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24/11/2016 | FRANCE | N°15NC02497

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 24 novembre 2016, 15NC02497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 25 août 2014 par lequel le maire de Hayange a retiré l'arrêté du 8 avril 2014 lui donnant délégation de signature et de fonctions, ainsi que les points 22 et 23 de la délibération du conseil municipal de Hayange du 3 septembre 2014.

Par un jugement n° 1405116 et 1405222 du 18 novembre 2015 rectifié pour erreur matérielle par une ordonnance du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l

es points 22 et 23 de la délibération du conseil municipal de Hayange et a rejeté l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 25 août 2014 par lequel le maire de Hayange a retiré l'arrêté du 8 avril 2014 lui donnant délégation de signature et de fonctions, ainsi que les points 22 et 23 de la délibération du conseil municipal de Hayange du 3 septembre 2014.

Par un jugement n° 1405116 et 1405222 du 18 novembre 2015 rectifié pour erreur matérielle par une ordonnance du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les points 22 et 23 de la délibération du conseil municipal de Hayange et a rejeté les autres conclusions.

Procédure devant la cour :

I° - Par une requête et un mémoire enregistrés le 17 décembre 2015 et le 28 octobre 2016 sous le n° 15NC02497, MmeD..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1405116 et 1405222 du 18 novembre 2015 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 25 août 2014 du maire de Hayange ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la commune de Hayange de la rétablir dans ses fonctions de première adjointe ;

4°) de mettre à la charge de la commune une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a méconnu le principe du contradictoire en communiquant tardivement un mémoire et des pièces adverses ;

- la commune n'a pas démontré qu'elle avait inscrit l'arrêté retirant sa délégation au registre de la mairie conformément aux articles L. 2122-29 et R. 2122-7 alinéa 3 du code général des collectivités locales ;

- le tribunal administratif s'est fondé à tort sur des faits postérieurs à l'arrêté contesté ;

- le retrait de délégation n'est pas fondé sur des éléments le justifiant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2016, la commune de Hayange, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme D...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas méconnu le principe du contradictoire ;

- le moyen tiré du défaut d'inscription de l'arrêté au registre des actes administratifs est inopérant ;

- les faits antérieurs à la date de l'arrêté contesté justifiaient le retrait de délégation ;

- l'arrêté n'est pas fondé sur des faits inexacts matériellement et est justifié par les faits retenus.

II° - Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 janvier et 10 août 2016 sous le n° 16NC00063, la commune de Hayange, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1405116 et 1405222 du 18 novembre 2015 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a annulé le point 22 de la délibération du 3 septembre 2014 du conseil municipal de Hayange ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D...contre cette délibération devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de Mme D...une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation ;

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en n'appliquant pas la jurisprudence Danthony ;

- aucun des moyens présentés par Mme D...en première instance ne sont de nature à justifier l'annulation de la délibération contestée ; le moyen tiré de l'absence d'inscription au registre municipal est inopérant ; l'article L. 2121-21 du code général des collectivités locales n'a pas été méconnu ; la délibération n'est pas entachée d'illégalité externe.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er juin et le 28 octobre 2016, Mme D..., représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Hayange une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'appel de la commune est insuffisamment motivé ;

- le jugement du tribunal administratif n'est pas irrégulier ;

- la jurisprudence Danthony n'est pas applicable à l'espèce ;

- la décision de retrait de sa délégation a été inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., pour la commune de Hayange.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 25 août 2014, le maire de Hayange a retiré à MmeD..., 1ère adjointe, la délégation de signature et de fonctions qui lui avait été donnée par arrêté du 8 avril précédent. Par délibération du 3 septembre 2014, le conseil municipal a décidé, dans un point 22, de se prononcer contre le maintien de Mme D...dans ses fonctions de 1ère adjointe et de refuser la suppression d'un poste d'adjoint et, dans un point 23, a procédé à l'élection d'un nouvel adjoint en tant que 9ème adjoint.

2. Par le jugement attaqué du 18 novembre 2015 et une ordonnance de rectification d'erreur matérielle du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de Mme D...dirigée contre l'arrêté du 25 août 2014 du maire et a annulé les points 22 et 23 de la délibération du conseil municipal du 3 septembre 2014.

3. Mme D...interjette appel du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du maire. La commune de Hayange, qui ne formule aucun moyen contre le jugement en tant qu'il a annulé le point 23 de la délibération du 3 septembre 2014, doit être regardée comme interjetant appel du jugement seulement en tant que le tribunal administratif a annulé le point 22 de cette délibération.

4. Les deux requêtes sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger des questions voisines. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'appel de Mme D...dirigé contre le jugement en tant qu'il est relatif à l'arrêté du maire de Hayange du 25 août 2014 :

Sur la régularité du jugement :

5. Il ressort des termes du jugement que, pour rejeter la demande de MmeD..., le tribunal administratif ne s'est pas appuyé sur le second mémoire en défense produit par la commune le 30 octobre 2015, avant la clôture d'instruction, et auquel étaient jointes des pièces nouvelles, mais uniquement sur les développements de la demande de Mme D...et les pièces qui y étaient jointes. Dans ces conditions, et à supposer même que l'avocat de la requérante n'ait reçu que le 4 novembre suivant, jour de l'audience, ce second mémoire en défense qui avait été communiqué le 30 octobre, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

6. D'une part, aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints (...) Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions ".

7. Il résulte de ces dispositions que le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu'il avait données à ses adjoints, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale. Dans ce cas, il est tenu de convoquer sans délai le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le maintien dans ses fonctions de l'adjoint auquel il a retiré ses délégations.

8. Il ressort des pièces du dossier produites par les deux parties, et notamment d'articles parus dans des journaux et sur internet, que les relations entre Mme D...et le maire de Hayange s'étaient nettement dégradées au cours de l'été 2014, ainsi que l'ambiance au sein de la mairie en raison de ces dissensions. Ainsi, Mme D...avait pris contact avec les dirigeants de leur parti politique pour se plaindre du maire, de ses méthodes et pour leur communiquer des documents le concernant et, quatre jours avant l'arrêté contesté, le mari de Mme D...avait vivement pris à parti le maire, devant des caméras de télévision, à propos de factures qui auraient été payés par les époux D...dans le cadre de la campagne électorale du maire. Si Mme D...produit des attestations pour démontrer que ses relations avec le maire étaient bonnes, ces attestations font surtout état de bonnes relations avec des membres du personnel de la mairie ou avec des tiers avec qui la requérante était en relation dans ses fonctions d'adjointe. Ainsi, en retirant à Mme D...la délégation qu'il lui avait accordée, en raison de ces dissensions, le maire de Hayange a pris une décision qui ne repose pas sur des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale.

9. D'autre part, le moyen tiré par Mme D...de ce que la publication de l'arrêté contesté serait irrégulière, qui est sans influence sur la légalité de cet arrêté, est inopérant.

Sur l'appel de la commune de Hayange contre le jugement en tant qu'il concerne le point 22 de la délibération du conseil municipal du 3 septembre 2014 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel :

Sur la régularité du jugement attaqué :

10. Contrairement à ce que soutient la commune, la circonstance que le tribunal administratif n'ait pas détaillé les raisons pour lesquelles il a jugé que l'utilisation du vote à scrutin secret avait été de nature à exercer une influence sur la décision prise par le conseil municipal, ne suffit pas à entacher le jugement d'insuffisance de motivation.

Sur la légalité de la délibération contestée :

11. Aux termes de l'article L. 2121-18 du code général des collectivités territoriales : " Les séances des conseils municipaux sont publiques (...). "

12. Aux termes de l'article L. 2121-21 du même code : " Le vote a lieu au scrutin public à la demande du quart des membres présents. (...) / Il est voté au scrutin secret : / 1° Soit lorsqu'un tiers des membres présents le réclame ; / 2° Soit lorsqu'il y a lieu de procéder à une nomination ou à une présentation (...) ".

13. Il est constant que lors de l'adoption du point 22 de la délibération contestée, le vote s'est déroulé au scrutin secret. La commune de Hayange ne conteste pas que, comme l'a jugé le tribunal administratif, le vote ne s'est pas régulièrement déroulé au scrutin secret. Une telle illégalité est de nature à entacher d'illégalité la délibération contestée.

14. S'agissant d'un vice de forme constituant une irrégularité substantielle (CE 21 juin 1993 n° 103 407), la circonstance que le mode de scrutin aurait été sans influence sur la décision dès lors que 22 conseillers municipaux sur 31 ont participé au vote et que la délibération aurait été adoptée avec 21 voix, ne peut être utilement invoquée. Ainsi, c'est à bon droit que le tribunal administratif a annulé le point 22 de la délibération du 3 septembre 2014.

15. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et que la commune de Hayange n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a annulé le point 22 de la délibération contestée.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de Mme D...une somme à verser à la commune de Hayange, ni de mettre à la charge de la commune une somme à verser à MmeD....

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme D...et de la commune de Hayange sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et à la commune de Hayange.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 15NC02497-16NC00063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02497
Date de la décision : 24/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-01-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Fonctionnement.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : MERLL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-11-24;15nc02497 ?
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