La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2016 | FRANCE | N°16NC00206

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 06 octobre 2016, 16NC00206


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2015 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1501009 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enre

gistrée le 4 février 2016, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2015 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1501009 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 février 2016, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501009 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

- elle est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de fait ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2016, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 7 janvier 2016, M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Rees, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant marocain, né le 14 mars 1975, est entré en France le 10 mars 2009 sous couvert d'un visa de long séjour en raison de son mariage avec une ressortissante française. En 2010, il s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dont le renouvellement a été refusé par le préfet du Lot le 2 septembre 2011 en raison de la rupture de la communauté de vie.

2. Un titre de séjour lui a été à nouveau délivré en 2012 en raison de la reprise de la vie commune. Le 17 avril 2013, le préfet du Haut-Rhin a refusé de renouveler ce titre de séjour en raison d'une nouvelle rupture de la communauté de vie. Il a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être éloigné. La légalité de cet arrêté a été confirmée par le tribunal administratif de Strasbourg dans un jugement du 5 août 2013 puis par la cour administrative d'appel de Nancy dans un arrêt du 24 avril 2014.

3. Le 30 janvier 2014, M. B... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de travailleur. Cette demande a fait l'objet d'un refus. Le 14 mai 2014, le requérant a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison des violences conjugales dont il aurait été victime sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 26 janvier 2015, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

4. M. B...relève appel du jugement du 20 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, M. B...reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance et tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Strasbourg.

6. En deuxième lieu, la décision contestée mentionne qu'elle est prise sur le fondement de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ainsi que du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait état des circonstances de faits propres à l'intéressé, notamment en retraçant son parcours en France depuis son entrée sur le territoire en 2009, et des raisons pour lesquels l'intéressé ne peut prétendre à un titre de séjour. Ainsi, la décision comporte de façon suffisamment précise les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et n'est, en conséquence, pas entachée d'insuffisance de motivation.

7. En troisième lieu, aux termes du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) ".

8. En se bornant à soutenir qu'il a travaillé de décembre 2009 à novembre 2011 en tant qu'opérateur à la régie de Bourtzwiller et qu'il perçoit depuis des indemnités d'assurance chômage tout en effectuant régulièrement des missions d'intérim, sans démontrer ni même alléguer qu'il était, à la date de l'arrêté attaqué, titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail, M. B...n'établit pas que, comme il le prétend, il remplissait les conditions fixées par les dispositions précitées.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ( ...) ".

10. Aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" (...) ".

11. M. B...fait valoir que le préfet a entaché sa décision d'une erreur de fait en considérant que les violences conjugales qu'il invoquait n'étaient pas suffisamment caractérisées, alors qu'étaient produits un certificat médical attestant de ces violences et des photographies. Le requérant doit être ainsi regardé comme invoquant les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces dispositions ne sont applicables qu'en cas de renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11. Or, M. B...n'était plus titulaire de cette carte lorsqu'il a présenté sa demande. Dès lors, il ne peut utilement faire valoir qu'il remplissait les conditions prévues par l'article L. 313-12. En tout état de cause, ni le certificat médical du 24 juin 2014, mentionnant la présence d'une cicatrice à la joue gauche, ni la déclaration de main courante en date du 15 janvier 2013, faisant état de l'abandon du domicile familial par l'épouse de M.B..., ne permettent d'établir la réalité des violences conjugales alléguées.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

13. M. B...fait valoir qu'il est inséré socialement dans la société française depuis son arrivée en France en 2009, qu'il a travaillé de façon stable pendant deux ans, puis en intérim, qu'il a accompli des efforts d'intégration en apprenant le français et qu'il a lié de nombreux liens d'amitiés en France. Toutefois, il est constant que la communauté de vie avec son épouse a cessé depuis le mois de juin 2012 et l'intéressé n'établit pas avoir d'autres attaches familiales ou privées en France ni être dépourvu de telles attaches dans son pays d'origine, où il a vécu 34 ans et où résident ses parents ainsi que trois de ses frères et soeurs. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Haut-Rhin aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :

14. En premier lieu, M. B...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse et de l'insuffisance de motivation de cette décision. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Strasbourg.

15. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté. Il en va de même des moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour et qui doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment.

Sur la décision fixant le pays de destination :

16. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2015. Ses conclusions à fin d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

''

''

''

''

2

N° 16NC000206


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00206
Date de la décision : 06/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEFANSKI
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : RAMOUL BENKHODJA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-10-06;16nc00206 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award