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19/05/2016 | FRANCE | N°15NC01862

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 mai 2016, 15NC01862


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 16 avril 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1405953 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 25 août 2015 et le 18

avril 2016 M. D..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 140...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 16 avril 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1405953 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 25 août 2015 et le 18 avril 2016 M. D..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1405953 du 12 mars 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale", à défaut de réexaminer sa situation et de statuer dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me A...d'une somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- son appel n'est pas tardif, dès lors qu'il ne lui a pas été remis d'avis de passage de la part des services postaux ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance du principe général du contradictoire et des articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant ;

- les décisions fixant le délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination sont entachés d'incompétence ;

- ces décisions sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2016, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juillet 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Stefanski, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Considérant que M.D..., ressortissant ghanéen, interjette appel du jugement du 12 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 16 avril 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

Sur le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...)".

3. M. D...soutient qu'il justifie de l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine où sa mère est décédée, où sa petite soeur a été placée et où il ne possède aucune autre famille, ainsi que de l'importance et de l'intensité de ses attaches en France où il est arrivé le 10 mars 2012 alors qu'il était mineur, qu'il a fourni d'importants efforts pour s'intégrer, qu'il a suivi un enseignement de français, a cherché un emploi, s'est distingué par ses talents de footballeur à tel point que des clubs professionnels seraient prêts à le recruter, qu'il démontre vivre depuis deux ans avec MmeB..., de nationalité française avec qui il est fiancé.

4. Cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré irrégulièrement en France selon ses déclarations le 10 mars 2012 juste avant ses 17 ans, a été confié au service de protection de l'enfance du Bas-Rhin par ordonnance de placement provisoire du 11 juillet 2012, n'a jamais été scolarisé. Sa demande de contrat de jeune majeur a été rejetée le 26 mars 2013. Il ne ressort pas des pièces du dossier que sa vie commune avec Mme B... soit ancienne, dès lors que le requérant avait fourni jusqu'en août 2014 des attestations de domiciliation postale à la Croix Rouge, que l'attestation de l'énergie de Strasbourg du 24 février 2015, si elle mentionne que Mme B...avait conclu un contrat le 22 octobre 2013, indique seulement que M. D...est "actuellement" co-titulaire du contrat et que les attestations de particuliers ne sont pas assorties de justifications suffisantes. Il ne démontre pas l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine où vit sa soeur.

5. S'il ressort également des pièces produites que l'intéressé a pris des contacts avec des clubs de football, situés notamment en division d'honneur, qui ont déclaré prendre en considération son profil, il n'en résulte pas que ces clubs ont souhaité l'embaucher de façon certaine. Dans ces conditions, M. D...ne justifie ni de la stabilité et de l'intensité de sa vie commune avec sa concubine, ni de son insertion et de l'absence de liens dans son pays d'origine.

6. En conséquence, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.

8. Si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré, comme en l'espèce, de la violation des articles 41 et 47 de la Charte, par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

9. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

10. Lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne peut ignorer qu'en cas de refus il sera susceptible de faire l'objet d'une telle décision dans un délai déterminé. Il est donc en mesure de présenter à l'administration, durant toute la procédure d'instruction de sa demande, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement. En outre, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, compte tenu des circonstances de fait et de droit propres au cas d'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir. Ainsi, la seule circonstance que le préfet du Bas-Rhin n'ait pas, en l'espèce, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé l'étranger qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder le requérant comme ayant été privé de son droit à être entendu.

Sur la décision relative au délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de renvoi :

11. En appel, M. D...soutient que ces deux décisions sont entachées d'incompétence. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 16 septembre 2013 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet du Bas-Rhin a donné à M. Christian Riguet, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ne peut être accueilli.

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être écartées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N° 15NC01862


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01862
Date de la décision : 19/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : DOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-05-19;15nc01862 ?
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