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16/05/2019 | FRANCE | N°18NC00401

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 16 mai 2019, 18NC00401


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La section de commune de Pissenavache a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2015 par lequel le préfet du Doubs a autorisé le GAEC Jeanningros à exploiter diverses parcelles situées sur le territoire des communes de Bians-les-Usiers, Chaffois, Dommartin, Houtaud et Sombacour, ainsi que la décision du 9 mai 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1601085 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure

devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 février 2018 et le 9 o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La section de commune de Pissenavache a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2015 par lequel le préfet du Doubs a autorisé le GAEC Jeanningros à exploiter diverses parcelles situées sur le territoire des communes de Bians-les-Usiers, Chaffois, Dommartin, Houtaud et Sombacour, ainsi que la décision du 9 mai 2016 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1601085 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 février 2018 et le 9 octobre 2018, la section de commune de Pissenavache, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler les décisions contestées du préfet du Doubs ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le schéma directeur départemental des structures agricoles est contraire aux objectifs mentionnés par l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, ce qu'elle peut invoquer par voie d'exception d'illégalité ;

- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ou de violation de la loi au regard de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités locales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2018, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'exception d'illégalité doit être écartée ;

- l'article L. 2411-10 du code général des collectivités locales ne peut être utilement invoqué.

Par une ordonnance du 19 septembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 18 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la section de commune de Pissenavache.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 24 décembre 2015, le préfet du Doubs a autorisé le GAEC Jeanningros, en concurrence avec d'autres demandeurs, à exploiter différentes parcelles dont la parcelle cadastrée ZM 23, d'une surface de 8 hectares 70 ares et 64 centiares, appartenant à la section de commune de Pissenavache et située à Bians-les-Usiers. La section de commune forme appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté préfectoral du 24 décembre 2015, ainsi que contre la décision du 9 mai 2015 rejetant son recours gracieux.

2. D'une part, la section de commune de Pissenavache soutient, par la voie de l'exception d'illégalité, que la disposition appliquée en l'espèce du schéma directeur départemental des structures agricoles du Doubs, en vertu de laquelle " les autorisations d'exploiter seront accordées systématiquement en cas de regroupement d'exploitations existantes sans agrandissement ni diminution du chef d'exploitation ou d'actifs ", méconnaît l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, qui prévoit que l'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs.

3. Aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction en vigueur à la date de la demande d'autorisation : " (...) L'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive. / En outre, il vise : - soit à empêcher le démembrement d'exploitations agricoles viables pouvant permettre l'installation d'un ou plusieurs agriculteurs ; / - soit à favoriser l'agrandissement des exploitations agricoles dont les dimensions, les références de production ou les droits à aide sont insuffisants au regard des critères arrêtés dans le schéma directeur départemental des structures ; / - soit à permettre l'installation ou conforter l'exploitation d'agriculteurs pluriactifs partout où l'évolution démographique et les perspectives économiques le justifient. ". Aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Le schéma directeur départemental des structures agricoles détermine les priorités de la politique d'aménagement des structures d'exploitation et fixe les conditions de la mise en oeuvre des dispositions des articles L. 312-5 et L. 314-3 ainsi que celles du chapitre Ier du titre III du présent livre. / Ce schéma est préparé et arrêté par le préfet après avis du conseil général, de la chambre d'agriculture, de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ".

4. Aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : / 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande (...) ".

5. Le schéma directeur départemental des structures agricoles du Doubs approuvé par arrêté préfectoral du 14 mai 2003, dans sa rédaction issue des modifications applicables à la date de la décision d'autorisation du 24 décembre 2015, comporte les objectifs de la politique d'aménagement des structures d'exploitation et des règles de priorités destinées à tenir compte des particularités du Doubs, liées notamment à la prédominance d'exploitations laitières. Les installations d'agriculteurs sont mentionnées à plusieurs reprises parmi les objectifs et règles de priorité, même si d'autres considérations, figurant également parmi les priorités générales, sont prises en compte, notamment les agrandissements d'exploitations, ainsi que des éléments permettant de maintenir l'activité principale du département. La circonstance qu'ait été appliquée en l'espèce une disposition du schéma faisant partie des "cas particuliers" prévoyant que les autorisations d'exploiter sont accordées systématiquement à certains regroupements d'exploitations, ne suffit pas à rendre le schéma incompatible avec l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime qui ne mentionne de façon générale que certains objectifs du contrôle des structures et n'impose pas que l'installation d'agriculteurs soit prioritaire dans tous les cas. L'article L. 312-1 du même code laisse en outre une grande liberté aux autorités locales dans l'élaboration des schémas départementaux et l'article L. 331-3 prévoit que l'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas allégué que le préfet du Doubs aurait fait une inexacte application du schéma directeur départemental des structures agricoles, en méconnaissance de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, le moyen ne peut être accueilli.

6. En second lieu, la section de commune de Pissenavache soutient que c'est à tort que, pour accorder l'autorisation au GAEC Jeanningros qui n'est pas implanté sur son territoire et non à des demandeurs exploitants ou domiciliés sur son territoire, le préfet du Doubs n'a pas tenu compte de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités locales qui prévoit que " Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural (...) / 1° Au profit des exploitants agricoles ayant leur domicile réel et fixe, un bâtiment d'exploitation et le siège de leur exploitation sur le territoire de la section et exploitant des biens agricoles sur celui-ci ; et, si l'autorité compétente en décide, au profit d'exploitants agricoles ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant, pendant la période hivernale, leurs animaux sur le territoire de la section conformément au règlement d'attribution et exploitant des biens agricoles sur ledit territoire ; / 2° A défaut, au profit des exploitants agricoles utilisant des biens agricoles sur le territoire de la section et ayant un domicile réel et fixe sur le territoire de la commune ; / 3° A titre subsidiaire, au profit des exploitants agricoles utilisant des biens agricoles sur le territoire de la section ; / 4° Lorsque cela est possible, au profit de l'installation d'exploitations nouvelles.(...) ".

7. Toutefois, la législation sur le contrôle des structure des exploitations agricoles et celle relative aux baux ruraux passés par les sections de communes sont indépendantes. Par suite, le préfet du Doubs n'avait pas à appliquer l'article L. 2411-10 du code général des collectivités locales pour prendre l'autorisation contestée et la section de commune de Pissenavache ne peut utilement se prévaloir de cet article dans le présent litige, même si elle pourrait rencontrer des difficultés à trouver un locataire ayant obtenu l'autorisation d'exploiter et remplissant les conditions posées par l'article L. 2411-10 du code général des collectivités locales.

8. Il résulte de ce qui précède que la section de commune de Pissenavache n'est pas fondée à soutenir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a à tort rejeté sa demande dirigée contre l'autorisation d'exploitation accordée le 24 décembre 2015 par le préfet du Doubs et contre la décision du 9 mai 2016 rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Pissenavache demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la section de commune de Pissenavache est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la section de commune de Pissenavache, au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au GAEC Jeanningros.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

5

N° 18NC00401


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC00401
Date de la décision : 16/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : BOCHER-ALLANET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-05-16;18nc00401 ?
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