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11/03/2010 | FRANCE | N°08NC00253

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 11 mars 2010, 08NC00253


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2008, complétée par des mémoires, enregistrés les 4 février 2009 et 5 février 2010, présentés pour la COMMUNE DE SOUCHT, représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Jean-Charles et Matthieu Seyve ;

La COMMUNE DE SOUCHT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 18 décembre 2007 en tant qu'il l'a condamnée à payer des intérêts moratoires à la société Reiser ;

2°) de rejeter les demandes présentées à ce titre devant

le Tribunal par la société Reiser ;

3°) de mettre à la charge de la société Reiser le paie...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2008, complétée par des mémoires, enregistrés les 4 février 2009 et 5 février 2010, présentés pour la COMMUNE DE SOUCHT, représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Jean-Charles et Matthieu Seyve ;

La COMMUNE DE SOUCHT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 18 décembre 2007 en tant qu'il l'a condamnée à payer des intérêts moratoires à la société Reiser ;

2°) de rejeter les demandes présentées à ce titre devant le Tribunal par la société Reiser ;

3°) de mettre à la charge de la société Reiser le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a indiqué le Tribunal, elle ne porte aucune responsabilité dans les délais intervenus entre la fin des travaux et leur règlement ;

- le Tribunal a estimé à tort que la facture en date du 30 juin 2002 relative aux travaux initialement prévus par le marché, devait être analysée comme une demande d'acompte et non comme un décompte final dès lors qu'intitulée décompte définitif, elle correspondait à la fois aux travaux prévus aux marchés et aux travaux supplémentaires ;

- le percepteur ne pouvait régler les sommes dues au titre des travaux supplémentaires qu'après établissement d'un avenant et des factures propres à cet avenant ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 20 décembre 2008 et le 10 décembre 2009, présentés pour la société Reiser, agissant par son gérant, par la SELARL Soler-Couteaux et Llorens ; la société Reiser conclut :

- au rejet de la requête ;

- par la voie de conclusions d'appel incident à la condamnation de la COMMUNE DE SOUCHT à lui verser la somme de 4 894,13 euros TTC au titre de la révision des prix ;

- à ce que soit mis à la charge de la COMMUNE DE SOUCHT le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à bon droit que le Tribunal a requalifié la facture du 29 juin 2002 et fait application de l'article 162 du code des marchés publics ; que le dépassement du délai de quarante-cinq jours imparti au maître de l'ouvrage, qu'il s'agisse du paiement d'acompte ou du règlement du marché, ouvre de plein droit au bénéfice du cocontractant le paiement d'intérêts moratoires ; que la commune avait obligation de payer les travaux supplémentaires dès lors qu'ils avaient été réalisés sur son ordre et étaient achevés ; que contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal elle justifie de la réalisation de travaux après le 10 août 2001 ;

Vu la lettre du 11 janvier 2010, informant les parties que la Cour est susceptible de relever d'office le motif tiré de l'irrecevabilité des conclusions d'appel incident de la société Reiser ;

Vu, enregistrée le 26 janvier 2010, la réponse au moyen d'ordre public présentée pour la société Reiser par Me Llorens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le cahier des clauses administratives générales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2010 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Robin, avocat de la COMMUNE DE SOUCHT, et de Me Brignatz, avocat de la société Reiser ;

Sur la révision des prix :

Considérant que les conclusions d'appel incident, enregistrées postérieurement au délai d'appel, présentées par la société Reiser tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il rejette sa demande de condamnation de la COMMUNE DE SOUCHT à lui verser la somme de 4 894,13 euros au titre de la révision des prix du marché soulèvent un litige distinct de celui sur lequel porte l'appel principal de la commune qui ne conteste le jugement qu'en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société Reiser des intérêts moratoires ; qu'elles ne sont par suite pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les intérêts moratoires :

Considérant qu'aux termes de l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales applicables aux travaux : Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci après : / -quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final / - trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde ; qu'aux termes de l'article 178 du code des marchés publics applicable aux faits de l'espèce : I. - L'administration contractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser trente-cinq jours ; toutefois, pour le solde de certaines catégories de marchés, un délai plus long peut être fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances. Ce délai ne peut être supérieur à trois mois. (...) II. - Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au quinzième jour inclus suivant la date du mandatement du principal. Toutefois, dans le cas où le mandatement est effectué hors du délai prévu au présent article, lorsque les intérêts moratoires n'ont pas été mandatés en même temps que le principal et que la date du mandatement n'a pas été communiquée au titulaire, les intérêts moratoires sont dus jusqu'à ce que les fonds soient mis à la disposition du titulaire. Le défaut de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires lors du mandatement du principal entraîne une majoration de 2 p. 100 du montant de ces intérêts par mois de retard. Le retard auquel s'applique le pourcentage est calculé par mois entiers décomptés de quantième à quantième. Toute période inférieure à un mois entier est comptée pour un mois entier. ;

Considérant qu'ainsi, le défaut de mandatement du solde d'un marché dans les délais qu'il prévoit fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires ; que la circonstance que le solde du marché ne puisse être établi par les parties elles-mêmes est sans incidence sur le point de départ de ces intérêts qui doit être fixé à la date à laquelle ce solde aurait dû être établi ; qu'il en va autrement, sans préjudice des stipulations du marché, que si le retard dans l'établissement du solde est imputable au titulaire du marché, le point de départ de ces intérêts étant alors fixé à la date à laquelle le juge est saisi en vue du règlement du litige ;

Considérant que la société Reiser a été attributaire de deux marchés correspondant aux lots n°5 menuiseries extérieures et n°10 menuiseries intérieures des travaux d'extension de la salle polyvalente de la COMMUNE DE SOUCHT ; que des travaux supplémentaires ont été demandés à la société par la commune, maître d'ouvrage ; qu'il résulte de l'instruction que la société Reiser, après avoir achevé les travaux, a établi le 29 juin 2002 un premier projet de décompte final ; que compte tenu du désaccord du maître d'ouvrage sur les prix des travaux supplémentaires et suite à une réunion qui s'est tenue le 24 octobre 2002, la société a réalisé un second décompte le 28 octobre 2002, sur la base duquel des avenants ont été conclus le 21 novembre 2002 ; que la réception des travaux sans réserve a eu lieu le 26 novembre 2002 ; qu'à cette date, le maître d'ouvrage aurait pu notifier à l'entreprise le décompte général dès lors qu'il était déjà en possession du projet de décompte final notifié avant les opérations de réception et alors même que l'article 13.32 du CCAG stipule que ce décompte est remis au maître d'oeuvre postérieurement à la réception ; que le retard dans l'établissement du solde du marché n'est ainsi pas imputable à la société Reiser qui avait produit un projet de décompte final suite aux accords relatifs aux prix des travaux supplémentaires qui ont donné lieu à la signature d'avenants ; que la date de la réception des travaux a donc fait courir le délai de quarante-cinq jours au cours duquel la COMMUNE DE SOUCHT aurait dû notifier à l'entreprise le décompte général ; que ce délai a expiré le 10 janvier 2003 ; que la personne publique était ensuite tenue de mandater le solde du marché avant l'expiration du délai de trente cinq jours prévu par l'article 178 du code des marchés publics précité, soit avant le 14 février 2003 ; qu'il résulte de ce qui précède que les intérêts moratoires étaient dus à compter de cette date ;

Considérant que la société REISER a ainsi droit, dans la limite de 2 717,63 euros, aux intérêts moratoires sur le solde dû, d'une part, sur les travaux des marchés initiaux pour des montants de 335,91 euros TTC, au titre du lot n°5 et 3 099,34 euros TTC, au titre du lot n°10 à compter du 14 février 2003 jusqu'au 17 avril 2003 et, d'autre part, sur les travaux supplémentaires pour des montants de 1 837,06 euros TTC, au titre du lot n°5, et 23 706,65 euros TTC, au titre du lot n°10, à compter du 14 février 2003 jusqu'au 8 août 2003 ; qu'en l'absence de tout mandatement des intérêts moratoires lors du paiement du principal, la société REISER a également droit, à compter respectivement du 2 avril et du 24 juillet 2003, à la majoration de 2 % par mois de retard du montant de ces intérêts, prévue par les dispositions susvisées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SOUCHT est fondée à demander l'annulation du jugement du 18 décembre 2007 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il est contraire aux motifs ci-dessus exposés ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La COMMUNE DE SOUCHT paiera à la société Reiser, dans la limite de 2 717,63 euros (deux mille sept cent dix sept euros et soixante trois centimes), les intérêts moratoires sur les sommes de 335,91 euros (trois cent trente cinq euros quatre-vingt onze centimes) et 3 099,34 euros (trois mille quatre-vingt dix neuf euros trente quatre centimes) à compter du 14 février jusqu'au 17 avril 2003 ainsi qu'une majoration de 2 % du montant desdits intérêts par mois de retard à compter du 2 avril 2003. Elle paiera également les intérêts moratoires sur les sommes de 1 837,06 euros (mille huit cent trente sept euros six centimes) et 23 706,65 euros (vingt trois mille sept cent six euros soixante cinq centimes) à compter du 14 février 2003 jusqu'au 8 août 2003 ainsi qu'une majoration de 2 % desdits intérêts par mois de retard à compter du 24 juillet 2003.

Article 2 : Le jugement du 18 décembre 2007 du Tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE DE SOUCHT et les conclusions de la société Reiser sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SOUCHT et à la société Reiser.

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08NC00253


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC00253
Date de la décision : 11/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SCP J-C et M. SEYVE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-03-11;08nc00253 ?
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