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27/06/2019 | FRANCE | N°18NC01539

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 27 juin 2019, 18NC01539


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif national " Non au 19 mars 1962 " a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 27 mai 2016 par laquelle le maire de Lons-le-Saunier a rejeté sa demande tendant à ce que la dénomination du rond-point " 19 mars 1962 - Fin de la guerre d'Algérie " soit modifiée, ensemble le rejet de son recours gracieux du 10 juillet 2016.

Par un jugement n° 1601811 du 27 mars 2018, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 23 mai 2018, le collectif national " Non au 19 mars 1962 ", représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif national " Non au 19 mars 1962 " a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 27 mai 2016 par laquelle le maire de Lons-le-Saunier a rejeté sa demande tendant à ce que la dénomination du rond-point " 19 mars 1962 - Fin de la guerre d'Algérie " soit modifiée, ensemble le rejet de son recours gracieux du 10 juillet 2016.

Par un jugement n° 1601811 du 27 mars 2018, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mai 2018, le collectif national " Non au 19 mars 1962 ", représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler la décision du 27 mai 2016 du maire de Lons-le-Saunier et le rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Lons-le-Saunier de retirer la mention " Fin de la guerre d'Algérie " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte du 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Lons-le-Saunier une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'il n'y a pas modification des circonstances de fait et de droit ;

- les décisions contestées sont entachée d'erreur manifeste d'appréciation .

- la décision attaquée est insuffisamment motivée.

Par une ordonnance du 19 septembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 18 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 74-1044 du 9 décembre 1974 donnant vocation à la qualité de combattant aux personnes ayant participé aux opérations effectuées en Afrique du nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 ;

- la loi n° 99-882 du 18 octobre 1999 relative à la substitution, à l'expression " aux opérations effectuées en Afrique du nord ", de l'expression " à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc " ;

- la loi n° 2012-1361 du 6 décembre 2012 relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ;

- le décret n° 2003-925 du 26 septembre 2003 instituant une journée nationale d'hommage aux " morts pour la France " pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie, le 5 décembre de chaque année ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 16 mai 2016, le collectif national " Non au 19 mars 1962 ", association dont l'objet est notamment " d'assurer le rétablissement de la vérité historique à prendre en considération pour le cessez-le-feu intervenu entre les belligérants à la fin de la guerre d'Algérie, laquelle ne saurait être regardée comme celle du 19 mars 1962 ", a demandé au maire de Lons-le-Saunier de renommer le rond-point dénommé " 19 mars 1962 - Fin de la guerre d'Algérie " en supprimant le terme " Fin de la guerre d'Algérie ". Le 27 mai 2016, le maire de Lons-le-Saunier a rejeté cette demande et a opposé une décision implicite de rejet au recours gracieux du 10 juillet 2016 présenté par l'association. Le collectif forme appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le tribunal administratif n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments présentés par l'association demanderesse à l'appui de ses moyens. En faisant état des différentes dates de commémoration de la guerre d'Algérie retenues par les dispositions législatives et réglementaires et en concluant que le conseil municipal de Lons-le-Saunier n'avait pas commis d'illégalité en attribuant la dénomination contestée à un rond-point, le tribunal administratif a nécessairement tenu compte de l'argument tenant à ce qu'aucune date officielle fixant la fin de la guerre d'Algérie n'avait été retenue par le législateur. Ainsi, son jugement n'est pas entaché d'omission à statuer.

Sur la légalité des décisions contestées :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-10 du même code : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si le conseil municipal est seul compétent pour délibérer sur la dénomination des rues et places publiques de la commune, c'est au maire qu'il incombe d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal. Par suite, le maire a compétence pour rejeter une demande tendant à l'abrogation ou à la modification de la dénomination d'une rue ou place publique. Toutefois, il ne peut légalement prendre une telle décision que si les dispositions dont l'abrogation est sollicitée sont elles-mêmes légales. Dans l'hypothèse inverse, en effet, il est tenu d'inscrire la question à l'ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions illégales.

5 Il ressort des termes du refus du 27 mai 2016 opposé à la demande de changement de dénomination présentée par l'association requérante, que le maire de Lons-le-Saunier s'est fondé sur le fait que, sans ignorer ni nier que des drames, souffrances et exactions ont été subis après le cessez-le-feu décidé pour le 19 mars 1962 par les accords d'Evian, il constatait qu'une partie importante des anciens combattants d'Algérie était attachée à cette date et que le législateur n'avait pas entendu fixer une autre date pour marquer la fin de la guerre d'Algérie.

6. Les accords d'Evian du 18 mars 1962 ont, dans leur article 1, stipulé qu'" il sera mis fin aux opérations militaires et à toute action armée sur l'ensemble du territoire algérien, le 19 mars 1962, à 12 heures ". Si des combats et évènements dramatiques se sont poursuivis ultérieurement en violation de ces accords, les circonstances que deux dates commémoratives aient été instituées respectivement le 5 décembre et le 19 mars et que la qualité d'ancien combattant ait été reconnue jusqu'à la date du 2 juillet 1962, soit le lendemain de l'organisation du scrutin d'autodétermination, ne suffisent pas à établir qu'une autre date officielle pour la fin de la guerre d'Algérie aurait été instaurée par le législateur, ni qu'il aurait eu la volonté d'interdire la mention de toute date. Par suite, l'association requérante n'établit pas que les dispositions invoquées constituent des changements dans les circonstances de droit ou de fait ayant eu pour effet d'entacher d'illégalité, postérieurement à son édiction, la décision par laquelle la commune de Lons-le-Saunier a attribué au rond-point en cause la dénomination " 19 mars 1962 - Fin de la guerre d'Algérie " et la décision attaquée du maire de Lons-le-Saunier.

7 En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mention de la fin de la guerre d'Algérie à la suite de la date du 19 mars 1962 soit en l'espèce de nature à provoquer des troubles à l'ordre public, dès lors que si elle est susceptible de heurter la sensibilité de certaines personnes, il n'est pas contesté qu'elle est apposée sur un modeste rond-point sans caractère symbolique. Par suite, la décision du maire de Lons-le-Saunier de ne pas soumettre au vote du conseil municipal la modification de dénomination du rond-point en cause n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que le collectif national " Non au 19 mars 1962 " n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lons-le-Saunier, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le collectif national " Non au 19 mars 1962 " demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C ID E :

Article 1er : La requête du collectif national " Non au 19 mars 1962 " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au collectif national " Non au 19 mars 1962 " et à la commune de Lons-le-Saunier.

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

2

N° 18NC01539


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NC01539
Date de la décision : 27/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Disparition de l'acte - Abrogation - Abrogation des actes non réglementaires.

Collectivités territoriales - Commune - Organisation de la commune - Organes de la commune - Maire et adjoints - Pouvoirs du maire.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GOZZO

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-06-27;18nc01539 ?
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