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27/04/2017 | FRANCE | N°16NC00162

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 27 avril 2017, 16NC00162


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 mars 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a fixé le montant définitif de l'indemnisation de son cheptel de cervidés abattus sur ordre de l'administration et de condamner l'administration à lui verser les sommes qu'il estimait dues.

Par un jugement n° 1401206 du 1er décembre 2015 le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 janvi

er 2016, M.A..., représenté par la SCP Badré Hyonne Sens-Salis Denirs Roger, demande à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 mars 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a fixé le montant définitif de l'indemnisation de son cheptel de cervidés abattus sur ordre de l'administration et de condamner l'administration à lui verser les sommes qu'il estimait dues.

Par un jugement n° 1401206 du 1er décembre 2015 le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2016, M.A..., représenté par la SCP Badré Hyonne Sens-Salis Denirs Roger, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de :

- 282 785,45 euros au titre de l'indemnisation de la valeur marchande objective déduction faite de la valorisation bouchère ;

- 230 280 euros au titre du déficit momentané de production pour les années 2014 et 2015 ;

- 5 euros par animal réintroduit dans la limite de 528 cervidés d'une part au titre des frais sanitaires d'introduction et, d'autre part, au titre des frais d'approche et de transport ;

- 75 % du coût de désinfection effectuée par une entreprise habilitée.

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral contesté est insuffisamment motivé ;

- les avis de la direction générale de l'alimentation (DGAL) ne lui ont pas été communiqués ;

- le nombre d'animaux abattus est inexact ;

- la valeur marchande objective des animaux est erronée ;

- les frais de renouvellement du cheptel et le déficit momentané de production sont insuffisants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 août 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- son arrêté est suffisamment motivé ;

- le montant de l'indemnité a été régulièrement fixé après analyse exhaustive et comparative et conformément aux dispositions textuelles.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du 30 mars 2001 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., éleveur de bovins et de cervidés, a constaté en septembre 2013 qu'une biche était malade. Les analyses effectuées par les services vétérinaires alertés par l'intéressé, ont révélé la présence de tuberculose animale dans les deux cheptels.

2. Par arrêté du 19 septembre 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a prescrit l'abattage de la totalité du troupeau de cervidés avant le 15 janvier 2014.

3. Par arrêté du 4 mars 2014 pris après avis du directeur général de l'alimentation, le préfet de Meurthe-et-Moselle a fixé à 197 545,99 euros l'indemnisation de la valeur marchande objective des animaux correspondant à une valeur marchande objective de 416 845 euros dont était déduite la valorisation bouchère des animaux abattus arrêtée à 230 027,55 euros selon les justificatifs fournis par l'éleveur et à 26 400 euros l'indemnisation des frais directement liés au renouvellement du cheptel.

4. M. A...interjette appel du jugement du 1er décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'augmentation de l'indemnité ainsi fixée par le préfet.

Sur les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté préfectoral contesté :

5. La décision du préfet a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de M. A...qui, en formulant les conclusions tendant à la modification des montants d'indemnisation fixés par l'arrêté préfectoral, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige. Si M. A...fait valoir que l'avis de la direction générale de l'alimentation ne lui a pas été communiqué, ce qui exigeait une motivation d'autant plus précise de l'arrêté préfectoral, il ne résulte, en tout état de cause, d'aucun texte que cet avis devait lui être adressé. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté préfectoral contesté est inopérant.

Sur le bien-fondé de l'arrêté préfectoral contesté :

6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 221-2 du code rural et de la pêche maritime : " Des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'administration, ainsi que les conditions de la participation financière éventuelle de l'Etat aux autres frais obligatoirement entraînés par l'élimination des animaux (...) ".

7. Ces dispositions ont fait l'objet d'un arrêté interministériel d'application du 30 mars 2001.

I - Sur le nombre d'animaux abattus :

8. M. A...soutient que l'expert désigné dans le cadre de la procédure administrative, ainsi que la direction générale de l'alimentation ont retenu que 528 animaux avaient été abattus, alors que le préfet n'a indemnisé que la perte de 480 animaux et qu'il n'a pas apporté de démonstration du bien-fondé de ces chiffres devant le tribunal administratif.

9. Aux termes de l'article 6 bis de l'arrêté interministériel du 30 mars 2001 dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - L'indemnisation de la valeur marchande objective des animaux est versée à l'éleveur sur présentation des justificatifs de l'abattage de l'ensemble des animaux visés par la décision et, le cas échéant, de leur valorisation bouchère. Les animaux qui auraient péri postérieurement à l'expertise ne sont pas indemnisés (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que M. A...ne tenait pas de registre d'élevage, pourtant obligatoire et n'est pas en mesure de démontrer qu'il possédait réellement 528 animaux lorsque l'expert, qui n'a nécessairement pu procéder qu'à une estimation du cheptel, a visité son élevage. De même la direction générale de l'alimentation s'est fondée sur les chiffres mentionnés par l'expert pour émettre son avis du 9 janvier 2014 et ne les a pas vérifiés par une visite de l'élevage.

11. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt soutient que seuls ont donné lieu à indemnisation les animaux pour lesquels l'abattage avait été justifié. En appel, M. A...conteste cette allégation et soutient qu'il a justifié avoir fait procéder à l'abattage de 528 animaux. Toutefois, il ne l'établit pas et le ministre a produit des documents détaillés démontrant l'exactitude des chiffres retenus par l'administration.

II- Sur l'indemnisation due au titre de la valeur marchande objective :

12. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 30 mars 2001 pris pour l'application de cet article, dans sa rédaction alors en vigueur : " les animaux abattus (...) sont estimés aux frais de l'administration par deux experts sur la base de la valeur de remplacement des animaux (...) / La valeur de remplacement inclut la valeur marchande objective de chaque animal considéré et les frais directement liés au renouvellement du cheptel selon les modalités définies à l'annexe I du présent arrêté (...) / Lorsqu'une valorisation en boucherie des animaux abattus est possible, le montant de cette valorisation est déduit du montant de l'estimation réalisée conformément au présent article ".

13. Aux termes de l'article 1 bis du même arrêté : " La valeur marchande objective des animaux peut être déterminée en fonction de critères définis par instruction du ministre chargé de l'agriculture, prenant notamment en compte l'âge, le sexe, la vocation économique, la valeur génétique et les performances zootechniques des animaux ".

14. Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Le ou les rapports d'expertise sont instruits par le préfet, qui peut solliciter la production de tout élément complémentaire d'appréciation de la valeur commerciale des denrées et produits ou de la valeur de remplacement des animaux et l'avis du directeur général de l'alimentation, notamment dans les cas définis au quatrième alinéa de l'article 5. / Le préfet arrête ensuite le montant définitif de l'indemnisation et le notifie au propriétaire des animaux, des denrées ou des produits. / Pour les catégories d'animaux des espèces concernées, ce montant ne peut excéder les montants plafonnés définis en annexe II du présent arrêté ".

1) en ce qui concerne le mode de calcul de l'indemnité :

15. M. A...soutient que, contrairement à l'expert qui a calculé la valeur marchande objective par catégorie d'animaux, le préfet s'est borné à fixer une somme forfaitaire qui ne tient pas compte des critères propres aux différents animaux abattus.

16. Toutefois, il résulte de l'instruction et des écritures de l'administration, qui le démontre par la production d'un tableau retraçant le calcul de la valeur marchande objective, que le préfet de Meurthe-et-Moselle a évalué cette valeur marchande par catégories d'animaux, soit les faons de moins de 12 mois, les daguets et bichettes de 12 à 24 mois, les biches d'élevage de plus de 24 mois et les cerfs d'élevage de plus de 24 mois. Ainsi, le moyen manque en fait et doit être écarté.

2) en ce qui concerne la valeur marchande objective des daguets et bichettes, ainsi que des faons :

17. Pour ces deux catégories d'animaux, le préfet de Meurthe-et-Moselle s'est fondé sur la circonstance que M. A...vendait toute la viande de ses animaux préparée et conditionnée par une entreprise spécialisée et qu'il ajoutait les frais ainsi exposés à son prix de vente. Ainsi, le préfet a considéré que les montants des pertes de recettes retenus par l'expert, qui comportaient ces frais supplémentaires, ne correspondaient pas aux textes applicables qui ne prévoient l'indemnisation que du prix de la viande avant abattage et préparation. Le préfet a alors retiré des montants définis par l'expert, les frais d'abattage et de conditionnement, dont M. A...avait indiqué les montants en produisant devant l'administration des factures pour preuve.

18. M.A..., qui ne conteste pas le montant des frais d'abattage et de conditionnement retenu par l'administration, soutient que l'expert avait déjà déduit certains frais dans le cadre de son évaluation.

19. Cependant, il résulte de l'instruction que l'expert avait déduit les frais d'alimentation et vermifugation que l'éleveur n'aurait pas à exposer avant d'abattre ses bêtes, contrairement à ce qu'il aurait fait en l'absence de maladie. Cette déduction des frais n'a pas été contestée par l'administration qui a pris en compte les mêmes montants que ceux retenus par l'expert. Il ne résulte pas des autres pièces que l'expert aurait déduit les frais d'abattage et de conditionnement. Ainsi et dès lors que l'administration a retenu à bon droit la valeur marchande des animaux avant abattage et conditionnement, conformément aux textes, le moyen ne peut être accueilli.

II - Sur le montant de l'indemnité complémentaire pour déficit momentané de production :

20. M. A...soutient que le préfet de Meurthe-et-Moselle ne lui a accordé aucune indemnité au titre du déficit momentané de production alors qu'il a subi un déficit en 2014 et 2015. Il fait valoir que, compte tenu des dates auxquelles il a vendu les animaux pour la boucherie ou les a fait abattre, compte tenu de la date limite d'abattage du 15 janvier 2014 défini par l'arrêté préfectoral, il ne pouvait utiliser ses pâturages avant la fin de l'année 2013. A cet effet, il fait valoir que compte tenu du délai nécessaire après les mesures de désinfection pour s'assurer de la disparition de toute infection, il ne pouvait pas introduire avant la fin de l'année 2015 des biches dont la fragilité interdit le transport lorsqu'elles sont en gestation ou qu'elles viennent de mettre bas, ni des cerfs qui ne peuvent être transportés quand ils sont en période de "bois de velours". M. A...soutient qu'il n'a pu de ce fait recommencer la production avant la fin de l'année 2014 et qu'il a donc également connu des pertes de recettes en 2015, les faons, notamment n'étant pas vendus dans la première année.

21. Toutefois, il résulte de l'instruction que la date du 15 janvier 2014 fixée par l'arrêté préfectoral du 16 septembre 2013 était une date limite et que M. A...a choisi de n'abattre son élevage qu'à la fin de l'année 2013 pour vendre la viande saine à la période favorable que constitue la fin de l'année.

22. D'autre part, il est constant que l'indemnisation au titre des faons présents sur l'exploitation, qui auraient été vendus à l'état de daguets et bichettes dans l'année suivante, a été calculée en fonction de la valeur marchande objective, non de faons mais de daguets et bichettes et que, donc, la perte due au déficit momentané de production les concernant avait été intégralement prise en compte par l'administration au titre de la valeur marchande objective et n'avait pas à être davantage indemnisée.

23. Enfin, les annexes de l'arrêté ministériel relatives à l'indemnisation du déficit momentané de production, ne mentionnent pas les cheptels de cervidés et ne comportent donc pas de règles relatives à une telle indemnisation en ce qui les concerne. Toutefois, le préfet de Meurthe-et-Moselle a appliqué à M.A..., les dispositions les plus favorables de l'arrêté ministériel, qui concernent les bovins et qui prévoient la compensation des seuls frais relatifs aux animaux qui auraient normalement été abattus dans un délai d'un an. Dès lors qu'il avait tenu compte du déficit momentané de production des faons en fixant leur valeur marchande objective, le préfet n'avait pas d'autre indemnisation à attribuer à M.A..., notamment au titre des pertes d'exploitation de l'année 2015.

24. En conséquence, le moyen ne peut être accueilli.

25. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 16NC00162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00162
Date de la décision : 27/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture et forêts - Produits agricoles - Élevage et produits de l'élevage - Élevage.

Police - Polices spéciales - Police sanitaire (voir aussi : Santé publique).


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP BADRE HYONNE SENS-SALIS SANIAL DENIS ROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-04-27;16nc00162 ?
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