Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les décisions du 3 août 2017 par lesquelles le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1702584 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 mars 2018, M. A...B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1702584 du 21 décembre 2017 du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler les décisions attaquées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs : à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la remise effective de ce titre, de lui délivrer un récépissé avec droit au travail dans un délai de huit jours ; à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à renouveler dans l'attente du réexamen de son droit au séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son avocate au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. B...soutient que :
- en lui refusant le séjour, le préfet a méconnu l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
- le préfet a également méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2018, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 20 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Rees, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...B..., ressortissant kosovar, est entré en France en octobre 2013, selon ses déclarations. A la suite du rejet de sa demande d'asile, il a, les 30 mars 2015 et 24 octobre 2016, sollicité auprès du préfet du Doubs son admission au séjour en se prévalant de sa qualité de conjoint d'une compatriote bénéficiaire de la protection subsidiaire et de ses attaches privées et familiales en France. Par un arrêté du 3 août 2017, le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
2. M. B...relève appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
En ce qui concerne le refus de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit : 1° A l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 ; (...) 3° A son conjoint ou au partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est postérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile, à condition que le mariage ou l'union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d'une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ".
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. B...et Mme C...vivaient ensemble, qu'ils étaient mariés depuis plus d'un an, et que leur mariage a été célébré, le 14 février 2014, alors que M. B...était âgé de 37 ans et que Mme C...était déjà bénéficiaire de la protection subsidiaire. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que, par un jugement du 27 mars 2017, le tribunal correctionnel de Besançon a condamné M. B...à une peine de deux ans d'emprisonnement pour des faits d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France ou dans un Etat partie à la convention de Schengen, en bande organisée, et de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de 10 ans d'emprisonnement, commis du 1er janvier 2014 au 23 mars 2015. Compte tenu de la nature, de la gravité et du caractère répété de ces infractions, qui n'ont pris fin, deux ans et demi seulement avant la décision attaquée, que grâce à l'action pénale et l'interpellation de l'intéressé, le préfet du Doubs a fait une exacte application des dispositions de l'article L. 313-13 précité en refusant de délivrer à M. B...un titre de séjour au motif que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. B...fait valoir la présence en France de son épouse et de leurs deux enfants, nés le 15 septembre 2014 et le 31 octobre 2015, ainsi que l'impossibilité de reconstituer leur cellule familiale dans leur pays d'origine commun, alors que son épouse bénéficie de la protection subsidiaire en raison des risques auxquels elle serait exposée en cas de retour au Kosovo. Toutefois, eu égard à la gravité de la menace pour l'ordre public que constituait, à la date de la décision attaquée, la présence en France de M.B..., le préfet n'a pas, en refusant de l'admettre au séjour, porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris sa décision. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il ressort de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, à qui ces stipulations n'interdisaient nullement de prendre en compte la menace à l'ordre public constituée par la présence en France de M.B..., n'aurait pas également pris en compte l'intérêt supérieur de ses enfants mineurs.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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N° 18NC00832