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08/06/2017 | FRANCE | N°16NC02203

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 juin 2017, 16NC02203


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 31 décembre 2015 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600208 du 26 avril 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 septembre 2016 sous le numéro 16NC02203, M. C..., r

eprésenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 31 décembre 2015 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600208 du 26 avril 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 septembre 2016 sous le numéro 16NC02203, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer une carte de séjour portant la mention salarié dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me B...d'une somme de 2 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le jugement attaqué doit être annulé dès lors que pour répondre au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, il s'est fondé sur un élément qui n'a pas été visé, ni soumis au débat contradictoire, d'autant plus qu'il s'agit d'un moyen d'ordre public ;

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence, la régularité de la délégation de signature n'ayant pas été démontrée devant le tribunal administratif ;

- il est insuffisamment motivé en droit et en fait en ce qu'il se borne à reproduire une motivation automatique et inexacte et qu'il ne comporte pas en annexe l'avis de la Direccte sur lequel il se fonde, ce qui ne permet pas à l'intéressé de connaître les motifs de refus ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de l'existence d'une promesse d'embauche et de l'ancienneté de son séjour en France ;

- il est entaché d'erreur de droit en ce qu'il ne procède pas d'un examen complet de la situation professionnelle et personnelle de M. C...;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu des risques pour toute personne de se rendre au Burkina Faso.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2007, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Le requérant a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 août 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Burkina Faso relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire (ensemble six annexes), signé à Ouagadougou le 10 janvier 2009 et publié par le décret n° 2011-568 du 24 mai 2011 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Stefanski, président, à été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...C..., ressortissant du Burkina Faso, est entré régulièrement en France le 31 octobre 2010 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 13 novembre 2010 et s'est ensuite maintenu irrégulièrement sur le territoire national. Le 18 novembre 2015, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il interjette appel du jugement du 26 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 31 décembre 2015 par lequel le préfet de la Marne lui a opposé un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La seule circonstance que le tribunal administratif a répondu au moyen tiré par M. C... de l'incompétence du signataire de l'acte, en mentionnant l'arrêté préfectoral donnant délégation de signature au secrétaire général de la préfecture, sans informer au préalable le demandeur, en l'absence de défense de l'administration, de l'existence de cet arrêté, ne constitue pas une méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que cette délégation résultait d'un acte réglementaire publié au recueil des actes de la préfecture et, qu'au surplus, le numéro de l'arrêté accordant délégation, ses dates d'édiction et de publication figuraient dans les visas de l'arrêté contesté. En outre et en tout état de cause, contrairement à ce que soutient le requérant, ce moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte est bien mentionné dans les visas du jugement attaqué.

Sur le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, le secrétaire général de la préfecture de la Marne disposait d'une délégation de signature régulière pour édicter l'arrêté contesté. La circonstance que l'administration n'ait pas communiqué la délégation de signature au tribunal administratif n'était pas de nature à interdire aux premiers juges, contrairement à ce que soutient le requérant, de juger que l'auteur de l'acte était compétent, ni de rendre cette délégation sans effet ou irrégulière. Si M.C..., fait valoir que cette délégation ne remplissait pas les conditions de fond et de publicité prévues par les textes, il n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations.

4. La circonstance que l'auteur de l'arrêté contesté a mentionné, après avoir analysé l'ensemble des éléments de droit et de fait motivant sa décision, qu'il se prononçait sur proposition du secrétaire général de la préfecture, n'est pas de nature à démontrer que le signataire n'a pas exercé personnellement la compétence qu'il détenait.

5. En deuxième lieu, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges de façon très détaillée, la décision contestée est suffisamment motivée. Dans ces conditions, il a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté ne fait état que de considérations stéréotypées en adoptant les motifs du tribunal administratif.

6. M. C...soutient que l'avis de la Direccte mentionné par le préfet, n'étant pas joint à l'arrêté contesté, il n'a pas été en mesure de connaître les motifs du refus. Toutefois, il est constant que l'arrêté contesté mentionne le contenu de cet avis et que le préfet n'était tenu par aucune disposition législative ou réglementaire de le joindre à son arrêté.

7. En troisième lieu, M. C...qui a présenté une demande de titre de séjour à titre de régularisation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait toutefois valoir qu'il remplissait les conditions des stipulations de l'accord entre la France et le Burkina Faso relatives à la délivrance de titres de séjour en qualité de salarié. Toutefois, les stipulations du b) de l'article 2.2 du chapitre 1 de cet accord, qui d'ailleurs ne s'appliquent que pour certaines activités salariées que le requérant ne soutient pas vouloir exercer, ne prévoient la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié que pour les ressortissants burkinabés titulaires d'un contrat de travail visé par l'autorité compétente et n'excluent la prise en compte de la situation de l'emploi en France que pour les ressortissants résidant dans leur pays, à la date à laquelle est visé le contrat ou ceux justifiant d'une résidence habituelle en France à la date du 20 novembre 2007. M.C..., qui ne disposait que d'une promesse d'embauche et ne remplit pas ces conditions, ne peut pas se prévaloir de ces stipulations. Le requérant ne peut davantage invoquer les stipulations du c) de cet article relatives au nombre de titres de séjour pouvant être délivrés à des salariés, dès lors que ce c) ne s'applique qu'aux ressortissants remplissant les conditions du b).

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

9. M.C..., qui ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui n'a pas de valeur règlementaire, doit être regardé comme faisant état de la promesse d'embauche qu'il a joint à sa demande et de la durée de son séjour en France. Toutefois, par ces seuls éléments, alors qu'il n'était titulaire que d'une promesse d'embauche et ne soutenait pas avoir des liens en France et être dépourvu de liens dans son pays d'origine, il ne démontre l'existence d'aucune autre considération humanitaire ou d'un motif exceptionnel. Ainsi, le préfet a pu, sans erreur manifeste d'appréciation, estimer que la situation du requérant ne justifiait pas une admission exceptionnelle au séjour.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. M. C...soutient qu'il justifie de liens stables et réguliers en France où il réside depuis plus de cinq années consécutives et que le préfet a commis une erreur en estimant que la promesse d'embauche qu'il produisait était insuffisante. Cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'a résidé régulièrement sur le territoire français que durant trois mois, qu'il ne démontre aucune attache privée ou familiale en France et qu'il n'est pas contesté qu'il a encore des attaches familiales dans son pays d'origine, notamment sa mère. Ainsi, compte tenu des conditions et de la durée de son séjour en France, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles il a été pris. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

12. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

13. En faisant état de considérations générales et de la circonstance que le ministère des affaires étrangères déconseille de se rendre au Burkina Faso, M. C...ne fait état d'aucune considération de nature à établir qu'il pourrait être personnellement exposé à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 mentionné ci-dessus. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 16NC02203


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC02203
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GABON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-06-08;16nc02203 ?
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