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30/06/2016 | FRANCE | N°15NC01397

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 juin 2016, 15NC01397


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le GAEC Clauss a, ainsi que plusieurs autres requérants, demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 12 février 2013 par laquelle le conseil municipal de Dahlenheim a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ainsi que le rejet de son recours administratif.

Par un jugement n° 1303481, 1303482, 1303483, 1303484 du 27 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoir

e enregistrés le 23 juin 2015 et le 25 mai 2016, la SCEA Clauss qui vient aux droits du GAE...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le GAEC Clauss a, ainsi que plusieurs autres requérants, demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 12 février 2013 par laquelle le conseil municipal de Dahlenheim a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ainsi que le rejet de son recours administratif.

Par un jugement n° 1303481, 1303482, 1303483, 1303484 du 27 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 juin 2015 et le 25 mai 2016, la SCEA Clauss qui vient aux droits du GAEC, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303481, 1303482, 1303483, 13003484 du 27 avril 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler la délibération du 12 février 2013 du conseil municipal de Dahlenheim et la décision implicite de rejet de son recours administratif ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Dahlenheim une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas statué sur une des branches du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement en zone 2AU de la parcelle cadastrée section 7 n° 34 ;

- l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme est méconnu en raison de l'absence des avis des personnes publiques associées dans le dossier d'enquête publique ;

- les articles L. 110 et L. 121-1 du code de l'urbanisme sont méconnus ;

- le classement de la parcelle cadastrée section 7 n° 34 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, ce moyen n'étant pas inopérant ;

- l'inscription de l'emplacement réservé n° 5 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2015, la commune de Dahlenheim conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de la SCEA Clauss le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a implicitement, mais nécessairement répondu à la seconde branche du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de classement de la parcelle cadastrée section 7 n° 34 ;

- l'article L. 123-10 n'est pas méconnu ;

- les articles L. 110 et L. 121-1 ne sont pas méconnus ;

- le classement de la parcelle section 7 n° 34 n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il en est de même de l'inscription de l'emplacement réservé n° 5.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités locales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour la SCEA Clauss et MeC..., pour la commune de Dahlenheim.

Considérant ce qui suit :

I - Sur la régularité du jugement attaqué :

1. La SCEA Clauss soutient que le tribunal administratif n'a pas statué sur une des branches du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise au regard de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme en classant la parcelle cadastrée section 7 n° 34 en zone 2AU. La SCEA fait valoir à cet égard que si le tribunal a répondu à la branche du moyen tenant à l'erreur manifeste d'appréciation du classement compte tenu d'une atteinte disproportionnée au droit de propriété du GAEC Clauss aux droits duquel vient la SCEA, il ne s'est pas prononcé sur la branche du moyen tenant à l'erreur manifeste d'appréciation à classer la parcelle dans une zone à urbaniser alors qu'y est implanté un bâtiment d'élevage générant des nuisances incompatibles avec la proximité d'une nouvelle zone d'habitation prévue par le plan.

2. Il ressort de la lecture du jugement que le tribunal administratif a jugé que l'erreur manifeste d'appréciation ne pouvait se déduire de la seule intention de la commune de densifier à moyen ou long terme le centre du bourg dans lequel est située la parcelle. Il a ainsi répondu à la seconde branche du moyen. Par ailleurs, les premiers juges ont également indiqué qu'il est de la nature même d'un document d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence, le zonage et les possibilités de construction. Dans ces conditions, le tribunal ne peut être regardé comme n'ayant pas répondu au moyen relatif au classement de la parcelle au regard des installations existantes.

3. En conséquence, le jugement n'est pas, contrairement à ce que soutient la SCEA Clauss, entaché d'une irrégularité à raison d'une omission à statuer.

II - Sur la légalité de la délibération du 12 février 2013 :

4. L'article L. 123-10 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération contestée, prévoit que " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement " et que " Le dossier soumis à l'enquête comprend, en annexe, les avis des personnes publiques consultées ".

5. La SCEA Clauss soutient que, contrairement aux exigences de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, les avis des personnes publiques associées n'étaient pas joints au dossier de l'enquête publique qui s'est déroulée du 5 novembre au 4 décembre 2012.

6. La méconnaissance des dispositions régissant la composition du dossier d'enquête publique n'est de nature à vicier la procédure et à entacher d'illégalité la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête, et par suite sur la décision de l'autorité administrative.

7. Il est constant que dans la partie de son rapport dans laquelle il mentionne la composition du dossier d'enquête et donne la liste des documents joints, le commissaire enquêteur ne fait pas mention des avis des personnes publiques associées. Même si le commissaire enquêteur examine en détail ces avis, il ne ressort d'aucune autre pièce du dossier que les avis étaient joints au dossier d'enquête publique.

8. Si la commune de Dahlenheim s'emploie à soutenir que les avis étaient joints, les attestations qu'elle produit en ce sens ont été rédigées pour deux d'entre elles, un an après l'enquête et pour les cinq autres, trois ans après l'enquête. L'une d'elle émane de l'urbaniste chargée de constituer le dossier, qui déclare que les avis des personnes publiques associées se trouvaient dans une pochette contenant divers autres documents. Cependant le commissaire enquêteur ne mentionne pas la présence de cette pochette et de ces documents dans son rapport. Les autres attestations émanent de conseillers municipaux, de membres de leurs familles et d'un agent communal et se bornent à mentionner, sans le moindre détail, que les avis se trouvaient dans une pochette insérée au dossier. Ainsi, les documents produits par la commune dont aucun n'est concomittant à l'enquête, ne sont pas suffisamment probants pour établir que les avis auraient été versés au dossier d'enquête.

9. Dans ces conditions, la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme est entachée d'une irrégularité au regard des dispositions précitées de l'article L. 123-10 précité dont il convient de rechercher si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête, et par suite sur la décision de l'autorité administrative.

10. Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport du commissaire enquêteur que cinq personnes publiques associées à l'élaboration du plan local d'urbanisme de Dahlenheim sur les dix-neuf consultées ont exprimé des avis circonstanciés sur le projet qui leur avait été soumis. Il résulte également de l'instruction que l'essentiel du débat sur le plan d'urbanisme a porté sur la conciliation à opérer entre la volonté recherchée par la commune de densifier l'urbanisation au centre bourg et la volonté de préserver du foncier pour le maintien des activités agricoles et viticoles. A cet égard, l'avis émis par les services préfectoraux préconisait expressément la consultation de l'INAO et de la chambre d'agriculture. Si les avis émis étaient favorables au projet, ils comportaient néanmoins des remarques ou réserves, portant notamment selon l'analyse du commissaire enquêteur sur les possibilités d'urbanisation de certains secteurs (avis du syndicat mixte du SCOT de la région de Strasbourg), l'interdiction de toute activité industrielle dans le tissu urbain (avis de la chambre de commerce et d'industrie), sur la situation de la SCEA Clauss (avis de la chambre d'agriculture), sur l'implantation des constructions compte tenu de la présence de terrains de viticulture classé en AOC et du plan de servitude par la direction départementale des territoires. La commune a d'ailleurs tenu compte de certaines de ces remarques pour modifier son projet de plan local d'urbanisme. Par ailleurs, il ressort de l'analyse du commissaire enquêteur que plusieurs des réclamations présentées par les habitants ont porté de façon plus ou moins directe sur ces points.

11. Dans ces conditions, eu égard à la qualité des personnes publiques ayant exprimé leur avis et au contenu, à la diversité et au caractère circonstancié de ces avis, qui touchaient à divers éléments du plan local d'urbanisme et rejoignaient certaines préoccupations des particuliers qui ont présenté des observations, et notamment celle du GAEC Clauss, cette irrégularité a eu pour effet de nuire à la complète information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération. Elle est ainsi de nature à entacher l'ensemble de la délibération du 12 février 2013 d'illégalité.

12. A ce stade de l'examen de la requête, il appartient néanmoins au juge d'appel, en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme qui fait obligation au juge administratif de se prononcer sur l'ensemble des moyens de la requête qu'il estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension d'un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur les autres moyens soulevés par la SCEA Clauss. Il ressort de cet examen qu'aucun autre moyen n'est, en l'état du dossier soumis à la cour, susceptible d'entraîner l'annulation de la délibération contestée.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la SCEA Clauss est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et à demander l'annulation de la délibération du 12 février 2013.

III - Sur les conclusions relatives aux frais de procédure :

14. Selon les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

15. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCEA Clauss, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Dahlenheim demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la commune de Dahlenheim la somme 1 500 euros à verser à la SCEA Clauss au titre des mêmes frais.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement attaqué du tribunal administratif de Strasbourg du 27 avril 2015 et la délibération contestée du conseil municipal de Dahlenheim du 12 février 2013 sont annulés.

Article 2 : La commune de Dahlenheim versera à la SCEA Clauss une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA Clauss et à la commune de Dahlenheim.

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N° 15NC01397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01397
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SONNENMOSER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-06-30;15nc01397 ?
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