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04/11/2010 | FRANCE | N°09NC01650

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 04 novembre 2010, 09NC01650


Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, complétée par un mémoire enregistré le 31 mai 2010, présentée pour l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA France, représentée par son président, par Me Destarac;

L'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801148 du 31 août 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme CU88 13207K006 positif du 18 mars 2008 en tant qu'i

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Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, complétée par un mémoire enregistré le 31 mai 2010, présentée pour l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA France, représentée par son président, par Me Destarac;

L'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801148 du 31 août 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme CU88 13207K006 positif du 18 mars 2008 en tant qu'il est assorti de plusieurs réserves contenues dans les cadres 9 et 10 ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre à la commune de Deyvillers de prendre une nouvelle décision sur le fondement des dispositions d'urbanisme applicables au jour du dépôt des demandes ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Deyvillers le versement de la somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, le projet envisagé ne crée aucun délaissé ;

- en tout état de cause la prescription relative aux délaissés n'est pas applicable aux opérations de construction d'un établissement d'intérêt public ;

- le tourne à gauche mentionné dans le certificat d'urbanisme est, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, prévu par le plan d'occupation des sols ;

- le sursis à statuer n'est pas justifié au regard tant de l'absence d'avancement du plan local d'urbanisme en cours de révision que de la compatibilité du projet au PADD et au SCOT des Vosges centrales ;

- le sursis n'est pas motivé ;

- la décision contestée méconnaît les articles 9, 10, 11 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 1er du protocole additionnel à la convention, la décision contestée étant justifiée par la seule volonté d'empêcher l'implantation de l'association ;

- le seul objectif de la commune est d'empêcher l'implantation d'un lieu de culte ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu, enregistré le 24 février 2010, le mémoire présenté pour la commune de Deyvillers, par Me Gartner ;

Elle conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE le versement de la somme de2 500 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés ;

Vu l'ordonnance en date du 9 mars 2010 fixant la clôture de l'instruction au 31 mai 2010 à 16h00 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Destarac, avocat de l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE, ainsi que celles de Me Cuny, avocat de la commune de Deyvillers ;

Sur les prescriptions du cadre 10 :

En ce qui concerne la prescription relative aux délaissés :

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 2NA1 du plan d'occupation des sols de la commune de Deyvillers : Ne sont admises que les occupations et utilisations du sols suivantes, sous réserve des conditions fixées au 3 § ci-après : Dans la zone 2NA, y compris le secteur 2NAad : (...) les équipements d'intérêt public (...) Dans le seul secteur 2NAad : les opérations à usage principal d'activités non résidentielles et les installations et habitations qui leur sont liées (...) ; qu'aux termes du 3 du même article : (...) Dans le seul secteur 2NAad : les opérations à usage principal d'activités non résidentielles autorisées au §2 ci-dessus devront (...) ne pas créer de délaissé de terrain inconstructible ( ...) ;

Considérant que le cadre 10 du certificat d'urbanisme contesté précise que : le terrain objet de la demande peut permettre la construction d'un établissement de culte. Cependant, le projet d'ensemble devra respecter les conditions suivantes qui figurent dans le P O S valant P L U : (...) aucun délaissé de terrain ne devra être créé dans le secteur 2NA ad en application de l'article 2NA 1 du règlement du P O S valant P L U(...). Sur ces deux points, l'attention du pétitionnaire est attirée sur le fait que : (...) - le principe général de desserte interne figurant sur le plan masse de l'opération sous forme d'esquisse ne garantit pas la desserte des parcelles enclavées au nord-ouest du secteur. ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet envisagé, qui ne portait pas sur la construction d'un équipement d'intérêt public, avait pour conséquence de créer un délaissé de terrain inconstructible ; que l'association requérante est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a rejeté ce moyen ; que le certificat litigieux devra être annulé en tant qu'il contient cette réserve ;

En ce qui concerne la prescription relative à l'accès du projet:

Considérant qu'aux termes du préambule du règlement applicable à la zone 2NA du plan d'occupation des sols de la commune de Deyvillers : (...) Dans ces secteurs sis au lieu dit Derrière la ville (...) les occupations et utilisations des sols s'inspireront des prescriptions annexées au rapport de présentation du plan d'occupation des sols ( cf Etudes Préalables à l'aménagement des zones NA et plus particulièrement du secteur 2 NAad (annexe 2B chapitre 13 dispositions réglementaires ) ; elles s'inspireront également du chapitre 12 Parti retenu ( annexe 2B) ; que le cadre 10 du certificat d'urbanisme contesté précise que : le terrain objet de la demande peut permettre la construction d'un établissement de culte. Cependant, le projet d'ensemble devra respecter les conditions suivantes qui figurent dans le P O S valant P L U : l'accès devra être conforme aux dispositions du règlement applicable à la zone 2NAad et à l'annexe 2B au rapport de présentation (...) Sur ces deux points, l'attention du pétitionnaire est attirée sur le fait que : (...) - l'accès au projet depuis la RD 420 n'est pas le dispositif prévu par le P O S valant P L U . ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement de l'annexe 2 B du rapport de présentation du plan d'occupation des sols de la commune de Deyvillers que, si un carrefour giratoire était préconisé pour la desserte de la zone d'implantation du projet de la requérante, il y est également indiqué que par une délibération du conseil municipal en date du 14 novembre 2010, il a été décidé que l'emplacement réservé n°11 est supprimé et toute allusion à la création d'un carrefour giratoire sera exclue du dossier ; qu'aucun dispositif d'accès précis n'était donc plus prévu par le plan d'occupation des sols ; que, par suite, c'est à tort que le maire de la commune de Deyvillers a indiqué dans le certificat d'urbanisme en litige que l'accès prévu par l'association depuis la RD 420, en l'occurrence un tourne à gauche, n'était pas le dispositif prévu par le plan d'occupation des sols ; que le certificat contesté en tant qu'il comporte cette réserve est donc entaché d'erreur de fait et doit être annulé ; que l'association requérante est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a rejeté ce moyen ;

Sur les prescriptions du cadre 9 :

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme : A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ; qu'aux termes de l'article de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'Etat, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. (...) ; qu'aux termes de l'article A. 410-4 du même code : Le certificat d'urbanisme précise : (...)e) Si un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis ;(...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas des dispositions précitées ni d'aucune autre disposition que la mention selon laquelle un sursis à statuer serait susceptible d'être opposé portée sur un certificat d'urbanisme délivré sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme doive être motivée ; que le moyen tiré du défaut d'une telle motivation ne peut donc qu'être rejeté ;

Considérant, en second lieu, que par une délibération en date du 21 septembre 2007, le conseil municipal de la commune de Deyvillers a prescrit la révision du plan local d'urbanisme afin de le rendre compatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale (SCOT) des Vosges centrales, lequel préconisait notamment la réduction des zones susceptibles d'accueillir des activités économiques et la limitation de l'urbanisation en centre bourg ; qu'il ressort également des pièces du dossier et plus particulièrement du plan d'aménagement et développement durable (PADD), dont les orientations ont été débattues lors de la séance du conseil municipal du 6 février 2008, que la volonté de la commune, pour mettre son document d'urbanisme en compatibilité avec le SCOT, a été de réduire les zones à vocation économique dont la zone 2NAad et de limiter la constructibilité au nord de la RN 420 en dehors de l'enveloppe bâtie actuelle sauf pour l'accueil ou le maintien des activités économiques dans des limites compatibles avec les prescriptions du SCOT ; que le certificat d'urbanisme qui a été sollicité par l'association requérante portait sur le projet de construction d'un établissement de culte et de ses dépendances sur une parcelle cadastrée section AM n°167 d'une superficie de 64 067 m² ; que cette parcelle, classée en zone 2NAad, se situe au nord de la RD 420 en dehors du centre bâti de la commune ; que dans ces conditions, compte tenu de la possibilité pour ce projet de compromettre l'exécution du plan en cours de révision, le maire de la commune de Deyvillers a pu légalement, sur le fondement des dispositions précitées du code de l'urbanisme, mentionner dans le certificat d'urbanisme qu'il a délivré le 18 mars 2008 la possible opposition d'un sursis à statuer à une demande ultérieure de permis de construire ; que le classement final de ladite parcelle en zone naturelle à l'issue de la procédure de révision est sans influence sur la décision en litige dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; que le moyen tiré de l'illégalité du certificat d'urbanisme en tant qu'il contient une telle mention doit en conséquence être rejeté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations susvisées, qui n'est pas assorti des précisions nécessaires pour en apprécier le bien-fondé, ne peut qu'être rejeté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; que cette disposition interdit que soit appliqué un traitement différent, dans l'exercice ou la jouissance d'un droit reconnu par la convention, à des personnes placées dans une situation comparable, sans justification objective et raisonnable ; qu'au soutien de son moyen, l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE ne fait valoir aucune situation comparable à laquelle il aurait été appliqué un traitement différent ; que le moyen susvisé ne peut par suite qu'être écarté ;

En ce qui concerne les moyens tirés des articles 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE ne peut utilement soutenir qu'eu égard à son objet, la décision en litige méconnaîtrait les stipulations susvisées qui protègent respectivement la liberté d'expression et de réunion ;

En ce qui concerne le moyen tiré du détournement de pouvoir :

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme positif du 18 mars 2008 en tant qu'il énonce, dans le cadre 10, des réserves relatives aux délaissés et à l'accès ; que le jugement et le certificat d'urbanisme doivent être annulés dans cette mesure ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant au bénéfice desdites dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le certificat d'urbanisme positif du 18 mars 2008 en tant qu'il précise: - le principe général de desserte interne figurant sur le plan masse de l'opération sous forme d'esquisse ne garantit pas la desserte des parcelles enclavées au nord-ouest du secteur ;- l'accès au projet depuis la RD 420 n'est pas le dispositif prévu par le P O S valant P L U est annulé.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy susvisé en date du 31 août 2009 est annulé en ce qu'il est contraire à l'article 1er.

Article 3 : Le surplus de la requête et les conclusions la commune de Deyvillers tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION REGIONALE POUR LE CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE L'EST DE LA FRANCE et à la commune de Deyvillers.

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N°09NC01650


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01650
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-11-04;09nc01650 ?
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