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05/08/2016 | FRANCE | N°15NC01036

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 août 2016, 15NC01036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 3 juin 2011 par laquelle le directeur du centre hospitalier régional universitaire de Nancy a accepté sa démission de l'internat de médecine ainsi que la décision du 19 novembre 2012 par laquelle le doyen de la faculté de médecine de Nancy a refusé de l'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale.

Par un jugement n° 1300468 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa dema

nde.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mai 2015, M.A..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 3 juin 2011 par laquelle le directeur du centre hospitalier régional universitaire de Nancy a accepté sa démission de l'internat de médecine ainsi que la décision du 19 novembre 2012 par laquelle le doyen de la faculté de médecine de Nancy a refusé de l'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale.

Par un jugement n° 1300468 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mai 2015, M.A..., représenté par Me Pereira, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 mars 2015 ;

2°) d'annuler les décisions des 3 juin 2011 et 19 novembre 2012 ;

3°) d'enjoindre à l'université de Lorraine de l'autoriser à s'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale.

Il soutient que :

- la décision du 3 juin 2011 acceptant sa démission est signée par une autorité incompétente ;

- eu égard à l'état mental dans lequel il était entre novembre 2010 et février 2012, il ne saurait être regardé comme ayant manifesté une volonté non équivoque de démissionner au sens de l'article 87 de la loi du 9 juillet 1986 et sa demande de démission est entachée d'un vice de consentement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2015, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2015, l'université de Lorraine, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A...une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'annulation de la décision du centre hospitalier régional universitaire de Nancy du 3 juin 2011 susceptible d'être prononcée par la cour emporte par voie de conséquence l'annulation de la décision du doyen de la faculté de médecine de Nancy du 19 novembre 2012.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 28 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Pereira, avocat de M.A....

1. Considérant que M.A..., qui a effectué ses études de médecine à l'université de Lorraine, a satisfait aux épreuves de classement nationales anonymes donnant accès au troisième cycle des études médicales au titre de l'année universitaire 2009-2010 ; qu'il a été nommé interne en médecine générale à compter du 2 novembre 2009 et rattaché administrativement, par décision du directeur général de l'agence régionale de santé de Lorraine, au centre hospitalier régional universitaire de Nancy où il a effectué son premier stage du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010 ; que, le 10 février 2011, le requérant a adressé au centre hospitalier universitaire une lettre de démission ; que, par une décision du 3 juin 2011, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy a accepté la démission de M. A...à compter du 2 mai 2011 ; que, le 19 novembre 2012, le doyen de la faculté de médecine de Nancy a refusé de l'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale ; que M. A...relève appel du jugement du 26 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision du centre hospitalier régional universitaire de Nancy du 3 juin 2011 :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 17 septembre 2010, M. A..., invoquant un état d'épuisement, a sollicité la suspension du stage qu'il effectuait depuis le 3 mai 2010 au centre hospitalier de Sarreguemines ; que le requérant, qui présentait des troubles mentaux importants, s'est présenté à deux reprises, le 26 décembre 2010 et le 8 juillet 2011, aux urgences psychiatriques du centre hospitalier de Jury-les-Metz, où il a été hospitalisé du 26 au 30 décembre 2010 puis du 8 au 13 juillet 2011 ; qu'il a omis de se réinscrire pour l'année universitaire 2010-2011 et a rencontré, en janvier 2011, le responsable du département de médecine générale et le responsable du troisième cycle de la faculté auxquels il a ensuite fait part, par un courriel du 25 janvier 2011, de son souhait de ne pas reprendre ses études médicales ; que, le 10 février 2011, il a adressé une lettre de démission au centre hospitalier régional universitaire de Nancy ;

3. Considérant, d'une part, qu'eu égard aux termes dans lesquels il a été rédigé, le courrier de M. A...du 17 septembre 2010 ne saurait être regardé comme une première demande de démission ;

4. Considérant, d'autre part, que, pour établir qu'il n'était pas en pleine possession de ses facultés intellectuelles au moment où il a remis sa démission, M. A... produit un certificat médical du praticien hospitalier, psychiatre, responsable du service de psychiatrie d'urgence et de liaison du centre hospitalier de Jury-les-Metz au sein duquel il a été hospitalisé en décembre 2010 puis en juillet 2011 ; que la circonstance que ce certificat est daté du 11 avril 2014 ne fait pas obstacle à ce qu'il soit pris en compte dès lors qu'il décrit la situation de M. A... durant la période au cours de laquelle il n'a pas été en mesure d'achever son stage au centre hospitalier de Sarreguemines, ne s'est pas réinscrit en faculté de médecine et a finalement présenté sa démission ; qu'eu égard à ses fonctions de chef de pôle, ce médecin psychiatre était en mesure de fournir des indications complètes sur l'état psychique de M. A..., même s'il n'a plus assuré le suivi personnel du requérant après décembre 2005 ; qu'il ressort de ce certificat médical que l'intéressé a présenté, de novembre 2010 à février 2012, une absence de discernement dans le cadre d'une pathologie mentale ; que le médecin psychiatre précise également que M. A...est sorti prématurément de l'hôpital le 30 décembre 2010 et a continué de présenter, après sa sortie, un état pathologique très préoccupant ; qu'au regard de ces éléments, M. A...doit être regardé comme n'ayant pas été en mesure d'apprécier la portée de ses actes lorsqu'il a manifesté, le 25 janvier 2011, son souhait d'abandonner ses études de médecine puis lorsqu'il a, le 10 février 2011, demandé sa démission ; que, par suite, le centre hospitalier régional universitaire de Nancy ne pouvait légalement accepter, par la décision du 3 juin 2011, la demande de démission de M. A..., entachée d'un vice de consentement ;

En ce qui concerne la décision du doyen de la faculté de médecine de Nancy du 19 novembre 2012 :

5. Considérant, qu'en raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé ; qu'il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale ;

6. Considérant qu'il incombe au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il est saisi de conclusions recevables dirigées contre de telles décisions consécutives, de prononcer leur annulation par voie de conséquence, le cas échéant en relevant d'office un tel moyen qui découle de l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à l'annulation du premier acte ;

7. Considérant que le doyen de la faculté de médecine de Nancy a refusé, le 19 novembre 2012, d'inscrire M. A...au diplôme d'études spécialisées de médecine générale au motif que l'intéressé avait démissionné de ses fonctions d'interne de médecine générale à compter du 2 mai 2011 ; que l'annulation de la décision du centre hospitalier régional universitaire de Nancy acceptant la démission de M. A...entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de la décision du 19 novembre 2012 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier régional universitaire de Nancy du 3 juin 2011 acceptant sa démission et de la décision du doyen de la faculté de médecine de Nancy du 19 novembre 2012 refusant de l'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

10. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 632-24 du code de l'éducation : " (...) Pour pouvoir s'inscrire au diplôme d'études spécialisées de leur choix correspondant à leur discipline d'affectation, les étudiants de troisième cycle des études de médecine doivent avoir validé au moins un semestre particulier de la spécialité dans un lieu de stage agréé ou auprès d'un praticien agréé-maître de stage des universités au titre de ce diplôme et pouvoir satisfaire dans les délais impartis aux exigences du programme du diplôme d'études spécialisées qu'ils choisissent. (...) " ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a validé le stage effectué dans le service des maladies respiratoires du centre hospitalier régional universitaire de Nancy au cours du semestre allant du 2 novembre 2009 au 2 mai 2010 ; qu'il est donc autorisé, en vertu des dispositions précitées, à s'inscrire au diplôme d'études spécialisées de médecine générale ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au doyen de la faculté de médecine de Nancy de procéder à cette inscription à la rentrée universitaire 2016-2017 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que l'université de Lorraine étant partie perdante, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1300468 du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Nancy est annulé, ainsi que la décision du directeur du centre hospitalier régional universitaire de Nancy du 3 juin 2011 et la décision du doyen de la faculté de médecine de Nancy du 19 novembre 2012.

Article 2 : Il est enjoint au doyen de la faculté de médecine de Nancy de procéder à l'inscription de M. A...au diplôme d'études spécialisées de médecine générale à la rentrée universitaire 2016-2017.

Article 3 : Les conclusions de l'université de Lorraine présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au centre hospitalier régional universitaire de Nancy et à l'université de Lorraine.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Rousselle, président de chambre,

- Mme Dhiver, président assesseur,

- M. Fuchs, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 août 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. DHIVERLe président,

Signé : P. ROUSSELLE

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 15NC01036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01036
Date de la décision : 05/08/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Démission.

Fonctionnaires et agents publics - Dispositions propres aux personnels hospitaliers - Personnel médical.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-08-05;15nc01036 ?
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