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10/02/2011 | FRANCE | N°10NC00094

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 février 2011, 10NC00094


Vu le recours, enregistré le 19 janvier 2010, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801349 du 19 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de M. A, l'arrêté du 17 juillet 2008 par lequel le maire de la commune d'Entre-Deux-Monts a refusé, au nom de l'Etat, de lui délivrer un permis de construire une maison à usage d'habitation ;

2°)

de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que le Tribunal a commis une erreu...

Vu le recours, enregistré le 19 janvier 2010, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801349 du 19 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de M. A, l'arrêté du 17 juillet 2008 par lequel le maire de la commune d'Entre-Deux-Monts a refusé, au nom de l'Etat, de lui délivrer un permis de construire une maison à usage d'habitation ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en sanctionnant le refus du maire sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 111-3 du code rural et des articles 2.1.1 et 2.1.4 de l'annexe 1 de l'arrêté du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement ; que, s'agissant des autres moyens, il s'en rapporte aux mémoires en défense du préfet du Jura devant le Tribunal ;

Vu le jugement et la décision contestés ;

Vu, enregistré le 14 juin 2010, le mémoire en défense présenté pour M. A, par Me Remond ;

Il conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de procéder à un nouvel examen de sa demande de permis de construire au regard des règles applicables à la date à laquelle le permis de construire a été demandé ;

3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable, Mme De Silva ne justifiant pas d'une délégation régulière l'habilitant à faire appel au nom du ministre, la requête n'a pas été notifiée en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- la décision en litige doit être regardée comme un retrait d'un permis de construire tacite pris à l'issue d'une procédure irrégulière méconnaissant les dispositions de la loi du 12 avril 2000, faute pour lui d'avoir été invité à présenter ses observations ;

- le régime des installations classées ne peut s'appliquer au site secondaire du GAEC l'eau vive dès lors qu'il n'a pas été mis aux normes avant le 20 décembre 2009 et que son récépissé de déclaration est devenu caduc ;

- la règle des 100 mètres n'est pas applicable dès lors que l'objet de la déclaration dont bénéficiait le GAEC devait permettre de mettre en conformité le site ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement ;

Vu le décret du 17 octobre 2009 portant nomination de la directrice des affaires juridiques au secrétariat général du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat - Mme de Silva (Isabelle) ;

Vu l'arrêté du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2011 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Remond, avocat de M. A ;

Sur les fins de non recevoir opposées par M. A :

Considérant, en premier lieu, qu'en application du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, un directeur d'administration centrale a qualité pour signer au nom du ministre ; que, par suite, Mme de Silva, nommée par le décret susvisé du 17 octobre 2009 directrice des affaires juridiques au secrétariat du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, avait qualité pour signer au nom du ministre la requête d'appel ; que la fin de non-recevoir opposée à ce titre par M. A doit donc être rejetée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif.(...) ; que si ces dispositions n'imposent pas, à peine d'irrecevabilité, au requérant qui interjette appel contre un jugement annulant un refus de délivrer un permis de construire de notifier sa requête au pétitionnaire, il en va autrement si, à l'issue du jugement ou de l'arrêt annulé, le droit du pétitionnaire à obtenir une autorisation de construire a été reconnu. Il en est ainsi dès lors que les juges du fond ont constaté l'existence d'un permis de construire tacite et annulé, pour ce motif, la décision portant refus de permis. ;

Considérant que par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Besançon a annulé un refus de permis de construire ; qu'il ne ressort pas des motifs du jugement contesté que les premiers juges ont constaté l'existence d'un permis de construire tacite et annulé, pour ce motif, la décision portant refus de permis ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER n'était pas tenu, à peine d'irrecevabilité de sa requête d'appel, de procéder aux formalités de notification prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme précité ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur le motif d'annulation retenu par le Tribunal :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code rural : Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes.(...) ; que l'article 2.1.1 de l'annexe I de l'arrêté du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement prévoit que : les bâtiments d'élevage et leurs annexes sont implantés à au moins 100 mètres des habitations de tiers(...) ; que l'article 2.1.4 du même texte précise que les dispositions du 2.1.1 ne s'appliquent, dans le cas des extensions des élevages en fonctionnement régulier, qu'aux nouveaux bâtiments d'élevage ou à leurs annexes nouvelles. Elles ne s'appliquent pas lorsque l'exploitant doit, pour mettre en conformité son installation avec les dispositions du présent arrêté, réaliser des annexes ou aménager ou reconstruire sur le même site un bâtiment de même capacité. ;

Considérant qu'il est constant que le projet de construction de M. A sur la parcelle cadastrée section U n° 1268 à Entre-Deux-Monts est situé à moins de 100 mètres du site secondaire de l'exploitation agricole du GAEC l'eau vive , bénéficiaire, pour ce site, d'un récépissé de déclaration au titre des installations classées pour l'élevage de 95 vaches laitière en date du 20 décembre 2006 ; qu'en application des dispositions combinées précitées de l'article L. 111-3 du code rural et de l'article 2.1.1 de l'annexe I de l'arrêté du 7 février 2005, le maire de la commune a en conséquence pu à bon droit refuser à M. A le permis de construire qu'il sollicitait pour la construction d'une maison d'habitation ; que la circonstance, à la supposer avérée, que le GAEC l'eau vive puisse sur le fondement de l'article 2.1.4 de l'annexe I l'arrêté du 7 février 2005 précité mettre aux normes ses installations sans que ne puisse lui être opposée la règle des 100 mètres est sans influence sur la légalité de la décision en litige qui porte sur un projet de construction située à au moins 100 mètres d'un bâtiment d'élevage soumis au régime de la déclaration et dont la légalité s'apprécie indépendamment des travaux qu'envisage de réaliser l'exploitant agricole ; qu'il s'ensuit que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Besançon a, par le jugement contesté, annulé l'arrêté du 17 juillet 2008 par lequel le maire de la commune d'Entre-Deux-Monts a refusé, au nom de l'Etat, de délivrer à M. A un permis de construire une maison à usage d'habitation ;

Considérant, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour par M. A ;

Sur les autres moyens :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté détenu par la commune par lequel le maire a refusé à M. A le permis de construire sollicité est daté du 17 juillet 2008 ; que la circonstance que la décision, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait été notifiée à l'intéressé postérieurement au délai d'instruction, ne soit pas signée n'est pas à elle-seule de nature à démontrer que M. A aurait été bénéficiaire, le 3 août 2008, d'un permis de construire tacite ; que par suite M. A n'est en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait retiré un permis de construire tacite sans qu'il ait été mis à même de présenter ses observations en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le GAEC l'eau vive n'a pas réalisé les travaux de mise aux normes de son site secondaire en méconnaissance des prescriptions contenues dans le récépissé de déclaration en date du 20 décembre 2006 et que ce récépissé serait de ce fait devenu caduc est en tout état de cause sans influence sur la légalité du refus de permis de construire dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle il a été pris ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que certaines constructions ne seraient pas conformes avec le document d'urbanisme en vigueur est inopérant ;

Considérant enfin que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 17 juillet 2008 par lequel le maire de la commune d'Entre-Deux-Monts a refusé, au nom de l'Etat, de délivrer à M. A un permis de construire une maison à usage d'habitation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction de M. A :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0801349 du 19 novembre 2009 susvisé du Tribunal administratif Besançon est annulé.

Article 2 : La demande et les conclusions d'appel incident de M. A sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT, à M. A et à la commune d'Entre-Deux-Monts.

Copie en sera délivrée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lons le Saunier.

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N°10NC00094


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC00094
Date de la décision : 10/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SCP CONVERSET ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-02-10;10nc00094 ?
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