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14/11/2019 | FRANCE | N°19NC00788

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 14 novembre 2019, 19NC00788


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1900849 du 20 février 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 mars 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) de lui accord

er le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 20 février 2019 ;

3°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1900849 du 20 février 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 mars 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 20 février 2019 ;

3°) d'annuler cet arrêté ;

4°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France et de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient qu'en prenant cette décision le préfet a méconnu les dispositions de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, des articles 17, 18 et 19 de la directive n° 2013/33/ du 26 juin 2013 et de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en raison des défaillances systémiques que présente l'Italie dans l'accueil des demandeurs d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2019, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert, cette décision ne pouvant plus être légalement exécutée compte tenu de l'expiration du délai de transfert prévu à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par une décision du 28 mars 2019, le président du bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. D... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant nigérian, s'est présenté le 11 décembre 2018 au guichet unique de la préfecture de la Moselle en vue de demander l'asile. La comparaison du relevé décadactylaire de ses empreintes avec le fichier " Eurodac " a révélé que ses empreintes avaient déjà été relevées par les autorités italiennes le 22 juillet 2016 à l'occasion du dépôt d'une demande d'asile. Le 3 janvier 2019, le préfet du Bas-Rhin a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Le 15 janvier 2019, les autorités italiennes ont explicitement donné leur accord à cette mesure. En conséquence, le préfet du Bas-Rhin a, par un arrêté du 22 janvier 2019, décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile. M. D... relève appel du jugement du 20 février 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert aux autorités italiennes.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert :

2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code applicable au litige : " (...) II. - Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert ou lorsque celle-ci est notifiée alors que l'étranger fait déjà l'objet d'une telle décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévu au III de l'article L. 512-1. (...) ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date de notification à l'autorité administrative du jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 22 janvier 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé le transfert de M. D... auprès des autorités italiennes est intervenu moins de six mois après que ces dernières ont implicitement donné leur accord pour la prise en charge de l'intéressé, et donc dans le délai d'exécution du transfert fixé par l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Ce délai a été interrompu le 4 février 2019, date à laquelle M. D... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux. Un nouveau délai de six mois a recommencé à courir à compter de la notification au préfet du Bas-Rhin le 23 février 2019 du jugement du 20 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a statué sur sa demande. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait décidé de porter à un an ou dix-huit mois le délai de transfert au motif d'un emprisonnement de l'intéressée ou au motif que celle-ci aurait pris la fuite. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la décision de transfert aurait été exécutée au cours de ce délai. Par suite, ce nouveau délai de six mois étant expiré le 23 août 2019, l'Italie a été libérée, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013, de son obligation de prendre en charge M. D... et la responsabilité de l'examen de la demande d'asile de cette dernière a été transférée, à cette date, à la France. Il s'ensuit qu'à cette date, la décision de transfert est devenue caduque et ne pouvait plus être légalement exécutée. Cette caducité étant intervenue postérieurement à l'introduction de l'appel, les conclusions de la requête de M. D... tendant à l'annulation du jugement susmentionné ayant rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 janvier 2019 et à l'annulation de cette décision ainsi que les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. D... tendant à l'annulation du jugement du 20 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg rejetant sa demande dirigée contre la décision de transfert du 22 janvier 2019 et à l'annulation de cette dernière, ainsi que sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 19NC00788


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00788
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : AMBROSI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-11-14;19nc00788 ?
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