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27/12/2019 | FRANCE | N°19NC02251

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 27 décembre 2019, 19NC02251


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui renouveler son certificat de résidence d'Algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.

Par un jugement n° 1900863 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêt

du 12 mars 2019 et enjoint au préfet de la Marne de délivrer au requérant un certific...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui renouveler son certificat de résidence d'Algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.

Par un jugement n° 1900863 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 12 mars 2019 et enjoint au préfet de la Marne de délivrer au requérant un certificat de résidence portant la mention " étudiant " dans le délai d'un mois suivant la notification de ce jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2019, le préfet de la Marne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1900863 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 2 juillet 2019 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées en première instance par M. A....

Il soutient que :

- l'arrêté du 12 mars 2019 n'est pas entaché d'erreur d'appréciation ;

- il est suffisamment motivé ;

- si cet arrêté se fonde à tort sur les dispositions de l'article L. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, il aurait pris la même décision s'il avait fait application des stipulations du premier alinéa du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles et sollicite une substitution de base légale en ce sens.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2019, M. C... A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le préfet de la Marne a commis une erreur dans son appréciation du caractère réel et sérieux de ses études.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Meisse, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit ;

1. M. C... A... est un ressortissant algérien, né le 26 janvier 1990. Il est entré régulièrement en France, le 30 septembre 2017, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ". Il a été autorisé à séjourner en qualité d'étudiant jusqu'au 22 novembre 2018. Le requérant ayant sollicité le renouvellement de son titre de séjour, le préfet de la Marne, par un arrêté du 12 mars 2019, a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jour et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Par une requête, enregistrée le 15 avril 2019, le requérant a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2019. Le préfet de la Marne relève appel du jugement n° 1900863 du 2 juillet 2019 qui prononce l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Marne, qui s'est fondé à tort sur les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, aurait pris la même décision, et dans le cadre du même pouvoir d'appréciation, s'il avait fait application des stipulations du premier alinéa du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles. Par suite et alors que ce changement de base légale n'a pas pour effet de priver M. A... d'une garantie, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution présentée par le préfet.

3°. D'autre part, aux termes des stipulations du premier alinéa III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire ". ".

4°. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est entré sur le territoire français le 30 septembre 2017, a obtenu, le 21 novembre 2018, à l'issue de sa première année d'étude en France, un mastère spécialisé d'" expert en éco-matériaux et conception BIM " à l'Ecole supérieure d'ingénieurs des travaux de la construction de Caen. Pour l'année universitaire 2018-2019, l'intéressé s'est inscrit en première année de licence d'anglais à l'université de Reims. Souhaitant devenir un ingénieur de profil international, l'intéressé justifie cette nouvelle inscription par sa volonté de valoriser sa formation initiale en perfectionnant sa maîtrise de l'anglais, qu'il juge insuffisante sur le plan professionnel. Il soutient que, dès le mois d'avril 2018, il a entrepris des démarches auprès des universités de Lyon 3 et de Caen-Normandie en vue de s'inscrire en deuxième ou en troisième année de licence d'anglais, mais que ses demandes ont été refusées, faute pour lui de posséder les prérequis académiques nécessaires au suivi de ces formations. Si le préfet de la Marne oppose à M. A... le fait que la moitié des cours suivis dans le cadre de son mastère était dispensée en anglais, que les propositions d'embauche qui lui ont été adressées après l'obtention de son diplôme n'impliquaient pas la réalisation d'études supplémentaires en anglais et, enfin, qu'il aurait pu suivre une formation linguistique privée, ces seuls éléments ne suffisent pas, dans les circonstances de l'espèce, à remettre en cause le caractère réel et sérieux des études poursuivies par l'intéressé. Par suite et alors que M. A... fait valoir en défense, d'une part, que l'examen des offres d'emploi dans son domaine de compétence montre que la connaissance de l'anglais est fortement recommandée et, d'autre part, qu'il existe une différence entre comprendre des supports de cours écrits en anglais et pratiquer cette langue dans un environnement professionnel, le préfet n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a retenu le moyen tiré de l'erreur d'appréciation pour annuler l'arrêté du 12 mars 2019.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête du préfet de la Marne doit être rejetée. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du préfet de la Marne est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

N° 19NC02251 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02251
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : BROCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-12-27;19nc02251 ?
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