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05/11/2015 | FRANCE | N°15NC00212

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 05 novembre 2015, 15NC00212


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 1er février 2015, la commune de Vesoul et l'association " les vitrines de Vesoul ", représentées par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision du 2 décembre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a autorisé la SNC Pusey à créer un ensemble commercial à Pusey ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacune d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la com

mission n'a pu régulièrement statuer au regard des prescriptions de l'article L. 752-6 du code ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 1er février 2015, la commune de Vesoul et l'association " les vitrines de Vesoul ", représentées par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision du 2 décembre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a autorisé la SNC Pusey à créer un ensemble commercial à Pusey ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacune d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la commission n'a pu régulièrement statuer au regard des prescriptions de l'article L. 752-6 du code de commerce compte tenu du caractère incomplet du projet ;

- la commission nationale a commis une erreur d'appréciation en ce qui concerne l'impact sur l'aménagement du territoire.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 juin 2015 et des pièces jointes enregistrées le 15 juillet 2015 et le 25 septembre 2015, la SNC Pusey, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Vesoul et de l'association " les vitrines de Vesoul " au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié que la requête n'est pas tardive ;

- il n'est pas justifié de la qualité pour agir du représentant de l'association " les vitrines de Vesoul " ;

- les requérantes n'ont pas intérêt à agir ;

- le dossier présenté à la Commission nationale d'aménagement commercial était complet et n'avait pas à préciser les enseignes commerciales, ni la nature des produits vendus ;

- la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas commis d'erreur sur l'impact du projet au regard des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

- la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SNC Pusey.

Considérant ce qui suit :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

Sur la composition du dossier de demande :

1. Aux termes de l'article R. 752-7 du code de commerce : " La demande est accompagnée : /1° D'un plan indicatif faisant apparaître la surface de vente des commerces ; / 2° Des renseignements suivants : / a) Délimitation de la zone de chalandise du projet, telle que définie à l'article R. 752-8, et mention de la population de chaque commune comprise dans cette zone ainsi que de son évolution entre les deux derniers recensements authentifiés par décret ; / b) Desserte en transports collectifs et accès pédestres et cyclistes ; / c) Capacités d'accueil pour le chargement et le déchargement des marchandises. / II.- La demande est également accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l'article L. 752-6. Celle-ci comporte les éléments permettant d'apprécier les effets du projet sur : / 1° L'accessibilité de l'offre commerciale ; / 2° Les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que sur les accès sécurisés à la voie publique ; / 3° La gestion de l'espace ; / 4° Les consommations énergétiques et la pollution ; / 5° Les paysages et les écosystèmes ".

2. Le dossier de la demande soumise à la Commission nationale d'aménagement commercial précisait le nombre et la surface des cellules commerciales à créer, mentionnait pour chacune d'elles à quel type de commerce elle était destinée en prévoyant éventuellement plusieurs possibilités parmi "équipement de la maison, de la personne ou culture loisirs". Ainsi, et alors même que le dossier ne précisait pas les enseignes intéressées, ce qu'aucun texte n'exige, et n'affectait pas un seul type de commerce à chaque cellule, la Commission nationale d'aménagement commercial a disposé d'éléments suffisamment précis pour apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par la loi, que ce soit par rapport aux commerces du centre-ville de Vesoul comme par rapport à l'évasion commerciale vers d'autres villes.

Sur l'appréciation de la commission nationale :

3. D'une part, aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 : " Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi ". Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce alors en vigueur : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; b) L'effet du projet sur les flux de transport ; c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet ; b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs ".

5. Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation des objectifs prévus par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code.

6. Le projet en cause prévoit la création à Pusey d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 14 320 m², comprenant douze moyennes surfaces spécialisées situées de plain-pied dans des bâtiments situés de part et d'autre d'un parc de stationnement. Le projet doit être implanté sur une parcelle occupée auparavant à 80 % par une entreprise de travaux publics. Il se situe dans une zone d'activité dite Oasis 3, située à environ 4,5 kilomètres du centre de Vesoul, dans le prolongement d'un hypermarché, de sa galerie marchande et de plusieurs moyennes surfaces spécialisées situés dans une zone dite Oasis 2, ainsi que d'autres commerces de la zone dite Oasis 1. Il n'est pas démontré, contrairement à ce qu'affirment les requérantes qui font référence à une zone appelée Technologia, située à l'écart des zones Oasis et qui constitue un pôle industriel et logistique et non une zone commerciale, que de nombreux emplacements inoccupés à proximité du terrain d'assiette du projet seraient susceptibles de l'accueillir. Compte-tenu de l'occupation antérieure de la parcelle, la réalisation du projet évitera la naissance d'une friche industrielle. Les requérantes font valoir que d'autres pôles commerciaux comportant des supermarchés sont implantés autour de Vesoul, que le projet va conduire à accroître de façon importante les surfaces commerciales de la zone de chalandise déjà suréquipée, sans que l'évolution économique et démographique justifie un projet de l'ampleur de celui autorisé par la décision contestée de la Commission nationale d'aménagement commercial et que le projet fait double emploi avec d'autres autorisations antérieurement accordées dans les zones commerciales entourant Vesoul. Ces considérations, d'ailleurs étayées de chiffres non probants mentionnant notamment que la surface totale de vente des magasins de la zone de chalandise est de 33 000 m² alors qu'elle est en réalité de 132 971 m², ne suffisent pas à établir que le projet serait susceptible de détourner les consommateurs du centre-ville vers la périphérie, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de leur surface, les emplacements créés par la SNC Pusey soient comparables à ceux abritant les commerces du centre-ville et susceptibles de conduire à leur déplacement vers la périphérie, qu'il n'est pas contesté qu'existe une évasion commerciale des consommateurs de la zone de chalandise vers d'autres villes et notamment Besançon pour des commerces tels que ceux que le projet pourrait accueillir et que rien n'indique un suréquipement de la zone de chalandise dans ce type de commerces.

7. Il ressort des pièces du dossier que l'accès au projet s'effectuera par la RD 322 et la RN 19 qui dessert déjà la zone Oasis, qu'à la date de la décision contestée de la Commission nationale d'aménagement commercial, la réalisation d'une bretelle supplémentaire d'accès à la route nationale était certaine, que cette bretelle est de nature à améliorer les conditions de circulation du secteur et à absorber le flux de véhicules supplémentaires suscité par le projet et que deux giratoires supplémentaires sont créés pour desservir, l'un, l'entrée de la zone d'activités, et l'autre, le parc de stationnement qui sera créé dans le cadre de l'implantation des nouvelles cellules commerciales. Ainsi, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la Commission nationale d'aménagement commercial a fait une appréciation erronée de l'impact du projet sur les flux et les modes de transports.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision attaquée.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la commune de Vesoul et l'association " les vitrines de Vesoul " demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre solidairement à la charge de la commune de Vesoul et de l'association " les vitrines de Vesoul " une somme de 1 500 euros à payer à la SNC Pusey au titre des mêmes frais.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Vesoul et de l'association " les vitrines de Vesoul " est rejetée.

Article 2 : La commune de Vesoul et l'association " les vitrines de Vesoul " verseront solidairement à la SNC Pusey une somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Vesoul, à l'association " les vitrines de Vesoul ", à la SNC Pusey et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

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N° 15NC00212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00212
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-02-02 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Aménagement commercial. Procédure. Commission nationale d`aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-05;15nc00212 ?
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