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14/01/2016 | FRANCE | N°15NC00334

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 14 janvier 2016, 15NC00334


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Payns a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2013 par lequel le préfet de la région Champagne-Ardenne lui a ordonné la réalisation d'une fouille préventive sur une parcelle cadastrée section ZD n° 47.

Par un jugement n° 1302132 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 février 2015, la commune de Pay

ns, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302132 du 16 décembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Payns a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2013 par lequel le préfet de la région Champagne-Ardenne lui a ordonné la réalisation d'une fouille préventive sur une parcelle cadastrée section ZD n° 47.

Par un jugement n° 1302132 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 février 2015, la commune de Payns, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302132 du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté du 4 juillet 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conditions de réalisation du diagnostic prévues par arrêté préfectoral du 11 janvier 2012 ont méconnu l'article L. 522-1 du code du patrimoine en ce qu'elles n'ont pas permis de protéger le développement économique et social ;

- la commune a été privée d'une garantie dès lors que la personne chargée du diagnostic, régulièrement nommée ultérieurement, n'était pas présente sur le terrain lors du diagnostic, contrairement aux dispositions de l'arrêté préfectoral du 11 janvier 2012 et du cahier des charges qui y était annexé ;

- la fouille préventive ordonnée méconnaît l'article L. 521-1 du code du patrimoine et est inutile et inefficace dès lors que l'existence d'un site funéraire, retenue par l'arrêté préfectoral contesté et le jugement attaqué, n'est qu'hypothétique et que les autres sondages effectués au cours du diagnostic n'ont rien révélé ;

- à supposer qu'existe un patrimoine à préserver, l'arrêté du 4 avril 2013 est illégal dès lors que les travaux d'aménagement prévus ne portent pas sur la zone où des objets ont été retrouvés, que les objets retrouvés se situent dans une partie non constructible du terrain dès lors que le plan local d'urbanisme prévoit que la parcelle comportera une zone de 30 mètres où les constructions et tous autres aménagements seront interdits, tandis que les sondages effectués à l'emplacement des travaux n'ont rien révélé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2015 et des pièces produites le 27 octobre et le 16 novembre 2015, le ministre de la culture et de la communication conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'atteinte aux exigences du développement économique et social, en méconnaissance de l'article L. 522-1 du code du patrimoine, n'est pas démontrée et la durée du diagnostic, qui relève des relations entre la commune et l'INRAP, n'est pas opposable à l'Etat ;

- les opérations de diagnostic sur le terrain ont été conduites par un responsable scientifique habilité ;

- il s'en remet aux écritures du préfet en première instance quant aux autres moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de l'instruction d'un permis d'aménager un terrain en vue de son lotissement présenté par la commune de Payns, le préfet de la région Champagne-Ardenne a, par arrêté du 11 janvier 2012, prescrit la réalisation d'un diagnostic archéologique dont les conclusions ont été rendues en avril 2013. Par arrêté du 4 juillet 2013, le préfet a prescrit la réalisation d'une fouille archéologique préventive et a mis cette obligation à la charge de la commune. La commune de Payns interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a dirigé sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2013.

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code du patrimoine : " L'archéologie préventive, qui relève de missions de service public, est partie intégrante de l'archéologie.(...). Elle a pour objet d'assurer, à terre et sous les eaux, dans les délais appropriés, la détection, la conservation ou la sauvegarde par l'étude scientifique des éléments du patrimoine archéologique affectés ou susceptibles d'être affectés par les travaux publics ou privés concourant à l'aménagement. (...) ". Aux termes de l'article R. 523-15 du même code : " Les prescriptions archéologiques peuvent comporter : / 1° La réalisation d'un diagnostic qui vise, par des études, prospections ou travaux de terrain, à mettre en évidence et à caractériser les éléments du patrimoine archéologique éventuellement présents sur le site et à présenter les résultats dans un rapport ; / 2° La réalisation d'une fouille qui vise, par des études, des travaux de terrain et de laboratoire, à recueillir les données archéologiques présentes sur le site, à en faire l'analyse, à en assurer la compréhension et à présenter l'ensemble des résultats dans un rapport final ; (...). ".

3. En premier lieu, la décision prescrivant la réalisation de fouilles par la commune de Payns, qui constitue un acte individuel, n'est pas la suite nécessaire de l'acte désignant Mme B...comme responsable scientifique du diagnostic archéologique qui a précédé l'arrêté contesté. Dans ces conditions, la commune n'est pas recevable à invoquer par voie d'exception le moyen tiré de l'illégalité de la désignation de MmeB....

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 522-1 du code du patrimoine : " L'Etat veille à la conciliation des exigences respectives de la recherche scientifique, de la conservation du patrimoine et du développement économique et social. Il prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l'étude scientifique du patrimoine archéologique, désigne le responsable scientifique de toute opération d'archéologie préventive et assure les missions de contrôle et d'évaluation de ces opérations ".

5. La commune fait valoir que l'article L. 522-1 du code du patrimoine a été méconnu en ce que les exigences résultant de la protection du développement économique et social n'ont pas été prises en compte. Cependant, elle se borne à faire valoir les conditions pratiques dans lesquelles le diagnostic archéologique a été réalisé, notamment sa durée d'établissement de treize mois et sa durée de transmission au préfet de deux mois et ne précise pas en quoi ces circonstances, qui d'ailleurs ne sont pas imputables à l'Etat dès lors que la durée des opérations était fixée par une convention passée entre la commune et l'INRAP, étaient de nature à nuire au développement économique et social.

6. En troisième lieu, il ressort du diagnostic établi par l'INRAP, que le terrain d'assiette du projet de lotissement, d'une surface de 11 798 m² a fait l'objet sur l'ensemble de son emprise de 18 tranchées disposées régulièrement. Trois emplacements ont permis de mettre à jour, pour l'un d'eux une fosse dite en V caractéristique d'une fosse de chasse datant du néolithique et pour les deux autres, des fragments de vases, qui selon l'étude effectuée par une spécialiste de l'INRAP, constituaient probablement, compte-tenu de leur aspect et de leurs motifs et malgré l'absence de découverte d'ossements, des vases de sépultures susceptibles d'appartenir à une nécropole et constituant "une référence non négligeable pour l'état de documentation des sites funéraires de la fin du Bronze moyen et du début du Bronze final dans l'Aube". S'il est vrai que l'arrêté préfectoral contesté du 4 juillet 2013 vise l'existence d'une "nécropole protohistorique" alors que sa réalité n'était que probable, le cahier des charges scientifiques annexé à l'arrêté montre que le préfet de région s'est principalement fondé sur les résultats du diagnostic et sur l'éventualité d'une telle nécropole, sans commettre d'erreur de fait, pour décider de la nécessité d'une fouille préventive.

7. En quatrième lieu, si la commune soutient que les mesures imposées par l'arrêté préfectoral du 4 juillet 2013 sont inutiles dès lors que sur 18 sondages effectués, seuls 3 d'entre eux ont permis des découvertes, il résulte des pièces du dossier que les fouilles prescrites par l'arrêté ne portent pas sur l'ensemble du terrain, mais sur une zone d'environ 3 000 à 4 500 m² autour de l'endroit où ont été découverts les vases. Dans ces conditions, les mesures prises par le préfet ne sont pas excessives au regard des éléments révélés par le diagnostic. La commune soutient que cette zone de fouille se trouve en bordure du terrain du projet, en partie à l'intérieur d'une zone de 30 mètres déclarée inconstructible par le règlement du futur lotissement et que les réseaux du lotissement ne passeront pas sur cette zone. Cependant, il ressort des plans joints au dossier que la zone se situe sous l'emprise de deux lots et que rien n'indique, que même si les réseaux du lotissement ne sont pas prévus à proximité immédiate des fouilles, l'aménagement des lots et la construction des maisons seront sans conséquence pour la détection, la conservation et la sauvegarde des éléments de patrimoine susceptibles de s'y trouver. Ainsi, les dispositions de l'article L. 521-1 du code du patrimoine ne sont pas méconnues et la mesure imposée par le préfet de région à la commune, ne paraît pas excessive au regard de l'emplacement des découvertes effectuées par rapport à l'emprise totale du terrain.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Payns n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Payns et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Payns est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Payns et à la ministre de la culture et de la communication.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

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N° 15NC00334


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00334
Date de la décision : 14/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

41-03 Monuments et sites. Fouilles archéologiques.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEFANSKI
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL TROYES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-01-14;15nc00334 ?
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