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29/03/2018 | FRANCE | N°17NC01075

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 17NC01075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL du Moulin Brûlé a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les titres de recettes correspondant à des factures émises à son encontre les 16 mai 2012, 23 mai 2013 et 14 mai 2014 par l'association foncière de Normée.

Par un jugement no 1500177 du 14 mars 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les titres de perception contestés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2017, l'association foncière

de Normée, représentée par la SELARL Pelletier et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL du Moulin Brûlé a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les titres de recettes correspondant à des factures émises à son encontre les 16 mai 2012, 23 mai 2013 et 14 mai 2014 par l'association foncière de Normée.

Par un jugement no 1500177 du 14 mars 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les titres de perception contestés.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2017, l'association foncière de Normée, représentée par la SELARL Pelletier et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1500177 du 14 mars 2017 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de rejeter la demande de l'EARL du Moulin Brûlé ;

3°) de condamner l'EARL du Moulin Brûlé à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association foncière de Normée soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la demande dès lors que l'action de l'EARL du Moulin Brûlé était prescrite à l'égard de l'ensemble des titres de perception, en application de l'article 54 du décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;

- les mémoires en défense qu'elle a déposés auprès du tribunal étaient recevables ;

- les délibérations de son bureau des 27 avril 2012, 26 avril 2013 et 12 mai 2014 ont été transmises en préfecture ;

- les factures émises correspondent aux redevances annuelles et non à la réalisation de travaux et ne nécessitaient donc pas l'autorisation préalable de l'assemblée générale ;

- l'EARL du Moulin Brûlé ne peut pas utilement soutenir qu'elle n'est pas propriétaire des parcelles dès lors que les informations au vu desquelles les factures ont été établies ont été fournies par son gérant ;

- l'EARL du Moulin Brûlé n'a jamais contesté les factures émises depuis 2012 ;

- la facturation au titre de la parcelle XD 9 est erronée : elle en prend acte et annulera les titres correspondants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2017, l'EARL du Moulin Brûlé, représentée par la Selas Devarenne associés Grand Est, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'association foncière de Normée à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'EARL du Moulin Brûlé soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime,

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;

- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance susvisée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour l'EARL du Moulin Brûlé.

Considérant ce qui suit :

1. L'EARL du Moulin Brûlé exploite 50 hectares de terres agricoles situées dans le périmètre de l'association foncière de Normée, créée en 1967 à l'issue du remembrement opéré dans cette commune. Les 16 mai 2012, 23 mai 2013 et 14 mai 2014, la trésorerie d'Anglure a établi à destination de l'EARL du Moulin Brûlé un total de 15 "factures" pour le compte de l'association foncière de Normée en vue du recouvrement de " taxes sur les propriétaires remembrés ". En l'absence de paiement par l'EARL du Moulin Brûlé, une mise en demeure, puis un avis d'opposition ont été établis les 29 octobre et 19 novembre 2014.

2. L'association foncière de Normée relève appel du jugement du 14 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'ensemble des 15 titres de recettes contestés.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Aux termes de l'article 54 du décret du 3 mai 2006 susvisé : " L'ordonnateur émet le titre de recettes dont une ampliation est adressée aux redevables de l'association syndicale autorisée et vaut avis des sommes à payer. (...) L'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien-fondé de la redevance liquidée par l'association suspend la force exécutoire du titre. L'exercice de ce recours par le débiteur se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuites (...) ".

4. La requérante fait valoir qu'a la date du 27 janvier 2015, à laquelle la demande a été introduite auprès du tribunal, le délai de prescription était expiré. Toutefois, il résulte des dispositions précitées que ce délai n'a pu commencer à courir qu'à compter de la date à laquelle l'EARL du Moulin Brûlé a reçu les ampliations des titres de recettes ou, à défaut, la mise en demeure ou l'avis d'opposition. En se bornant à se prévaloir de la date d'émission de ces différents actes, sans apporter d'éléments relatifs aux dates de réception de ces titres par l'EARL du Moulin Brûlé, l'association foncière de Normée n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'écoulement du délai de prescription qu'elle allègue.

5. Par conséquent, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a regardé la demande de l'EARL du Moulin Brûlé comme recevable.

Sur le bien-fondé des titres de recettes :

6. Il ressort des pièces du dossier que l'association foncière de Normée est une association foncière d'aménagement foncier agricole régie par les dispositions des articles L. 131-1 et suivants et R. 131-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, lesquelles renvoient à l'ordonnance du 1er juillet 2004 et au décret du 3 mai 2006 susvisés.

7. Aux termes de l'article L. 133-1 code rural et de la pêche maritime : " Il est constitué entre les propriétaires des parcelles incluses dans un périmètre d'aménagement foncier agricole et forestier, une association foncière chargée de la réalisation, de l'entretien et de la gestion des travaux ou ouvrages mentionnés aux articles L. 123-8 et L. 133-3 à L. 133-5 et, le cas échéant, du recouvrement de la participation des intéressés dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 121-15 ". Par ailleurs, aux termes de l'article 31 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée: " I. - Les ressources d'une association syndicale autorisée comprennent : / 1° Les redevances dues par ses membres ; (...) / II. - Les redevances syndicales sont établies annuellement et réparties entre les membres en fonction des bases de répartition des dépenses déterminées par le syndicat. Ces bases tiennent compte de l'intérêt de chaque propriété à l'exécution des missions de l'association ".

8. Il résulte notamment de la liste non contestée des parcelles exploitées que le gérant de l'EARL a transmis à l'association foncière de remembrement de Normée, que l'EARL du Moulin Brûlé n'est propriétaire d'aucune des parcelles au titre desquelles les titres de recettes litigieux ont été émis, mais qu'elle n'en est que l'exploitante. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que l'EARL se serait engagée à payer les redevances syndicales à la place des propriétaires des parcelles, membres de l'association foncière de remembrement. Dès lors, c'est à tort que l'association foncière de Normée a réclamé à l'EARL du Moulin Brûlé le paiement des redevances syndicales en litige.

9. Il résulte de tout ce qui précède que l'association foncière de Normée n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les titres de perception contestés.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EARL du Moulin Brûlé qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'association foncière de Normée demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'association foncière de Normée une somme de 1 500 euros à verser à l'EARL du Moulin Brûlé au titre de ces mêmes dispositions.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association foncière de Normée est rejetée.

Article 2 : L'association foncière de Normée versera à l'EARL du Moulin Brûlé une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association foncière de Normée et à l'EARL du Moulin Brûlé.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 17NC01075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01075
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

11-02-02 Associations syndicales. Questions propres aux différentes catégories d'associations syndicales. Associations syndicales de remembrement.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEFANSKI
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-03-29;17nc01075 ?
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