La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/01/2020 | FRANCE | N°18NC02404

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 30 janvier 2020, 18NC02404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre de la plus-value de cession, réalisée le 25 février 2016, pour un immeuble situé à Nancy.

Par un jugement n° 1702353 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d

'annuler ce jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre de la plus-value de cession, réalisée le 25 février 2016, pour un immeuble situé à Nancy.

Par un jugement n° 1702353 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

2°) de prononcer la décharge de la contributions sociale généralisée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le changement d'affectation du produit des prélèvements sociaux perçus sur les revenus patrimoniaux au financement de prestations non contributives, réalisé par l'article 24 de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale, n'a pas eu pour effet d'exclure les prélèvements sociaux du champ d'application du règlement n° 883/2004 du 29 avril 2004 ;

- la charge fiscale qu'il a subie, liée au financement du régime français de sécurité sociale dont il n'a pas été bénéficiaire de juillet 2014 à octobre 2016, est contraire au principe d'égalité devant l'impôt garanti par la constitution ;

- il doit bénéficier de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne " de Ruyter " dès lors que sa situation est similaire à celle des ressortissants français qui résident dans un autre Etat membre de l'Union européenne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... doivent être écartés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a réalisé une plus-value, le 31 mars 2016, pour la cession d'un bien immobilier situé 27 rue Saint-Nicolas à Nancy. A cette occasion, il a acquitté une somme de 2 750 euros, dont 1 822 euros au titre des prélèvements sociaux. Sa réclamation du 29 juin 2017 tendant à la restitution de ces prélèvements sociaux a été rejetée par une décision de l'administration fiscale du 4 juillet 2017. M. B... relève appel du jugement du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge de la contribution sociale généralisée, appliquée à cette plus-value de cession, au titre de l'année 2016.

Sur le bien fondé de l'imposition :

2. D'une part, aux termes du I de l'article 150 U du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (...) ". Le I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale dispose que : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : (...) / e) Des plus-values, gains en capital et profits soumis à l'impôt sur le revenu, de même que des distributions définies aux 7,7 bis et 8 du II de l'article 150-0 A du code général des impôts, de l'avantage mentionné à l'article 80 quaterdecies du même code et du gain défini à l'article 150 duodecies du même code (...) " ; Aux termes du I de l'article 1600-0-S du code général des impôts : " Il est institué : / 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale (...) ". Aux termes de l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale modifié par le I de l'article 24 de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 : " Il est créé un fonds dont la mission est de prendre en charge les avantages d'assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale, tels qu'ils sont définis par l'article L. 135-2. / Ce fonds, dénommé : fonds de solidarité vieillesse, est un établissement public de l'Etat à caractère administratif (...) ". Aux termes de l'article L. 135-2 dans sa rédaction issue de la même loi : " Les dépenses prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse sont retracées dans trois sections distinctes ". Aux termes de l'article L. 135-3 modifié : " Les recettes du fonds affectées au financement des dépenses mentionnées au I de l'article L. 135-2 sont constituées par : /1° Une fraction, fixée au IV bis de l'article L.136-8, du produit des contributions mentionnées aux articles L. 136-6 et L 136- ; / 2° Une fraction, fixée à l'article L. 245-16, du produit des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245 -14 et L. 245-15 / 3° Le produit du prélèvement mentionné à l'article 1600-0 S du code général des impôts ". Enfin, le X de l'article 24 de la loi du 21 décembre 2015 précise que le changement d'affectation s'applique : " (...) aux produits recouvrés par la voie des rôles émis à compter du 1er janvier 2016 ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 2 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale : " 1. Le présent règlement s'applique aux ressortissants de l'un des États membres, aux apatrides et aux réfugiés résidant dans un État membre qui sont ou ont été soumis à la législation d'un ou de plusieurs Etats membres, ainsi qu'aux membres de leur famille et à leurs survivants (...) ". Aux termes de l'article 3 du même règlement : " 1. Le présent règlement s'applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent : a) les prestations de maladie ; b) les prestations de maternité et de paternité assimilées ; c) les prestations d'invalidité ; d) les prestations de vieillesse ; e) les prestations de survivant ; f) les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles ; g) les allocations de décès ; h) les prestations de chômage ; i) les prestations de préretraite ; j) les prestations familiales (...) / 3. Le présent règlement s'applique également aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif visées à l'article 70 ". Aux termes de cet article 70 : " 1. Le présent article s'applique aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif relevant d'une législation qui, de par son champ d'application personnel, ses objectifs et/ou ses conditions d'éligibilité, possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale visée à l'article 3, paragraphe 1, et d'une assistance sociale. / 2. Aux fins du présent chapitre, on entend par "prestations spéciales en espèces à caractère non contributif" les prestations a) qui sont destinées : i) soit à couvrir à titre complémentaire, subsidiaire ou de remplacement, les risques correspondant aux branches de sécurité sociale visées à l'article 3, paragraphe 1, et à garantir aux intéressés un revenu minimum de subsistance eu égard à l'environnement économique et social dans l'État membre concerné ; ii) soit uniquement à assurer la protection spécifique des personnes handicapées, étroitement liées à l'environnement social de ces personnes dans l'Etat membre concerné ; et b) qui sont financées exclusivement par des contributions fiscales obligatoires destinées à couvrir des dépenses publiques générales et dont les conditions d'attribution et modalités de calcul ne sont pas fonction d'une quelconque contribution pour ce qui concerne leurs bénéficiaires. Les prestations versées à titre de complément d'une prestation contributive ne sont toutefois pas considérées, pour ce seul motif, comme des prestations contributives ; et c) qui sont énumérées à l'annexe X ". Aux termes de l'article 11 de ce même règlement : " 1. Les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu'à la législation d'un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément au présent titre ".

4. M. B... soutient que, parce qu'il n'a pas bénéficié du régime de l'assurance maladie entre juillet 2014 et octobre 2016, il ne devait pas être soumis à la contribution sociale généralisée à raison de la plus-value de cession immobilière qu'il a réalisée en 2016. Il invoque une rupture d'égalité devant les charges publiques ainsi que la méconnaissance par l'administration fiscale du principe d'unicité de la législation sociale énoncé à l'article 11 du règlement CE n° 883/2004, tel qu'éclairé par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne " de Ruyter " du 26 février 2015.

5. Il résulte toutefois de l'instruction que M. B..., résident fiscal français a, lors de la période litigieuse, bénéficié de rentes d'invalidité versées par la caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), comme il l'a lui-même indiqué dans sa réclamation préalable du 29 juin 2017. Par suite, et contrairement à ce qu'il affirme, le requérant a été bénéficiaire du régime de sécurité sociale français au titre des années en litige. Dans ces conditions, M. B..., qui ne soutient pas ni même n'allègue être ou avoir été affilié à un régime de sécurité sociale obligatoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne, ne saurait utilement se prévaloir du principe d'unicité de la législation sociale posé par le règlement du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale et appliqué par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne dite " de Ruyter " au motif que, n'ayant pas bénéficié du régime de sécurité sociale français, il est dans une situation comparable à celle d'un non-résident soumis à la législation sociale d'un autre Etat membre. Pour la même raison est tout aussi inopérant le moyen qu'il soulève tiré de ce que le changement d'affectation du produit des prélèvements sociaux perçus sur les revenus patrimoniaux au financement de prestations non contributives, réalisé par l'article 24 de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale, n'a pas eu pour effet d'exclure ces prélèvements et notamment la contribution sociale généralisée du champ d'application du règlement n° 883/2004 du 29 avril 2004. Enfin, si le requérant persiste à soutenir que la charge fiscale qu'il a supportée, liée au financement du régime français de sécurité sociale dont il n'a pas été bénéficiaire de juillet 2014 à octobre 2016, est contraire au principe à valeur constitutionnelle d'égalité devant l'impôt, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à juste titre, sur ce point, par les premiers juges.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 18NC02404


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02404
Date de la décision : 30/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : AARPI LERINS JOBARD CHEMLA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-01-30;18nc02404 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award