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20/07/2017 | FRANCE | N°16NC02035

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 20 juillet 2017, 16NC02035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public Voies Navigables de France a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner M. B...au paiement d'une amende de 5 000 euros au titre de l'action publique pour travaux de défrichage effectués sans autorisation sur les berges de la Moselle et au remboursement des frais de remise en état et de reconditionnement des lieux au titre de l'action domaniale.

Par un jugement n° 1502063 du 11 juillet 2016, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a condamné M. B..

.à payer une amende de 1 000 euros au titre de l'action publique et l'a condam...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public Voies Navigables de France a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner M. B...au paiement d'une amende de 5 000 euros au titre de l'action publique pour travaux de défrichage effectués sans autorisation sur les berges de la Moselle et au remboursement des frais de remise en état et de reconditionnement des lieux au titre de l'action domaniale.

Par un jugement n° 1502063 du 11 juillet 2016, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a condamné M. B...à payer une amende de 1 000 euros au titre de l'action publique et l'a condamné au versement à Voies Navigables de France d'une indemnité de 9 000 euros au titre de l'action domaniale.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 septembre 2016 Voies Navigables de France, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il a statué sur l'action domaniale et a limité le montant de la somme à verser à 9 000 euros ;

2°) de condamner M. C...B...à lui verser une somme de 37 998 euros en réparation des dommages portés au domaine public fluvial.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le devis exposant les travaux nécessaires portait sur une surface supérieure à celle sur laquelle M. B...avait exécuté des travaux de défrichement ;

- le coût de la surveillance de la zone doit être mis à la charge de M. B...dès lors que les travaux qu'il a réalisés imposent une surveillance accrue ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que M. B... n'était pas responsable de la présence de plantes invasives et qu'il devait supporter les coûts d'arrachage de ces plantes ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que M. B...n'avait coupé que quelques arbres et a limité l'indemnisation due au coût de plantation de rejets de saules ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, il ressort des pièces jointes que M. B... a effectué des travaux de terrassement et de d'installation d'une rampe d'accès ;

- il est démontré que M. B...a fait procéder au comblement du lit mineur de la Moselle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2017, M. C...B..., représenté par Me A...conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de Voies Navigables de France une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est fondé à contester la qualification de ses travaux par Voies Navigables de France ; il n'a effectué que des travaux de faible ampleur qui ont consisté à enlever des arbres morts qui se trouvaient sur sa propriété ;

- il n'a enlevé que douze arbres en raison des dangers qu'ils présentaient et il est inexact de soutenir que la renouée du Japon s'est développée ;

- il n'a procédé qu'à un déboisement et non à un défrichement, de plus sans détruire l'état boisé du terrain puisqu'il a replanté des arbres immédiatement ;

- c'est à juste titre que le tribunal administratif a retenu l'absence d'entretien et de surveillance de la zone, ce qui a conduit M. B...à intervenir utilement.

Un mémoire présenté pour Voies Navigables de France a été produit le 20 juin 2017 et n'a pas été communiqué.

Un mémoire présenté pour Voies Navigables de France parvenu au greffe de la cour le 21 juin 2017 après la clôture d'instruction, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour M.B....

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 février 2014, Voies Navigables de France a transmis au tribunal administratif de Nancy un dossier de contravention de grande voirie établi à l'encontre de M. B...pour atteinte au domaine public fluvial par la réalisation de travaux sur l'ancien lit de la Moselle, sur une surface d'environ 1 500 m².

2. Voies Navigables de France interjette appel du jugement du 11 juillet 2016 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a condamné M. B...à payer une amende de 1 000 euros et à verser une indemnité de 9 000 euros à Voies Navigables de France au titre de l'action domaniale.

3. Si Voies Navigables de France conclut à l'annulation du jugement dans son entier, il ne présente de moyens que contre la condamnation à indemnité dont il demande qu'elle soit portée à 37 995 euros TTC, ainsi qu'il l'avait sollicité en première instance. Dans ces conditions, les conclusions en tant qu'elles sont dirigées contre l'article 1er du jugement relatif à l'action publique ne peuvent qu'être rejetées.

4. Aux termes de l'article L. 2132-5 du code général de la propriété des personnes publiques : " Tout travail exécuté (...) sur le domaine public fluvial sans l'autorisation du propriétaire du domaine mentionnée à l'article L. 2124-8 est puni d'une amende (...) Le tribunal fixe, s'il y a lieu, les mesures à prendre pour faire cesser l'infraction (...) ".

5. Aux termes de l'article L. 2132-9 : " Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial (...) ".

6. Aux termes de l'article L. 2132-10 : " Nul ne peut procéder à tout dépôt ni se livrer à des dégradations sur le domaine public fluvial, les chemins de halage et francs-bords, fossés et ouvrages d'art, sur les arbres qui les bordent, ainsi que sur les matériaux destinés à leur entretien ".

7. Il ressort du procès-verbal dressé le 16 avril 2015 par un agent assermenté de Voies Navigables de France que M. B...a réalisé sans autorisation des travaux au niveau de l'ancien lit de la Moselle sur une surface d'environ 1 500 m² appartenant au domaine public fluvial. Il est constant que de tels travaux sont de nature à constituer une contravention de grande voirie au sens des articles cités ci-dessus du code général de la propriété des personnes publiques.

8. Voies Navigables de France a demandé au tribunal administratif et demande à nouveau à la cour, afin de réparer les dommages causés au domaine public, la condamnation de M. B...à lui payer une somme de 37 998 euros correspondant à un devis établi par une entreprise spécialisée.

9. L'établissement public requérant soutient en premier lieu que c'est à tort que le tribunal administratif n'a condamné M. B...à lui verser qu'une somme de 8 000 euros au titre du traitement de plantes invasives et non la somme de 23 950 euros mentionnée à ce titre dans le devis produit devant les premiers juges.

10. Cependant, il ressort du procès-verbal d'infraction du 16 avril 2015, que les travaux effectués par M.B... sur l'ancien lit de la Moselle appartenant au domaine public fluvial ont porté sur une surface d'environ 1 500 m². Aucun autre élément du dossier, notamment des photographies jointes au procès-verbal, montrant des zones sans végétation, ne démontrent que ces mentions sont erronées.

11. Le devis du 19 novembre 2015 sur lequel s'appuie Voies Navigables de France mentionne le défrichement par M. B...de 3 500 m² dont 2 300 m² de plantes invasives. De même, l'ensemble des travaux prévus pour détruire et surveiller les plantes invasives portent sur le traitement d'une zone de 2 300 m².

12. Si l'établissement public fait valoir que l'arrachage de végétation sur une surface de 1 500 m² conduit, compte tenu des caractéristiques particulières de la zone atteinte, à un développement de plantes invasives sur une surface sensiblement supérieure, qui nécessite de les arracher sur 2 300 m², il ne démontre pas la réalité de ses allégations en se bornant à faire état de considérations générales sur la capacité de développement de ce type de plantes dans ce genre de zone. De plus, de telles plantes existaient dans cette zone avant les travaux effectués par M. B...et il ne résulte pas de l'instruction qu'elles se seraient particulièrement développées ensuite au point, notamment, d'avoir envahi 2 300 m² dès novembre 2015, date du devis, alors que les travaux ont été effectués au mois de février précédent. De même, si Voies Navigables de France fait valoir en appel qu'il est nécessaire de surveiller les lieux pendant plusieurs années, soit une surface de 1 500 m² la première année, puis 800 m² les deux années suivantes, ces affirmations non démontrées ne correspondent pas aux mentions du devis qui, pour l'arrachage initial des plantes, comme pour la surveillance durant les deux années suivantes, sont situées sous un titre mentionnant la nécessité de traiter au titre de chaque opération une surface de 2 300 m².

13. C'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif a réduit la somme demandée par Voies Navigables de France figurant dans le devis en proportion de la destruction de végétation sur une surface de 1 500 m² à laquelle avait procédé M.B....

14. En deuxième lieu, Voies Navigables de France soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a réduit la somme réclamée au titre de la nécessité de planter des saules à 1 000 euros au lieu des 2 400 euros demandés, alors que les photographies montrent que M. B... ne s'est pas borné à supprimer quelques arbres comme il le soutient et que le devis justifie le montant demandé.

15. Il résulte des documents joints au dossier et notamment des photographies qui montrent une zone totalement privée de toute végétation entre la rivière et la propriété de M. B... que, contrairement à ce qu'il soutient, M. B... ne s'est pas borné à enlever quelques arbres morts qui risquaient de tomber sur sa propriété et créaient un danger pour les promeneurs qui longeaient la Moselle, malgré les témoignages en faveur de l'intéressé de voisins de M. B...et de l'entrepreneur qui avait réalisé les travaux. Cependant, le devis de Voies Navigables de France porte sur la plantation de 2 400 rejets de saules sous un titre faisant état du défrichage par M. B... d'une surface de 3 500 m². Comme il est dit ci-dessus, il ne résulte pas de l'instruction que M. B...aurait défriché plus de 1 500 m². Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif a réduit l'indemnisation demandée au titre de la plantation d'arbres en proportion de la surface qui avait fait l'objet des travaux effectués par M.B....

16. En troisième lieu, Voies Navigables de France soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande de condamnation de M. B...à lui verser 3 465 euros pour remédier aux travaux de terrassement et de création d'une rampe d'accès sur le lit de la Moselle. Il sollicite également la condamnation de M. B...à lui verser une somme de 1 850 euros au titre de la réparation du comblement du lit mineur de la Moselle.

17. Cependant, si le procès-verbal de constatation d'infraction, d'ailleurs assez succinct, mentionne sans autre précision la création d'une rampe d'accès, rien n'indique que cette rampe aurait été réalisée lors des travaux effectués par M. B...qui ont seulement porté sur le défrichage des terres situées entre la rivière et sa propriété, alors que des témoignages font état de la présence, avant les travaux en litige, d'une pente douce à cet endroit de la rivière facilitant les activités nautiques. Si le procès-verbal mentionne également un "travail avec engin sur le lit de la rivière", il résulte de l'instruction qu'un engin équipé de chenilles a été utilisé pour retirer du terrain les arbres supprimés par M.B.... Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la création d'une rampe d'accès ou le remblaiement d'une digue relevés dans le procès-verbal soient dus aux travaux qui ont donné lieu à constatation d'une contravention de grande voirie en février 2015. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif a refusé de condamner M. B... à verser à Voies Navigables de France les sommes de 3 465 euros et de 1 850 euros qu'il réclamait à ce titre.

18. Il résulte de ce qui précède que Voies Navigables de France n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Voies Navigables de France une somme de 1 500 euros à verser à M. B...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de Voies Navigables de France est rejetée.

Article 2 : Voies Navigables de France versera une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Voies Navigables de France et à M. C...B....

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 16NC02035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC02035
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GAUCHER DIEUDONNE NIANGO SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-20;16nc02035 ?
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