Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 25 avril 2016 par lequel le maire de Toul a fixé à 1 le coefficient individuel de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires (IFTS) qui lui est versée.
Par un jugement n° 1603236 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Nancy a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2017, et un mémoire complémentaire, enregistré le 28 août 2019, la commune de Toul, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 17 octobre 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif de Nancy ;
3°) de mettre à la charge de Mme F... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle pouvait se fonder sur la " posture professionnelle " de Mme F... pour diminuer le taux de son IFTS ; une telle possibilité est prévue par une délibération du conseil municipal du 10 décembre 2015 ; aucune disposition législative ou règlementaire n'interdit à une collectivité territoriale de fixer des critères d'octroi de l'IFTS différents de ceux prévus à l'article 3 du décret du 14 janvier 2002 ;
- dès lors qu'elle pouvait tenir compte de la " posture professionnelle " de l'agent pour diminuer le montant de l'IFTS due à Mme F..., c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que la décision litigieuse constituait une sanction déguisée.
Par un mémoire, enregistré le 5 février 2018, Mme F..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de Toul une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués par la commune de Toul ne sont pas fondés et elle reprend les moyens qu'elle avait invoqués en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;
- le décret n° 2002-63 du 14 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,
- et les observations de Me D... pour la commune de Toul.
1. Mme F..., attachée de conservation du patrimoine, exerce les fonctions de directrice du musée d'art et d'histoire de Toul depuis le 15 avril 2011. Par un arrêté du 25 avril 2016, le maire de cette commune a réduit le coefficient individuel de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires (IFTS) qui lui est versée, en le portant de 3 à 1 à compter du 1er mai 2016. La commune de Toul relève appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale (...) fixe, par ailleurs, les régimes indemnitaires dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application de ces dispositions : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales (...) pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. / Le tableau joint en annexe établit les équivalences avec la fonction publique de l'Etat des différents grades des cadres d'emplois de la fonction publique territoriale (...) ". Enfin, aux termes de l'article 2 du même décret : " L'assemblée délibérante de la collectivité (...) fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il revient à l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat d'un grade et d'un corps équivalents au grade et au cadre d'emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l'Etat. Il lui est notamment loisible de subordonner le bénéfice d'un régime indemnitaire à des conditions plus restrictives que celles qui sont applicables aux fonctionnaires de l'Etat. Le respect du principe d'égalité entre les agents publics ne s'oppose pas à l'institution de différences dans le régime indemnitaire dont ils bénéficient fondées sur des différences dans les conditions d'exercice de leurs fonctions ou sur les nécessités du bon fonctionnement du service auquel ils appartiennent.
4. Si l'article 3 du décret du 14 janvier 2002 relatif à l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires des services déconcentrés prévoit que " Le montant de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires varie suivant le supplément de travail fourni et l'importance des sujétions auxquels le bénéficiaire est appelé à faire face dans l'exercice effectif de ses fonctions " et si les critères d'attribution ainsi définis sont exclusifs d'autres critères, ledit décret se borne à fixer les conditions d'attribution de l'IFTS pour les fonctionnaires affectés dans les services déconcentrés de l'Etat et dans les établissements publics de l'Etat à caractère administratif. Par suite, Mme F... ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions. Par ailleurs la commune pouvait fixer des critères d'octroi de l'IFTS différents de ceux prévus par le décret 14 janvier 2002 et pouvait ainsi prévoir, dans la délibération du 10 décembre 2015 fixant le régime indemnitaire des agents de la commune, que " la valeur professionnelle de l'agent " était l'un des critères à prendre en compte pour l'attribution du coefficient de modulation individuelle. La commune de Toul est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision litigieuse pour erreur de droit.
5. Toutefois, le tribunal administratif a retenu un second motif d'annulation tiré de ce que la décision litigieuse devait être regardée comme une sanction déguisée. Pour contester ce second motif, la commune se borne à indiquer qu'elle pouvait tenir compte de la valeur professionnelle de Mme F... pour faire évoluer le taux de l'IFTS. En outre, ainsi que l'a expressément indiqué le maire dans la décision de rejet du recours gracieux formée par Mme F..., la décision litigieuse est motivée par la " posture professionnelle de Mme B... F..., qui a fait l'objet d'un rapport circonstancié ". Ce rapport, établi par la directrice de cabinet, fait état d'un " incident " et comporte des griefs à l'encontre de Mme F..., notamment à propos de l'attitude que l'agent aurait eue le 22 mars 2016 avec des partenaires privés qui souhaitaient organiser des évènements dans le musée. Ce rapport circonstancié, produit par la commune en première instance, porte d'ailleurs la mention " Au vu de ces éléments : décision d'une baisse au coefficient 1, contre 3 actuellement, de l'IFTS avec effet immédiat ". Il n'est enfin pas contesté que la décision litigieuse est intervenue deux jours après la tenue d'une réunion dans le bureau du maire à propos des évènements du 22 mars 2016. Dans ces conditions, la décision litigieuse doit être regardée comme ayant constitué une sanction déguisée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Toul n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 25 avril 2016.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Toul au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme F... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Toul est rejetée.
Article 2 : La commune de Toul versera à Mme F... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... F... et à la commune de Toul.
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N° 17NC03024