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10/03/2016 | FRANCE | N°15NC00900

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 mars 2016, 15NC00900


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 21 mai 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, M.D..., représenté par

Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402620 du 18 décembre 2014du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 21 mai 2014 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2015, M.D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402620 du 18 décembre 2014du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me B...d'une somme de 1 813 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- le refus de séjour est insuffisamment motivé au regard de la loi du 11 juillet 1979 en droit comme en fait, ce qui atteste du défaut d'examen sérieux de la demande ;

- le préfet s'est estimé lié par la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11 alinéa 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît le droit d'être entendu et le principe général du droit de l'union européenne du droit de la défense et de la bonne administration résultant de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que de l'article 6 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 en ce que le requérant n'a pas bénéficié du droit d'exprimer son opinion sur la possibilité offerte par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de bénéficier d'un titre de séjour et le cas échéant d'une régularisation pour motif humanitaire ;

- elle est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle ne précise pas dans quel cas prévu par cet article, il se trouve ;

- le préfet a lié sa compétence en méconnaissance de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008 ;

- elle méconnaît son droit à sa vie privée et familiale, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation à raison de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle est contraire à l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme garantissant le droit au recours effectif de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui exige que le demandeur d'asile ait accès au juge de l'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'annulation des deux précédentes décisions ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête .

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Stefanski, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C...reprend en appel, en reproduisant ses développements de première instance et sans apporter de précisions, éléments ou documents supplémentaires, les moyens respectivement tirés, d'une part, de ce que le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé, le préfet s'est estimé lié par la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11 alinéa 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, de ce que l'obligation de quitter le territoire doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle ne précise pas dans quel cas prévu par cet article le requérant se trouve, le préfet a lié sa compétence en méconnaissance de l'article L. 511-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de la directive du 16 décembre 2008, est contraire à l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme garantissant le droit au recours effectif de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui exige que le demandeur d'asile ait accès au juge de l'asile, méconnaît son droit à sa vie privée et familiale, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation à raison de ses conséquences sur sa situation personnelle, enfin, de ce que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'annulation des deux précédentes décisions, est insuffisamment motivée, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces moyens ont été à bon droit écartés par le tribunal administratif dont il y a lieu d'adopter les motifs sur l'ensemble de ces points.

2. M. C...soutient ensuite que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le droit d'être entendu ainsi que le principe général du droit de l'union européenne du droit de la défense et de la bonne administration résultant de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en ce que, d'une part, le préfet aurait dû directement l'informer de la décision qu'il envisageait de prendre à son encontre afin qu'il soit en mesure de présenter spontanément ses observations écrites ou orales et de faire connaître de manière utile et effective son point de vue en étant informé qu'il pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement, d'autre part, en ce qu'il n'a pas bénéficié du droit d'exprimer son point de vue, résultant de l'article 6 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ainsi que l'aurait jugé la CJCE au point 61 de son arrêt C-249/13 du 11 décembre 2014, sur la possibilité offerte par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de bénéficier d'un titre de séjour et le cas échéant d'une régularisation pour motif humanitaire.

3. Si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

4. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré.

5. Les dispositions de droit interne applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Cette directive encadre de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement, sans toutefois préciser si et dans quelles conditions doit être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne.

6. Le droit d'être entendu, faisant partie intégrante du principe général du respect des droits de la défense, se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

7. Lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne peut ignorer qu'en cas de refus il sera susceptible de faire l'objet d'une telle décision dans un délai déterminé. Il est donc en mesure de présenter à l'administration, durant toute la procédure d'instruction de sa demande, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement. En outre, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, compte tenu des circonstances de fait et de droit propres au cas d'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.

8. M.C..., qui a été entendu par l'Office de protection des réfugiés et apatrides dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile pouvait faire valoir à tout moment auprès du préfet les éléments pertinents relatifs à son séjour en France avant que n'intervienne l'obligation de quitter le territoire français en litige.

9. De même, il ressort des termes mêmes du refus de titre de séjour contesté, qu'après étude de son dossier au cours de laquelle le requérant était en mesure de faire valoir tous éléments relatifs à sa situation personnelle, le préfet a examiné le droit au séjour de l'intéressé au regard de l'atteinte à sa vie privée et familiale et à la possibilité de régulariser sa situation et a estimé, au vu des éléments produits précisés dans l'arrêté, que M. C...ne pouvait prétendre à un titre de séjour sur ces fondements.

10. Dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de son droit à être entendu qui figure au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être écartées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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N° 15NC00900


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00900
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-10;15nc00900 ?
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