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19/01/2017 | FRANCE | N°16NC01059

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 janvier 2017, 16NC01059


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel la préfète de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 1600296 du 10 mai 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mé

moire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 23 septembre 2016, M. B...A..., représenté par MeC..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel la préfète de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 1600296 du 10 mai 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 23 septembre 2016, M. B...A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1600296 du 10 mai 2016 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Haute-Saône du 30 novembre 2015 ;

3°) d'ordonner à la préfète de la Haute-Saône : à titre principal et, en cas d'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire et de la mesure de reconduite portant fixation du pays de destination, de lui délivrer une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à défaut de son article L. 313-11, ou de l'article L. 313-14 et ce, dans un délai de 8 jours suivant la notification de la décision à intervenir ; à titre subsidiaire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 8 jours suivant la notification de la décision à intervenir, dans l'attente du réexamen de son droit au séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

En ce qui concerne le refus de séjour :

- la préfète a méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, d'une part, il suit avec sérieux une scolarité professionnelle, d'autre part son insertion dans la société française ne peut être remise en cause, enfin il est isolé en France et n'entretient plus de lien étroit avec sa famille restée dans son pays d'origine ;

- il n'a accompli aucune démarche frauduleuse ;

- la préfète a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que sa situation caractérise un motif exceptionnel ;

- la préfète a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa vie privée et familiale se trouve intégralement en France ;

- la préfète a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'il était mineur lorsqu'il a présenté sa demande de titre de séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît les articles L. 313-15, L. 313-14 et L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant ce délai à trente jours, ce qui est insuffisant compte tenu de sa situation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 et 29 septembre 2016, la préfète de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A...n'est fondé.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Rees, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A..., de nationalité pakistanaise, né le 5 juillet 1997, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 13 septembre 2013, à l'âge de 16 ans. Pris en charge dès le 20 septembre 2013 par le service de l'aide sociale à l'enfance de Paris, il a ensuite été confié à l'association d'Hygiène sociale de Franche-Comté et a entamé, en septembre 2014, une formation d'apprenti au centre éducatif Saint-Joseph à Frasnes-le-Château, en Haute-Saône.

2. A l'approche de sa majorité, il a sollicité, par l'intermédiaire de l'association d'Hygiène sociale, son admission au séjour au titre des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. Par un arrêté du 30 novembre 2015, la préfète de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

4. M. A...relève appel du jugement du 10 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté :

En ce qui concerne le refus de séjour :

5. En premier lieu, M. A...soutient que la préfète a méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, d'une part, il suit avec sérieux une scolarité professionnelle, d'autre part son insertion dans la société française ne peut être remise en cause, enfin il est isolé en France et n'entretient plus de lien étroit avec sa famille restée dans son pays d'origine. Il soutient également que la déclaration frauduleuse que lui reproche la préfète au sujet de son père, qui n'est pas mort mais avec lequel il dit n'avoir plus de contact, n'existe pas mais procède d'un malentendu imputable à la barrière du langage.

6. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française ".

7. Si, dans son arrêté, la préfète a expressément admis le caractère réel et sérieux de la formation suivie par M. A...et n'a pas remis en cause son intégration dans la société française, elle a, en revanche, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, considéré qu'il avait conservé des liens étroits avec sa famille au Pakistan et qu'en outre, il avait faussement déclaré aux diverses administrations ainsi qu'aux autorités judiciaires le décès de son père en 2012.

8. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du 8 juin 2015 de l'éducateur spécialisé du centre éducatif et professionnel Saint Joseph, transmis à la préfète à l'appui de la demande de titre de séjour, que " Hassan téléphone régulièrement à sa mère et montre de l'inquiétude au sujet de ses difficultés financières ". Ce témoignage n'est pas remis en cause par les affirmations de M. A...quant au caractère sporadique et inconsistant de ces contacts, alors que par ailleurs il explique avoir quitté son pays non pas en raison de sa rupture d'avec sa famille, mais en raison de la grande précarité financière qu'il y connaissait et de l'impossibilité d'y poursuivre sa scolarité. Il ressort également des pièces du dossier qu'il a pu obtenir, alors qu'il se trouvait sur le territoire français, la copie de la carte d'identité de son père, délivrée en avril 2014, alors même qu'il soutient n'avoir plus de contact avec lui. Dans ces conditions, M. A...ne peut être regardé comme n'ayant pas conservé de liens étroits avec sa famille restée au Pakistan.

9. D'autre part, à supposer que les premières déclarations de M. A...au sujet de la situation de son père aient pu être mal comprises au point de susciter une méprise laissant penser qu'il était mort en 2012, la préfète souligne et sans que l'intéressé ne fournisse d'explication à ce sujet, qu'il a ensuite, à plusieurs reprises, fourni à nouveau la même information et qu'en outre, le récit qu'il a fait de son parcours, indiquant que sa mère a dû prendre un travail pour subvenir aux besoins de sa famille suite à ce décès, n'est pas cohérent avec une simple erreur de traduction, fût-elle isolée.

10. Dans ces conditions, la préfète de la Haute-Saône en refusant d'user de la faculté de délivrer, à titre exceptionnel, un titre de séjour au requérant, n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de sa situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En deuxième lieu, M. A...soutient que la préfète a méconnu les dispositions l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que sa situation caractérise un motif exceptionnel. Cependant, la formation professionnelle suivie par l'intéressé, sa volonté d'intégration et la précarité alléguée de la situation qui serait la sienne en cas de retour dans son pays ne suffisent pas à caractériser un tel motif et compte tenu de ce qui vient d'être dit aux points 8 et 9, la préfète ne s'est pas livrée à une appréciation manifestement erronée de sa situation au regard de l'article L. 313-14.

12. En troisième lieu, M. A...soutient que l'autorité administrative a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa vie privée et familiale se trouve intégralement en France. Toutefois, M. A...ne se trouvait en France que depuis un peu plus de deux ans à la date de l'arrêté attaqué, est célibataire et sans enfant, ne fait valoir aucune attache privée ou familiale particulière en France et sa famille, avec laquelle il a conservé des liens, réside dans son pays d'origine. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision attaquée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts poursuivis par la préfète.

13. En quatrième lieu, M. A...soutient que la préfète a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Il ne peut toutefois pas utilement se prévaloir de ces stipulations dès lors qu'à la date de l'arrêté litigieux, il était majeur.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le refus de séjour n'est pas illégal. Par conséquent, l'exception tirée de son illégalité, invoquée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français qui l'assortit, ne peut qu'être écartée.

15. En deuxième lieu, la méconnaissance des articles L. 313-15 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne prévoient pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour aux étrangers qui en remplissent les conditions, ne peut être utilement invoquée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français.

16. En troisième lieu, pour les raisons indiquées au point 12 M. A... n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions équivalentes du 7° de l'article L. 313 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

17. En quatrième et dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 13, M. A...ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

18. M. A...soutient que la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant ce délai à trente jours, ce qu'il estime insuffisant compte tenu de sa situation. Il se borne toutefois à citer à cet égard les déclarations à la presse du secrétaire général de la préfecture, qui a indiqué le 19 mai 2016 qu'il était disposé à " adapter le calendrier " à sa situation. La seule invocation de la mesure ainsi envisagée, qui est de nature gracieuse, ne saurait suffire à remettre en cause le délai de départ initialement fixé. En l'absence de tout élément et même de toute précision de la part du requérant quant à la nécessité pour lui, à la date de l'arrêté litigieux, de bénéficier d'un délai de départ plus long, son moyen ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

19. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

20. En conclusion de tout ce qui précède, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Haute-Saône du 30 novembre 2015.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Les dispositions de cet article font obstacle à ce que les frais non compris dans les dépens, dont M. A...demande le remboursement, soient mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Haute-Saône.

2

N° 16NC01059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01059
Date de la décision : 19/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : FLORAND

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-01-19;16nc01059 ?
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