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19/12/2013 | FRANCE | N°13NC00246

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 13NC00246


Vu la requête, enregistrée le 13 février 2013, présentée pour M. et Mme B...C..., demeurant..., par Me Branchet ;

M et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005655 du 7 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur leurs conclusions tendant à l'annulation des délibérations du conseil municipal de la commune de Grandfontaine en date des 23 octobre 2008, 19 juin 2009 et 14 octobre 2010 et rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 18 novembre 201

0 ainsi que de l'arrêté du maire du 22 septembre 2009 accordant un permis de ...

Vu la requête, enregistrée le 13 février 2013, présentée pour M. et Mme B...C..., demeurant..., par Me Branchet ;

M et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005655 du 7 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur leurs conclusions tendant à l'annulation des délibérations du conseil municipal de la commune de Grandfontaine en date des 23 octobre 2008, 19 juin 2009 et 14 octobre 2010 et rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 18 novembre 2010 ainsi que de l'arrêté du maire du 22 septembre 2009 accordant un permis de construire à la SCI Hotellerie 2000 ;

2°) d'annuler la délibération en date du 18 novembre 2010 par laquelle le conseil municipal de la commune de Grandfontaine a décidé de lancer la procédure de cession d'un chemin rural au Donon ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Grandfontaine la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- ils ont déposé deux requêtes distinctes ; la première a été enregistrée le 23 novembre 2010 et visait à obtenir l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Grandfontaine du 14 octobre 2010 ; la seconde a été enregistrée par fax le 19 janvier 2011 et tendait à l'annulation des délibérations des 23 octobre 2008, 19 juin 2009 et 18 novembre 2010 ;

- la délibération du 18 novembre 2010, qui ne se donne pas pour but le déclassement du chemin rural ni n'identifie celui-ci, ne peut être considérée comme un acte préparatoire car elle a pour but de régulariser une situation irrégulière, résultant d'une part des délibérations illégales des 23 octobre 2008 portant déclassement du chemin rural situé section 3 col du Donon et du 19 juin 2009 décidant sa cession à M. et MmeE..., d'autre part de tenter de donner un fondement légal à l'arrêté du 22 septembre 2009 délivrant un permis de construire à la SCI Hôtellerie 2000 ;

- la délibération du 18 novembre 2010, qui n'indique pas le but, le motif d'intérêt général justifiant le déclassement et n'identifie par le chemin rural concerné, est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'intervenant en fin et non en début de procédure, elle n'a pour objet que de régulariser la situation du bénéficiaire du permis de construire ;

- cette délibération viole la loi car elle devait intervenir avant la délivrance du permis de construire ; en outre la délibération ne pouvait intervenir que si le chemin a cessé d'être affecté à l'usage du public, ce qui n'est pas le cas, et après enquête publique préalable ; elle viole les dispositions de l'article L. 361-1 du code de l'environnement et de l'article L. 121-17 7ème alinéa du code rural et de la pêche maritime ; l'aliénation du chemin rural, qui fait partie du sentier de grande randonnée GR 5, doit être compensée afin de maintenir la continuité des itinéraires inscrits au schéma départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ;

- la délibération est entachée de détournement de pouvoir ; elle n'a pas été prise dans l'intérêt général mais dans un intérêt privé ;

- la délibération est entachée d'erreur manifeste d'appréciation car elle supprime un chemin rural incontestablement utile, support d'un sentier de grande randonnée, et accentuera le manque d'eau dans le secteur ;

- la délibération intervient après trois délibérations illégales que la commune de Grandfontaine a d'ailleurs retirées et un arrêté illégal du maire de la commune en date du 22 septembre 2009 accordant un permis de construire à la SCI Hôtellerie 2000 ; elle vise à donner un fondement légal à ses actes illégaux ; elle est illégale du fait de l'illégalité de ces derniers ;

- le permis de construire délivré le 22 septembre 2009 ne pouvait être accordé que sous réserve que le chemin rural soit déclassé et cédé à M et Mme E...dès lors qu'il constitue le terrain d'assiette de leur projet de construction ; les délibérations permettant ce déclassement et cette aliénation ayant été retirées, le permis de construire est illégal ; la délibération du 18 novembre 2010, postérieure au permis, ne peut lui donner de fondement légal ; M. E... n'est pas propriétaire du terrain d'assiette de la construction autorisée ; au surplus, le chemin rural ne peut être vendu puisqu'il n'est pas cadastré ; le projet de construction autorisée est contraire aux dispositions de l'article 2ND du plan d'occupation des sols qui interdisent, dans la zone NDb, les constructions nouvelles à usage hôtelier ; les travaux entrepris ne correspondent pas à l'aménagement, à la transformation ou à l'extension contigüe de constructions existantes ; la nouvelle construction autorisée va aggraver le manque récurrent d'eau dans le secteur ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 16 août 2013, le mémoire en défense, présenté pour la commune de Grandfontaine, par MeA..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que la Cour mette à la charge de M. et Mme C...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable parce que tardive ;

- les requérants ont formé un unique recours devant le tribunal administratif ; le mémoire enregistré le 19 janvier 2011 était un simple mémoire ampliatif ; les premiers juges ont à juste titre statué par un seul jugement ;

- les conclusions dirigées contre la délibération du 18 novembre 2010 sont irrecevables, comme l'a jugé à bon droit le tribunal, dès lors qu'elle est une simple mesure préparatoire et qu'aucun vice propre n'est invoqué ;

- la délibération du 18 novembre 2010 n'est affectée d'aucun vice de procédure ; elle se borne à engager la procédure prévue par l'article L. 160-10 du code rural et de la pêche maritime et à prévoir l'organisation d'une enquête publique ;

- l'absence de désaffectation du chemin rural à l'usage du public n'est pas démontrée ; au surplus, la délibération du 18 novembre 2010 n'avait pas à être précédée de la désaffectation du chemin rural puisqu'une décision de déclassement porte par elle-même désaffectation ;

- les dispositions de l'article L. 361-1 du code de l'environnement et de l'article L. 121-17 7ème alinéa du code rural et de la pêche maritime n'ont pas été méconnues dès lors qu'il n'est pas prouvé que le chemin rural faisait partie d'un itinéraire inscrit au schéma départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ;

- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

- les moyens tendant à démontrer l'illégalité du permis de construire délivré par arrêté du maire de Grandfontaine du 22 septembre 2009 sont inopérants, le permis étant devenu définitif ;

- l'exception d'illégalité des délibérations des 23 octobre 2008, 19 juin 2009 et 14 octobre 2010 ainsi que de l'arrêté du 22 septembre 2009 doit être écarté, ces actes étant distincts de la délibération du 18 novembre 2010 ;

- les conclusions tendant à ce que la Cour constate par la voie de l'exception l'illégalité du permis de construire délivré le 22 septembre 2009 sont irrecevables, le permis étant devenu définitif ;

- très subsidiairement, le permis délivré le 22 septembre 2009 ne méconnait pas les dispositions de l'article 2ND du plan d'occupation des sols de la commune ; les premiers juges ont à bon droit considéré que ledit permis n'était pas une mesure d'exécution des délibérations adoptées par le conseil municipal et contestées par les appelants ; il n'appartient pas à l'administration de vérifier la pertinence de la déclaration de propriété du pétitionnaire, produite à l'appui de la demande de permis ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2013 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Branchet, avocat de M. et MmeC..., ainsi que celles de Me Deligiannis, avocat de la commune de Grandfontaine ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant que M et Mme C...ont saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une requête enregistrée le 1er décembre 2010 tendant à l'annulation d'une délibération du 14 octobre 2010 et dans laquelle ils arguaient par voie d'exception de l'illégalité de deux délibérations des 23 octobre 2008 et 19 juin 2009 et de l'arrêté du 22 septembre 2009 ; qu'ils ont complété cette requête par un " mémoire ampliatif " enregistré le 9 décembre 2010 ; que le 19 janvier 2011, ils ont envoyé au tribunal par télécopie un second " mémoire ampliatif " portant en tête le même objet et se référant expressément page 3 à leur requête du 1er décembre 2010, y ajoutant des conclusions à fin d'annulation d'une nouvelle délibération du 18 novembre 2010 et des délibérations précitées des 23 octobre 2008 et 19 juin 2009 ; qu'ils ont produit le 22 novembre 2012 un mémoire en réplique reprenant l'ensemble des conclusions ainsi formulées, ainsi qu'une note en délibéré enregistrée le 9 décembre 2012 ; que, quand bien même il contenait des conclusions additionnelles, le mémoire du 19 janvier 2011, intitulé expressément " mémoire ampliatif ", a été à bon droit regardé comme un mémoire complémentaire et non comme une nouvelle requête ; que, par suite et en tout état de cause, le tribunal n'a commis aucune irrégularité en statuant par un seul jugement sur les diverses conclusions formées par les épouxC... ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté ;

Sur le fond :

2. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions formées par M et Mme C...tendant à l'annulation de la délibération du 18 novembre 2010 par laquelle le conseil municipal de la commune Grandfontaine invitait le maire à organiser une enquête publique au motif qu'elles étaient irrecevables, l'acte attaqué étant une mesure préparatoire insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

3. Considérant qu'alors même qu'elle est intervenue pour régulariser une procédure précédemment engagée par des délibérations retirées depuis, la délibération litigieuse, qui se borne à " lancer la procédure de cession d'un chemin rural au Donon prévue par l'article L. 161-10 du code rural " et à " inviter Monsieur D...à organiser une enquête publique sur ce projet " est un acte préparatoire insusceptible de recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, les conclusions de M. et Mme C...tendant à l'annulation de cette délibération sont, comme l'a jugé le tribunal administratif, irrecevables et ne peuvent, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, qu'être rejetées ;

4. Considérant que M et Mme C...soutiennent que les premiers juges n'auraient pas, à tort, admis l'illégalité du permis de construire délivré à la SCI Hôtellerie 2000 par arrêté du maire de Grandfontaine le 22 septembre 2009 ; qu'il résulte de la motivation du jugement que le tribunal a seulement considéré que le permis de construire n'était pas une mesure d'application des délibérations des 23 octobre 2008, 19 juin 2009 et 14 octobre 2010 dont la légalité était contestée et a écarté l'exception d'illégalité desdites délibérations soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 septembre 2009 ; qu'en appel, M. et MmeC..., qui ne formulent aucune conclusion tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 22 septembre 2009, se bornent à exciper de l'illégalité dudit permis à l'appui de leurs conclusions dirigées contre la délibération du 18 novembre 2010 ; que ce moyen doit être écarté comme étant inopérant, l'acte attaqué étant lui-même, comme dit ci-dessus, insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation " ;

7. Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Grandfontaine, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme C...au titre des frais exposés au cours de la présente instance ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme C...la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Grandfontaine au titre des frais qu'elle a exposés pour se défendre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : M. et Mme C...verseront à la commune de Grandfontaine la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...et à la commune de Grandfontaine.

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13NC00246


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00246
Date de la décision : 19/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Jonction des pourvois.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Exception d'illégalité.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : BRANCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-12-19;13nc00246 ?
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