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08/03/2018 | FRANCE | N°16NC01494

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 mars 2018, 16NC01494


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...et le préfet de la Haute-Saône ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 novembre 2013 par lequel le maire d'Oiselay-et-Grachaux a refusé un permis de construire à M. D...et, d'autre part, l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 par lequel le maire a, en son article 1er, retiré l'arrêté précédent et, en son article 2, renouvelé son refus de permis de construire.

Par un jugement n° 1400854-1401248-1401935-1401936 du 12 mai 2016, le t

ribunal administratif a donné acte du désistement de M. D...de ses conclusions dirigé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...et le préfet de la Haute-Saône ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 novembre 2013 par lequel le maire d'Oiselay-et-Grachaux a refusé un permis de construire à M. D...et, d'autre part, l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 par lequel le maire a, en son article 1er, retiré l'arrêté précédent et, en son article 2, renouvelé son refus de permis de construire.

Par un jugement n° 1400854-1401248-1401935-1401936 du 12 mai 2016, le tribunal administratif a donné acte du désistement de M. D...de ses conclusions dirigées contre l'article 1er de l'arrêté du 18 octobre 2014, déclaré qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les demandes dirigées contre le refus de permis de construire du 20 novembre 2013, a annulé le refus de permis de construire du 18 octobre 2014 et a enjoint à la commune de réexaminer la demande de permis de construire de M. D...en tenant compte de son jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 juillet 2016, la commune d'Oiselay-et-Grachaux, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de M. D...et du préfet de la Haute-Saône ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de M. D...une somme de 1 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le tribunal administratif a commis une erreur d'appréciation sur la violation de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors que l'exploitation porcine de M. D...comporte un accroissement de 25 % d'animaux, que des habitations se situent à moins de 150 mètres de l'installation qui produit des nuisances sonores et olfactives ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme n'était pas méconnu compte tenu des distances entre les bâtiments de l'exploitation de M.D....

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2016, le préfet de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme n'est pas méconnu et la commune ne développe aucun élément nouveau de nature à justifier son refus de permis de construire ;

- l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme n'est pas méconnu, dès lors que celui-ci concerne les distances entre les bâtiments et non toutes les constructions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2016, M. F...D..., représenté par MeC..., conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de la commune d'Oiselay-et-Grachaux une somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme n'est pas méconnu ;

- l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme n'est pas méconnu.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., pour M.D..., ainsi que celles de M. B..., pour la préfecture de la Haute-Saône.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., éleveur de porcs dans deux communes, a décidé de regrouper l'ensemble de ses bêtes dans son exploitation d'Oiselay-et-Grachaux et a obtenu une autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement par arrêté du préfet de la Haute-Saône du 7 novembre 2013, après avis favorables de l'ensemble des personnes publiques consultées à l'exception de la commune d'Oiselay-et-Grachaux.

2. Afin d'adapter son exploitation, M. D...a déposé le 18 juillet 2013, une demande de permis de construire à laquelle le maire d'Oiselay-et-Grachaux a opposé un refus le 20 novembre 2013. Par arrêté du 18 octobre 2014, le maire a retiré ce refus et a, de nouveau, rejeté la demande de permis de construire, en se fondant cette fois sur la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et de l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme. Par le jugement attaqué du 12 mai 2016, le tribunal administratif de Besançon, saisi par M. D...et par déférés préfectoraux a notamment jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 20 novembre 2013 et a annulé l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 portant refus de permis de construire. La commune d'Oiselay-et-Grachaux interjette appel de ce jugement.

3. Si la commune d'Oiselay-et-Grachaux demande l'annulation totale du jugement, elle ne développe de moyens que contre l'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 et doit être regardée comme ne contestant le jugement qu'en tant qu'il prononce cette annulation.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. La commune d'Oiselay-et-Grachaux fait valoir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il mentionne que "du fait de leurs caractéristiques et de leurs dimensions, ni le digesteur ni la fosse à lisier ne peuvent être regardés comme des bâtiments au sens de l'article A 8 du plan local d'urbanisme". Toutefois par ces considérations, alors que les caractéristiques et dimensions des ouvrages figuraient dans les pièces du dossier et en effectuant une comparaison avec le "local groupe cogénération", en indiquant que celui-ci présentait, "au vu des plans produits" les caractéristiques d'un bâtiment, les premiers juges ont clairement expliqué leur solution. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement ne peut être accueilli.

Sur la légalité de l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 :

5. D'une part, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

6. La commune fait valoir, en premier lieu, que le projet litigieux, qui conduit à une augmentation de 25 % de la capacité d'accueil de l'exploitation située à Oiselay-et-Grachaux par l'ajout d'environ 450 bêtes, entraînera une aggravation des nuisances olfactives et sonores pour les personnes résidant aux alentours.

7. En deuxième lieu, la circonstance, d'ailleurs non établie, tiré de ce que le bâtiment de quarantaine serait situé à 110 mètres d'une maison, ne peut être utilement invoqué dès lors que la demande de permis de construire ne porte pas sur ce bâtiment.

8. La commune fait également valoir, en troisième lieu, que le bâtiment d'engraissement, dit bâtiment D, est situé à 150 et 170 mètres d'habitations et qu'il contribuera, avec la construction d'un hangar de stockage de 250 m², d'un bâtiment de cogénération et d'une fosse à lisier de 22 mètres de diamètre, à aggraver les nuisances qui résulteront de l'extension de l'installation.

9. Toutefois, la commune n'établit pas et il ne ressort d'ailleurs d'aucune des pièces du dossier que le hangar de stockage de matériel, qui fait l'objet d'une demande de régularisation et d'extension, sera de nature à produire des nuisances sonores et olfactives.

10. Il en est de même du bâtiment dit "local groupe cogénération" à régulariser qui produit de l'électricité à partir du biogaz issu du lisier, qui ne générera pas d'odeurs et dont le bruit de fonctionnement se limitera, comme l'a jugé le tribunal administratif, à la ventilation et ne sera perceptible qu'à une trentaine de mètres.

11. Si le bâtiment d'engraissement D est destiné à accueillir la majorité des porcs de l'exploitation, dont ceux provenant de l'exploitation située dans l'autre commune, la demande de permis de construire en cause ne porte que sur la suppression de quelques parties de murs pour les aligner sur les façades des autres bâtiments, le remplacement du toit en tuiles et des charpentes de bois par un toit en fibrociment et la modification de quelques ouvertures. La commune n'apporte aucun élément de nature à démontrer que ces travaux, qui coïncident avec un changement de l'aménagement intérieur afin d'accueillir les nouveaux animaux, auront pour effet, alors que leur ampleur est limitée, d'accroître les nuisances de l'élevage pour le voisinage. Si la commune fait également valoir qu'il n'est pas démontré que ces travaux diminueront les nuisances et que la tour de traitement de l'air située entre les bâtiments d'engraissement D et C suffira à compenser l'augmentation des nuisances dues à l'arrivée de 450 porcs supplémentaires, elle n'apporte aucun élément démontrant que les installations précédentes causaient des nuisances aux habitants de la commune, ni que les ouvrages soumis à permis de construire, figurant dans la demande de permis en litige, auront pour effet d'accroître les nuisances olfactives ou sonores.

12. Il ressort des pièces du dossier que la nouvelle fosse à lisier figurant dans la demande de permis de construire en litige, recueillera du lisier débarrassé de ses éléments gazeux odorants qui seront utilisés pour la production d'énergie et qu'elle est destinée à constituer, en application de la législation applicable, des réserves de produits d'épandage inodores. De plus, la fosse sera couverte par une bâche. La circonstance qu'il ne serait pas démontré que la fosse serait étanche et que sa couverture suffirait à supprimer les odeurs, n'est pas établie.

13. En outre, il ressort notamment de la demande d'autorisation au titre des installations classées que l'ensemble de l'exploitation est située au sud-est de la commune alors que les vents dominants sont des vents de sud-ouest et nord-est.

14. Il ressort ainsi de l'ensemble de ces éléments, que le maire d'Oiselay-et-Grachaux s'est illégalement fondé sur la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour opposer un refus à la demande de permis de construire présentée par M. D....

15. D'autre part, aux termes de l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme : " A moins que les bâtiments soient contigus, la distance les séparant doit être telle que les conditions de passage et de fonctionnement du matériel de lutte contre l'incendie soient satisfaites. Cette distance ne peut être inférieure à 4 mètres ".

16. La commune appelante fait d'abord valoir que la distance entre la fosse à lisier à créer et le digesteur existant est inférieure à 4 mètres. Toutefois, ces deux ouvrages, qui sont des bassins circulaires implantés dans le sol, dépassant respectivement de 2,2 mètres et 1,50 mètres du sol, et qui sont recouverts chacun par une bâche, ne constituent pas des constructions couvertes et closes destinées à servir d'abri ou à isoler et ne peuvent être assimilés à des bâtiments au sens de l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme qui a pour objet de permettre le passage des engins de lutte contre l'incendie entre deux bâtiments non contigus. Dans ces conditions, le moyen est inopérant.

17. De même, la commune ne peut utilement faire valoir que la distance entre la fosse à lisier et le bâtiment de stockage est seulement de 3,90 mètres, dès lors que l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme ne s'applique qu'aux distances entre deux bâtiments et que la fosse à lisier n'entre pas dans cette catégorie.

18. Enfin, il en est de même de la distance invoquée entre le "local groupe cogénération" qui constitue un bâtiment, comportant murs, ouvertures et toit, et le digesteur, ce dernier n'étant pas un bâtiment au sens de l'article A 8. En conséquence, les moyens tirés par la commune de la méconnaissance de l'article A 8 sont inopérants et ne peuvent être accueillis.

19. Ainsi, le maire d'Oiselay-et-Grachaux s'est également fondé à tort sur la méconnaissance de l'article A 8 du règlement du plan local d'urbanisme pour opposer un refus à la demande de M.D....

20. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Oiselay-et-Grachaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'article 2 de l'arrêté du 18 octobre 2014 du maire d'Oiselay-et-Grachaux.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune d'Oiselay-et-Grachaux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la commune d'Oiselay-et-Grachaux la somme de 3 000 euros que demande M. D...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Oiselay-et-Grachaux est rejetée.

Article 2 : La commune d'Oiselay-et-Grachaux versera à M. D...une somme de 3 000 (trois mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Oiselay-et-Grachaux, à M. F...D...et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Saône.

2

N° 16NC01494


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01494
Date de la décision : 08/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. Réglementation sanitaire départementale.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : AARPI THEMIS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-03-08;16nc01494 ?
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