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10/10/2013 | FRANCE | N°12NC01688

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 octobre 2013, 12NC01688


Vu l'ordonnance n° 359906 en date du 5 octobre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt n° 11NC00392 rendu le 19 avril 2012 par la Cour administrative d'appel de céans et a renvoyé l'affaire devant cette Cour pour qu'il soit statué sur la requête de M. A... B... ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 mars 2011, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Planchat, avocat ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705230 en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a reje

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Vu l'ordonnance n° 359906 en date du 5 octobre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt n° 11NC00392 rendu le 19 avril 2012 par la Cour administrative d'appel de céans et a renvoyé l'affaire devant cette Cour pour qu'il soit statué sur la requête de M. A... B... ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 mars 2011, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Planchat, avocat ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705230 en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a acquittés au titre de la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, à concurrence de 6 187 euros, ainsi qu'à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des mois d'avril et juillet 2005, à concurrence de 1 408 euros ;

2°) de prononcer la restitution et la décharge demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'article 13, A, paragraphe 1, sous c), de la sixième directive et le principe de neutralité fiscale sont méconnus, dès lors que la législation française et l'administration devaient tenir compte de la qualité des soins qu'il prodiguait au regard de la formation qu'il avait suivie en ostéopathie, laquelle était d'un niveau équivalent à celle des médecins et masseurs kinésithérapeutes titulaires, ainsi que le démontrent les circonstances que la loi a ultérieurement reconnu la profession d'ostéopathe et qu'il a, en application de cette loi, obtenu le droit d'user définitivement du titre d'ostéopathe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le requérant ne peut se prévaloir de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 pour des honoraires perçus antérieurement à la modification apportée à l'article 261-4-1° du code général des impôts par l'article 58 de la loi du 25 décembre 2007 ;

- le requérant ne démontre pas qu'au cours de la période litigieuse, il se serait abstenu d'accomplir des actes d'ostéopathie interdits aux praticiens qui n'avaient pas la qualité de médecin, ni que ses actes étaient d'une qualité équivalente à ceux d'un médecin ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu la sixième directive n° 77-388 CEE du Conseil du 17 mai 1977 alors en vigueur ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 ;

Vu le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 2013 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...a spontanément acquitté, au titre de son activité d'ostéopathe, un montant total de taxe sur la valeur ajoutée de 6 187 euros correspondant, d'une part, à 5 264 euros portés sur la déclaration CA 12 déposée le 2 mai 2005 par le requérant au titre de l'année 2004 et, d'autre part, à un acompte de 923 euros payé en avril 2005 par le redevable ; que l'administration a également mis à sa charge un rappel de 1 408 euros au titre d'un acompte dû en juillet 2005, sur lequel ne restent en litige que 132 euros à la suite des dégrèvements prononcés par le service ; que, par réclamation du 6 juillet 2007, M. B... a demandé la restitution des sommes versées spontanément et la décharge du rappel susmentionné ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ;

4. Considérant toutefois que, conformément à l'interprétation des dispositions de la sixième directive qui résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) / Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) / Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;

6. Considérant que le décret du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et le décret du même jour relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation, pris pour l'application de cet article, n'ont été publiés que le 27 mars 2007 ; que, durant la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, les actes d'ostéopathie ne pouvaient être pratiqués que par les docteurs en médecine et, pour certains actes, sur prescription médicale, par les masseurs-kinésithérapeutes, en vertu de la réglementation de leur profession, notamment des articles R. 4321-5 et R. 4321-7 du code de la santé publique ; que, par suite, les ostéopathes ne pouvaient, alors, pas se prévaloir des dispositions du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, pour déterminer le droit du requérant à demander la restitution des cotisations de taxe sur la valeur ajoutée qu'il soutient avoir acquittées à tort entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005 et à être déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge en avril et juillet 2005, il appartient de vérifier que M. B... disposait, pour la fourniture de ses prestations d'ostéopathie, de qualifications professionnelles propres à leur assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies, selon le cas, par un médecin ou par un masseur-kinésithérapeute ; qu'une telle appréciation ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; qu'est en revanche sans incidence, pour apprécier la nature de ces actes au regard de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période en cause, la circonstance que M. B... ait suivi un enseignement d'ostéopathie, se soit vu délivrer le 24 octobre 2003 un diplôme d'ostéopathie par l'association française d'ostéopathie, et ait reçu l'autorisation d'utiliser le titre d'ostéopathe par décision du préfet de la région Ile-de-France de septembre 2008, prise dans le cadre de la mise en oeuvre des mesures transitoires prévues à l'article 16 du décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 en vue d'autoriser l'usage dudit titre par les praticiens en exercice à la date de publication de ce décret ; que M. B...ne produit aucun élément relatif à sa pratique, qui permettrait d'appréhender la nature des actes qu'il a accomplis en 2004 et 2005 sous la dénomination d'actes d'ostéopathie ou les conditions dans lesquelles ces actes ont été effectués ; que, par suite, le ministre intimé est fondé à soutenir que le requérant n'apporte pas la preuve, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée spontanément versée, ou qu'il ne résulte pas de l'instruction, en ce qui concerne le rappel de taxe, que les actes accomplis par M. B... durant cette période pouvaient être considérés comme d'une qualité équivalente à ceux qui sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1 : La requête susvisée de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'économie et des finances.

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12NC01688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01688
Date de la décision : 10/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-06-02-01-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Personnes et opérations taxables. Opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP NATAF ET PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-10-10;12nc01688 ?
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