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20/01/2011 | FRANCE | N°09NC01522

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 20 janvier 2011, 09NC01522


Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2009, présentée pour M. Manvel A, Mme Hasmik A née C et Mlle Liana A, demeurant ..., par Me Dollé, avocat ;

M. A, Mme A et Mlle A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903148-0903149-0903150 du 30 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 9 juin 2009 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de renouveler leurs titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de desti

nation ;

2°) d'annuler lesdits arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mo...

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2009, présentée pour M. Manvel A, Mme Hasmik A née C et Mlle Liana A, demeurant ..., par Me Dollé, avocat ;

M. A, Mme A et Mlle A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903148-0903149-0903150 du 30 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 9 juin 2009 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de renouveler leurs titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdits arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, au besoin sous astreinte, de leur délivrer un titre de séjour, et subsidiairement de réexaminer leur situation dans un délai déterminé ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros à Me Dollé en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Ils soutiennent :

- concernant les refus de renouveler les titres de séjour, que:

* leurs demandes de renouvellement de titre de séjour ne sont pas motivées et n'ont pas fait l'objet d'un examen particulier ;

* les certificats médicaux produits démontrent que M. A ne peut se faire soigner en Arménie ;

* les décisions attaquées méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de l'article 3 de la même convention ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- concernant les décisions portant obligation de quitter le territoire français que :

* les décisions attaquées doivent être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions de refus de renouveler le titre de séjour ;

- concernant les décisions fixant le pays de destination que :

* le préfet et les premiers juges se sont sentis liés par les décisions rendues par les instances compétentes en matière d'asile ;

* les décisions attaquées méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2009, présenté pour l'Etat par le préfet de la Moselle qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy (section administrative d'appel), en date du 15 janvier 2010, admettant M. A, Mme A et Mlle A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2010 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

En ce qui concerne les refus de renouveler les titres de séjour :

- Sur les moyens tirés du défaut de motivation et d'examen particulier de la situation des intéressés :

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les décisions attaquées énoncent les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'elles font notamment mention du parcours des intéressés depuis leur entrée sur le territoire ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation des décisions attaquées manque en fait et doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de la situation de chaque requérant avant de leur refuser, par les décisions en litige, le séjour ; que ce moyen ne peut ainsi qu'être rejeté ;

- Sur le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : (...) Le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le préfet de la Moselle a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A, sur le fondement des dispositions précitées, au vu de l'avis du médecin inspecteur de santé publique en date du 2 mars 2009, selon lequel, si l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale actuellement en cours dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les trois attestations médicales produites par M. A, dont une est non datée et une autre postérieure à la décision attaquée, se bornent à dresser les pathologies dont souffre le requérant ; qu'elles ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation du médecin inspecteur de santé publique ; qu'ainsi M. A n'établit pas être dans l'impossibilité de se faire soigner en Arménie ; que par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entré et du séjour des étrangers soulevé par M. A doit être écarté ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre les arrêtés refusant à Mme A et Mlle A le séjour, lesquels ne sont pas fondés sur l'état de santé des requérantes ;

- Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que si M. et Mme A font valoir qu'ils sont bien intégrés en France et que leurs enfants, dont Mlle A qui est majeure, sont scolarisés en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que les intéressés sont entrés irrégulièrement en France le 18 novembre 2003 et ne se sont maintenus sur le territoire français que dans l'attente des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile relatives à leurs demandes d'asile puis dans l'attente des soins prodigués à M. A ; que dans ces conditions, eu égard à la brièveté et aux conditions de séjour des intéressés, les arrêtés litigieux par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de renouveler leur titre de séjour n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

- Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ; que toutefois, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui d'un recours dirigé contre des décisions de refus de titre de séjour dès lors qu'elles n'impliquent en elles-mêmes aucune obligation de retourner dans le pays d'origine ;

- Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant :

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ; qu'aux termes de l'article premier de ladite convention : Au sens de la présente Convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable. ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, Mlle A était majeure à la date de la décision attaquée ; qu'à ce titre, elle est exclue de la protection garantie par la convention précitée ; que, dans les circonstances de l'espèce, le fait que le fils des époux A, âgé de 14 ans à la date des décisions attaquées, soit scolarisé et bien intégré ne saurait suffire à démontrer que le préfet de la Moselle a porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant en refusant à M. et Mme A le renouvellement de leur titre de séjour, cette décision n'ayant pour conséquence, ni de séparer les membres de la cellule familiale qui peuvent poursuivre leur vie familiale en Arménie, ni de priver l'enfant de la possibilité de faire des études ; que par suite, le préfet de la Moselle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que doit être écarté le moyen tiré de ce que les décisions du 9 juin 2009 par lesquelles le préfet de la Moselle a fait obligation aux requérants de quitter le territoire français doivent être annulées comme dépourvues de base légale par voie de conséquence de l'annulation des décisions refusant aux requérants le renouvellement de leur titre de séjour ;

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que les requérants n'établissent pas la réalité des risques qu'ils allèguent encourir s'ils retournaient en Arménie ; que ce moyen ne peut ainsi qu'être qu'écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A, Mme A et Mlle A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 9 juin 2009 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de leur renouveler leurs titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent être que rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A, Mme A et Mlle A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Manvel A, Mme Hasmik A née C et Mlle Liana A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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09NC01522


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01522
Date de la décision : 20/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-01-20;09nc01522 ?
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