comptabilité. Il a ensuite bénéficié, à compter du 1er mai 2006, d'un contrat à durée indéterminée à temps plein, pour assurer les fonctions de " comptabilité, gestion de la dette, traitements, budgets et comptes et plus généralement tout ce qui concerne les finances ". A compter du 1er janvier 2009, il s'est vu en outre confier les fonctions de secrétaire général. Par un arrêté du 18 octobre 2017, le maire de la commune a procédé à son licenciement à compter du 1er décembre 2017, pour motif disciplinaire. La commune d'Oeting fait appel du jugement du 2 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Le motif par lequel le juge de l'excès de pouvoir juge fondé l'un quelconque des moyens de légalité soulevés devant lui ou des moyens d'ordre public qu'il relève d'office suffit à justifier l'annulation de la décision administrative contestée. Il s'ensuit que, sauf dispositions législatives contraires, le juge de l'excès de pouvoir n'est en principe pas tenu, pour faire droit aux conclusions à fin d'annulation dont il est saisi, de se prononcer sur d'autres moyens que celui qu'il retient explicitement comme étant fondé.

3. Il résulte de ce qui précède que le tribunal administratif de Strasbourg n'a commis aucune irrégularité en retenant, pour annuler l'arrêté du 18 octobre 2017, le moyen tiré de ce que les faits reprochés à M. B... relevaient de l'insuffisance professionnelle et n'étaient pas constitutifs de fautes disciplinaires, sans examiner les autres moyens de la demande de l'intéressé.

4. En outre, et contrairement à ce que soutient également la commune d'Oeting, il ressort des écritures de première instance que le moyen ainsi retenu par le tribunal administratif avait expressément été soulevé par M. B... et qu'ainsi, le jugement n'est pas davantage entaché d'irrégularité à cet égard.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

5. L'arrêté contesté du 18 octobre 2017, intitulé " arrêté (...) portant licenciement d'un agent contractuel pour motif disciplinaire ", mentionne qu'il est reproché à M. B..., outre des insuffisances professionnelles, " des négligences, des manquements ainsi qu'un comportement inadapté vis-à-vis de ses collègues et de sa hiérarchie ". Par ailleurs, la lettre de convocation à l'entretien préalable du 19 septembre 2017, à laquelle l'arrêté litigieux renvoie expressément, mentionne que la commune envisage le licenciement de l'intéressé " pour motif disciplinaire " et que " la procédure sera suivie conformément au décret n° 88-145 du 15 février 1988 et notamment son article 36-1 ", lequel renvoie aux sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents contractuels, et en particulier au licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement.

6. Si certains des griefs formulés à l'encontre de l'intéressé, telles une défaillance dans le traitement de dossiers médicaux et la dégradation des rapports avec le reste du personnel, étaient de nature à caractériser une insuffisance professionnelle de M. B..., il ressort des pièces du dossier que ce dernier adoptait un comportement systématiquement négatif se traduisant, en particulier, par le refus de répondre aux demandes d'élus ou des agents communaux, de mettre en oeuvre le nouveau régime indemnitaire des agents territoriaux ou de respecter les consignes données. Du fait de ces manquements délibérés à ses obligations professionnelles, M. B... pouvait légalement faire l'objet d'une sanction disciplinaire et dans ces conditions, l'arrêté du 18 octobre 2017 n'était, à cet égard, entaché d'aucune erreur de droit.

7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé, pour annuler cet arrêté du 18 octobre 2017, sur le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le maire de la commune.

8. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B..., tant devant le tribunal que devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par M. B... :

9. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " (...) Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline (...) " L'article 136 de la même loi prévoit également que " (...) Les commissions consultatives paritaires connaissent des décisions individuelles prises à l'égard des agents contractuels et de toute question d'ordre individuel concernant leur situation professionnelle. (...) Lorsqu'elles siègent en tant que conseil de discipline, elles sont présidées par un magistrat de l'ordre administratif, en activité ou honoraire, désigné par le président du tribunal administratif dans le ressort duquel est situé le siège du conseil de discipline (...) ". Enfin aux termes de l'article 42-1 du décret du 15 février 1988 : " Lorsqu'à l'issue de l'entretien prévu à l'article 42 et de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, l'autorité territoriale décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement, ainsi que la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis ".

10. Il est constant que la commission administrative paritaire n'a pas, avant le licenciement de M. B... pour motif disciplinaire, été réunie en conseil de discipline et n'a donc pas émis un avis sur la sanction envisagée à l'encontre de l'intéressé. Cette irrégularité qui a privé l'intéressé d'une garantie est de nature, à elle seule, à justifier l'annulation de l'arrêté contesté.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de M. B..., que la commune d'Oeting n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017 qui a décidé le licenciement de M. B... à compter du 1er décembre 2017, pour motif disciplinaire.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune d'Oeting demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Oeting le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Oeting est rejetée.

Article 2 : La commune d'Oeting versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Oeting et à M. C... B....

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 18NC03234


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : BRANCHET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 05/03/2020
Date de l'import : 16/03/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18NC03234
Numéro NOR : CETATEXT000043240602 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-03-05;18nc03234 ?
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