La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/12/2019 | FRANCE | N°18NC02185

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 27 décembre 2019, 18NC02185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Emo a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2015.

Par un jugement du 7 juin 2018 le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2018, la SCI Emo, représent

e par Me C... et Me B..., demande à la cour :

1°) de prononcer l'annulation de ce jugement ;

2°) de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Emo a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2015.

Par un jugement du 7 juin 2018 le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2018, la SCI Emo, représentée par Me C... et Me B..., demande à la cour :

1°) de prononcer l'annulation de ce jugement ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions du 2° de l'article 260 du code général des impôts autorisent à exercer l'option pour une partie seulement des locaux faisant partie d'un même immeuble à la condition que, pour les locaux non couverts par l'option, le preneur ne soit pas assujetti à la taxe et que le bail ne fasse pas mention de cette taxe et c'est à tort que l'administration a entendu soumettre à la taxe la totalité des locaux loués au sein de cet immeuble ;

- la position de l'administration confirmée par le tribunal administratif est contraire à la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006.

Par un mémoire enregistré le 11 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la SCI Emo n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces ainsi que d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a assigné à la SCI Emo, au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2015, des rappels procédant de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des loyers facturés au cabinet d'assurance Ageo à raison de la location pour les besoins de son activité d'un local situé au rez-de-chaussée d'un immeuble dont la société requérante est propriétaire dans la commune de Châlons-en-Champagne, après avoir estimé que l'option pour la taxe qu'elle avait régularisée en ce qui concerne les bureaux loués aux autres preneurs devait s'appliquer de la même manière à tous les locaux de l'immeuble. Par le jugement attaqué du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de la SCI Emo tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. La société requérante relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes de l'article 256 A du code général des impôts : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention ". Aux termes de l'article 261 D du même code : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée :/ (...) 2° Les locations (...) de locaux nus ". Aux termes de l'article 260 du même code : " Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée :/ (...) 2° Les personnes qui donnent en location des locaux nus pour les besoins de l'activité d'un preneur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ou, si le bail est conclu à compter du 1er janvier 1991, pour les besoins de l'activité d'un preneur non assujetti. /L'option ne peut pas être exercée :/a. Si les locaux nus donnés en location sont destinés à l'habitation ou à un usage agricole ;/b. Si le preneur est non assujetti, sauf lorsque le bail fait mention de l'option par le bailleur ". L'article 193 de l'annexe II au même code dispose que : "Les personnes qui donnent en location plusieurs immeubles ou ensembles d'immeubles doivent exercer une option distincte pour chaque immeuble ou ensemble d'immeubles./Dans les immeubles ou ensembles d'immeubles comprenant à la fois des locaux nus donnés en location ouvrant droit à l'option en application du 2° de l'article 260 du code général des impôts et d'autres locaux, l'option ne s'étend pas à ces derniers mais elle s'applique globalement à l'ensemble des locaux de la première catégorie".

3. Les locations de locaux nus ne sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée que sur option du bailleur lorsque celle-ci est possible en vertu des dispositions ci-dessus reproduites de l'article 260 du code général des impôts. Par suite, les dispositions ci-dessus reproduites de l'article 193 de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application de l'article 260 du même code, n'imposent pas au propriétaire d'un immeuble au sein duquel il loue plusieurs locaux nus pour lesquels l'option à la taxe sur la valeur ajoutée est possible, que le preneur soit ou non lui-même assujetti à la taxe, de soumettre la totalité de ces locaux à la taxe mais doivent être interprétées en ce sens que le bailleur a la possibilité de ne soumettre qu'une partie des locaux nus qu'il loue au sein d'un même bâtiment à condition que son option identifie de manière expresse, précise et non équivoque, le ou les baux ainsi que les locaux concernés et permette par là-même d'en exclure les autres locaux. En revanche, en dehors de cette hypothèse, ce n'est qu'en l'absence de telles précisions que l'option sera présumée s'appliquer globalement à l'ensemble des locaux pour lesquels elle était possible. Ces dispositions de l'article 193 ne sauraient avoir pour objet ni pour effet de soumettre à la taxe des baux et des locaux pour lesquels l'option n'a pas été expressément formulée par le bailleur.

4. Il résulte de l'instruction que la société requérante est propriétaire dans la commune de Châlons-en-Champagne d'un immeuble à usage de bureaux dont elle loue le rez-de-chaussée au cabinet d'assurances Ageo, preneur assujetti exerçant une activité exonérée de taxe sur la valeur ajoutée et dont le bail ainsi que les factures ne mentionnent pas la taxe. Par ailleurs, la société requérante donne en location les autres étages à un cabinet comptable KPMG Fidal, preneur assujetti soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, selon un bail du 11 décembre 2001, pour lequel elle a exercé l'option à la taxe sur la valeur ajoutée le 9 mars 2001. Il résulte sans équivoque de cette option, à laquelle était annexé le bail pour lequel elle était effectuée, que la société Emo avait clairement identifié les locaux et le contrat de location qu'elle entendait soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, c'est en faisant une inexacte application des dispositions ci-dessus reproduites des articles 260 du code général des impôts et 193 de l'annexe II au même code, qu'en l'absence d'option expresse en ce sens, l'administration, qui ne pouvait pas se fonder sur sa propre doctrine, a entendu assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée les bureaux du rez-de-chaussée que la SCI Emo avait donnés en location à la société Ageo.

5. Il résulte de ce qui précède que la SCI Emo est fondée à demander la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2015 à raison de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de loyers facturés à la société Ageo.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SCI Emo pour les besoins de la présente instance d'appel.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 7 juin 2018 est annulé.

Article 2 : La SCI Emo est déchargée des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2015 à raison de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de loyers facturés à la société Ageo.

Article 3 : L'Etat versera à la SCI Emo la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Emo et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 18NC02185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02185
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-06-02-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILÉES. TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE. OPTIONS. - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE - OPÉRATIONS IMPOSABLES SUR OPTION - LOCATIONS DE LOCAUX NUS POUR LES BESOINS DE L'ACTIVITÉ DU PRENEUR (ART. 260 DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS) - PORTÉE DE L'OPTION EN CAS DE PLURALITÉ DE LOCATIONS AU SEIN D'UN MÊME IMMEUBLE (ART. 193 DE L'ANNEXE II AU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS).

19-06-02-03 Les locations de locaux nus ne sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée que sur option du bailleur lorsque celle-ci est possible en vertu des dispositions de l'article 260 du code général des impôts. Par suite, les dispositions de l'article 193 de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application de l'article 260 du même code, n'imposent pas au propriétaire d'un immeuble au sein duquel il loue plusieurs locaux nus pour lesquels l'option à la taxe sur la valeur ajoutée est possible, que le preneur soit ou non lui-même assujetti à la taxe, de soumettre la totalité de ces locaux à la taxe mais doivent être interprétées en ce sens que le bailleur a la possibilité de ne soumettre qu'une partie des locaux nus qu'il loue au sein d'un même bâtiment à condition que son option identifie de manière expresse, précise et non équivoque, le ou les baux ainsi que les locaux concernés et permette par là-même d'en exclure les autres locaux. En revanche, en dehors de cette hypothèse, ce n'est qu'en l'absence de telles précisions que l'option sera présumée s'appliquer globalement à l'ensemble des locaux pour lesquels elle était possible. Ces dispositions de l'article 193 ne sauraient avoir pour objet ni pour effet de soumettre à la taxe des baux et des locaux pour lesquels l'option n'a pas été expressément formulée par le bailleur.[RJ1].


Références :

[RJ1]

Solution contraire à la doctrine administrative BOI-TVA-CHAMP-50-10 n° 110 et n° 120.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE CHAMPIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-12-27;18nc02185 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award