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01/10/2019 | FRANCE | N°17NC02283

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 01 octobre 2019, 17NC02283


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la délibération du 30 décembre 2015 par laquelle le comité de direction de l'office de tourisme de Verdun a prononcé son licenciement pour faute grave.

Par un jugement n° 1600816 du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 septembre 2017, Mme D... B..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le

jugement du tribunal administratif de Nancy du 11 juillet 2017 ;

2°) d'annuler la délibération du 3...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la délibération du 30 décembre 2015 par laquelle le comité de direction de l'office de tourisme de Verdun a prononcé son licenciement pour faute grave.

Par un jugement n° 1600816 du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 septembre 2017, Mme D... B..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 11 juillet 2017 ;

2°) d'annuler la délibération du 30 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'office de tourisme de Verdun et de la communauté d'agglomération du Grand Verdun le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a omis de soulever d'office le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte contesté ;

- le comité de direction de l'office de tourisme n'était pas compétent pour prendre la décision litigieuse ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ;

- ces faits ne présentent pas un caractère fautif ;

- la décision contestée est entachée de détournement de pouvoir ;

- la sanction de licenciement est disproportionnée au regard de la gravité des faits retenus à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2017, la communauté d'agglomération du Grand Verdun, venant aux droits de l'office de tourisme de Verdun, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 2 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 avril 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de tourisme ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n° 2015-1002 du 18 août 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour la communauté d'agglomération du Grand Verdun.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée à compter du 6 novembre 2013, par un contrat de travail d'une durée de trois ans, afin d'assurer les fonctions de directrice de l'office de tourisme de Verdun. A la suite de plaintes de plusieurs agents dénonçant son mode de gestion, Mme B... a été suspendue à titre provisoire par un arrêté du 3 novembre 2015. Le comité de direction de l'office de tourisme de Verdun a, en outre, décidé, par une délibération du 30 décembre 2015, de la licencier pour faute grave. Mme B... relève appel du jugement du 11 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 133-11 du code de tourisme, dans sa version issue du décret du 18 août 2015 portant diverses mesures de simplification et d'adaptation dans le secteur du tourisme, applicable en l'espèce : " Le directeur de l'office de tourisme est recruté par contrat (...) / Dans tous les cas, la décision de licenciement ou de non-renouvellement du contrat est prise dans les conditions fixées à l'article L. 133-6 ". L'article L. 133-6 du code de tourisme prévoit que la nomination et le licenciement du directeur de l'office " sont décidés par délibération du comité de direction sur proposition du président ". Aux termes de l'article 37 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale ayant le pouvoir de procéder au recrutement (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le comité de direction de l'office de tourisme était compétent pour décider, le 30 décembre 2015, du licenciement de Mme B.... Par suite, la requérante, qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions antérieures du code du tourisme, n'est fondée à soutenir ni que la délibération contestée serait entachée d'incompétence, ni que les premiers juges auraient, à tort, omis de relever le moyen tiré de cette prétendue incompétence.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 36 du décret du 15 février 1988 : " Tout manquement au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent non titulaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions est constitutif d'une faute l'exposant à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par le code pénal ". Aux termes de l'article 36-1 de ce décret : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents non titulaires sont les suivantes : 1° L'avertissement ; 2° Le blâme ; 3° L'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale de six mois pour les agents recrutés pour une durée déterminée et d'un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée ; 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement ".

5. Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur les questions de savoir si les faits reprochés à un agent public constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

6. En l'espèce, le comité de direction de l'office de tourisme a décidé de licencier Mme B... en raison, d'une part, de manquements dans ses fonctions managériales et de direction, de nature à compromettre le bon fonctionnement du service et l'intégrité physique et morale des agents, et, d'autre part, de propos dénigrants et irrespectueux à l'égard de ces mêmes agents, des élus municipaux et des habitants de la commune de Verdun.

7. A la suite d'une plainte collective des agents de l'office de tourisme, relayée par une alerte du médecin du travail du 2 septembre 2015 faisant état de situations de souffrance au travail d'une partie des agents, l'administration a conduit une enquête interne du 2 au 15 décembre 2015, laquelle a révélé que l'ambiance de travail au sein de l'office de tourisme s'était fortement dégradée depuis la prise de fonctions de Mme B... en qualité de directrice. Les témoignages recueillis auprès de l'ensemble des agents de l'office indiquent, de façon unanime, que l'intéressée, outre un comportement lunatique, tient en public des propos insultants, dénigrants et offensants à l'égard de ses collaborateurs, des élus municipaux dont le président de l'office et, de façon plus générale, sur la commune de Verdun et ses habitants. L'enquête administrative a encore révélé que Mme B... n'organisait pas de réunions de service, ne répondait pas aux demandes exprimées par les agents pour l'exécution de leurs missions, notamment à leurs interrogations sur les conditions tarifaires applicables, établissait les plannings de travail de façon aléatoire sans tenir compte de la réglementation sur les heures de récupération, déléguait certaines tâches lui revenant en principe, telles les " points presse ", et se montrait peu disponible pour le service. Le comportement de Mme B... dans le cadre professionnel et ses méthodes managériales étaient à l'origine, selon les conclusions du rapport d'enquête, d'une déstabilisation et d'un stress important chez plusieurs agents de l'office de tourisme, justifiant l'alerte donnée par le médecin du travail.

8. Si la requérante soutient qu'elle a été recrutée afin de redresser la situation financière difficile de l'office de tourisme et que les agents lui ont été d'emblée hostiles, les témoignages recueillis par la commission d'enquête sont convergents sur les manquements qui lui sont reprochés. Invitée à présenter ses observations sur ces manquements par la commission d'enquête, Mme B... s'y est refusée. La circonstance que deux des douze agents interrogés par cette commission auraient été précédemment sanctionnés par l'intéressée n'est pas de nature à infirmer les faits qui lui sont reprochés, lesquels ressortent des témoignages de l'ensemble du personnel. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient la requérante, que les membres du personnel, entendus par une commission composée de trois personnes dont ne faisait pas partie le président de l'office, l'auraient critiquée sur ordre de ce dernier. Informée dès les 22 août et 8 septembre 2014, par des courriers du président de l'office du tourisme, que ses méthodes managériales étaient à l'origine de dysfonctionnements et d'une situation de souffrance au travail pour une grande partie du personnel, Mme B... n'a, enfin, pris aucune mesure propre à modifier son comportement professionnel et à apaiser les tensions au sein du service. Les pratiques de gestion et le comportement reprochés à Mme B..., qui ne peuvent se justifier ni par les tensions avec certains agents ou avec le président de l'office de tourisme, ni par les difficultés financières de l'établissement, doivent dès lors être regardées comme établies.

9. En estimant que ces faits constituaient des fautes de nature à justifier une sanction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne les a pas inexactement qualifiés. En outre, eu égard à la nature de ces faits, qui avaient déjà donné lieu à une mise en garde au cours de l'année 2014, et à la méconnaissance qu'ils traduisent, de la part de Mme B..., des responsabilités qui étaient les siennes, l'autorité disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, pris une sanction disproportionnée en décidant de la licencier.

10. En dernier lieu, Mme B... soutient que le président de l'office de tourisme a cherché à la mettre en difficulté, notamment en aggravant les difficultés financières de l'établissement, afin de pouvoir l'évincer du service. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier une situation de mésentente entre ces deux personnes, il n'est pas établi, eu égard aux manquements reprochés à la requérante, qui sont établis et justifient son licenciement disciplinaire, que la décision contestée serait entachée de détournement de pouvoir.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Verdun, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme B... demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme dont de la communauté d'agglomération du Grand Verdun demande le versement sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération du Grand Verdun présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la communauté d'agglomération du Grand Verdun.

2

N° 17NC02283


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NC02283
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : CABINET FILOR - JURI-FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-10-01;17nc02283 ?
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