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11/02/2010 | FRANCE | N°08NC00628

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 11 février 2010, 08NC00628


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2008, complétée par le mémoire enregistré le 22 mai 2009, présentée pour la COMMUNE DE LA BRESSE (88250), représentée par son maire en exercice, par Me Gartner ; la COMMUNE DE LA BRESSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 26 février 2008 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a limité à la somme de 170 479,09 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 7 juillet 2005, le montant de la condamnation solidaire mise à la charge de la S.A. Trapdid-Bigoni, de la S.A. Molinari et de l'Etat au titre d

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Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2008, complétée par le mémoire enregistré le 22 mai 2009, présentée pour la COMMUNE DE LA BRESSE (88250), représentée par son maire en exercice, par Me Gartner ; la COMMUNE DE LA BRESSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 26 février 2008 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a limité à la somme de 170 479,09 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 7 juillet 2005, le montant de la condamnation solidaire mise à la charge de la S.A. Trapdid-Bigoni, de la S.A. Molinari et de l'Etat au titre des dommages subis du fait des travaux d'aménagement d'un terrain de football ;

2°) de condamner solidairement la S.A. Trapdid-Bigoni, la S.A. Molinari et l'Etat à lui payer une somme de 267 682,60 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la présente requête d'appel ;

3°) de mettre à la charge de la S.A. Trapdid-Bigoni, la S.A. Molinari et l'Etat la somme de 750 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- les conditions pour engager la responsabilité décennale des constructeurs étaient bien remplies ;

- c'est à bon droit que les premiers juges ont solidairement condamné à ce titre la S.A. Trapdid-Bigoni, la S.A. Molinari et l'Etat ;

- l'évaluation du préjudice subi retenue par les premiers juges est erronée ;

- les premiers juges se sont bornés à reprendre l'évaluation de l'expert ;

- l'intervention d'une maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réfection était nécessaire ;

- elle est fondée à demander la réparation intégrale de son préjudice matériel ;

- durant 4 ans, les services techniques et le public n'ont pu accéder à la partie longitudinale du terrain d'où un premier préjudice de 10 000 € pour troubles de jouissance et un second de 10 000 € pour l'indemnisation du surcroît de travail imposé aux services municipaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 25 juillet 2008 et 19 août 2009, présentés pour la S.A. Trapid-Bigoni, par Me Lebon ;

La S.A. Trapdid-Bigoni demande à la Cour :

1°) de rejeter l'appel principal de la COMMUNE DE LA BRESSE ;

2°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a mis à sa charge des frais de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réfection ;

3°) de condamner l'Etat à la garantir de toutes les condamnations principales, intérêts et frais qui ont été prononcées à son encontre et qui le seraient dans le cadre de la procédure d'appel et, subsidiairement, à la garantir d'une part qui ne saurait être inférieure à 90 % ;

4°) de condamner l'Etat à lui rembourser les frais qu'elle a exposés au titre du préfinancement des travaux urgents et mesures conservatoires jugés utiles par l'expert pour un montant de 46 010,91 euros avec intérêts de droit à compter de la demande formulée devant les premiers juges ;

5°) de condamner l'Etat au remboursement des frais et honoraires d'expert ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat et de tout succombant définitif, in solidum, la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- aucune faute ne peut lui être imputée, notamment un défaut de conseil, les désordres résultant d'un problème de conception engageant la responsabilité de Bona Sabla et de la DDE ;

- l'évaluation des travaux de réfection faite par l'expert l'a été après consultation d'une entreprise et incorporation d'une plus-value technique, la réclamation de la COMMUNE DE LA BRESSE aboutit à une majoration considérable et techniquement injustifiée des travaux ;

- la direction départementale de l'équipement (D.E.E.) des Vosges se devait, en tant que maître d'oeuvre, de vérifier si le type d'éléments en béton non armé qui a été utilisé pour la construction des murs de soutènement, satisfaisait aux critères de solidité nécessaires ;

- l'expert ne retenant aucune faute à son égard, elle est bien fondée à demander, par la voie de l'appel incident, la condamnation de la DDE à la garantir d'au moins 90 % de ces condamnations ;

- le recours à un maître d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réfection n'était pas une nécessité;

- subsidiairement, la rémunération du maître d'oeuvre ne devrait pas excéder 3 % de l'estimation des travaux faite par l'expert ;

- les travaux urgents et conservatoires qu'elle a entrepris avaient pour but d'assurer la sécurité des travaux et des biens et revêtaient donc un caractère utile ;

- ces travaux doivent être mis à la charge du maître d'oeuvre ;

- il appartient au seul juge administratif de se prononcer sur les rapports entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur et donc sur la charge des dépens quand bien même l'expert aurait été désigné par le tribunal de commerce ;

- ses appels incidents et provoqués sont parfaitement recevables ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2009, par lequel le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire conclut au rejet de l'appel principal de la COMMUNE DE LA BRESSE et des appels provoqués de la S.A. Trapdid-Bigoni et de la S.A.R.L. Molinari ;

Il soutient que :

- la réparation due au maître de l'ouvrage en application des principes découlant des articles 1792 et 2270 du code civil ne saurait comporter des travaux excédant par leur importance et leur coût la remise en ordre de l'ouvrage tel qu'il avait été commandé ;

- les premiers juges ont considéré que l'indemnité mise à la charge des constructeurs avait été calculée de manière à tenir compte des désordres et à permettre un ouvrage mieux conçu ;

- la D.D.E. des Vosges est intervenue dans le cadre d'une mission normalisée M2 qui la dispensait des études d'exécution et des spécifications techniques détaillées ;

- la D.D.E. a exprimé des réserves sur le choix de matériau opéré par la S.A. Trapdid-Bigoni ;

- l'ensemble des conclusions de la S.A. Trapdid-Bigoni à l'encontre de l'Etat sont des conclusions d'intimé à intimé qui ont le caractère d'un appel provoqué ;

- l'appel principal de LA COMMUNE DE LA BRESSE n'étant pas fondé, l'appel provoqué de la S.A. Trapdid-Bigoni est irrecevable, comme l'est l'appel provoqué de la S.A.R.L. Molinari ;

- la S.A. Trapdid-Bigoni est, en tout état de cause, responsable de la qualité des matériaux produits par son fournisseur, alors même qu'aucune faute n'aurait été commise dans l'exécution des travaux ;

- les travaux conservatoires effectués par la S.A. Trapdid-Bigoni ne présentaient pas, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, un caractère utile ;

- les frais d'expertise ne peuvent être arrêtés que par le juge judiciaire dans le cadre du litige qui oppose la S.A. Trapdid-Bigoni à son fournisseur ;

Vu la lettre, enregistrée le 30 mars 2009, de la S.A.R.L. Molinari ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2010 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Rezki, avocat de la S.A. Trapdid-Bigoni ;

Considérant que par un marché du 5 septembre 1996, la COMMUNE DE LA BRESSE a confié la réalisation de deux murs de soutènement du stade de football du Planot-Paris à un groupement solidaire d'entreprises composé de la S.A. Trapdid-Bigoni, mandataire du groupement, et de la S.A.R.L. Molinari ; que la direction départementale de l'équipement des Vosges a été chargée d'une mission de maîtrise d'oeuvre de type M 2 ; que la réception des travaux a été prononcée sans réserve le 30 avril 1997 ; qu'à la suite de désordres, apparus sur les ouvrages en avril 1999, un des murs de soutènement s'est effondré sur plusieurs mètres carrés en février 2002 ; que par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Nancy a, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, condamné solidairement l'Etat, la S.A. Trapdid-Bigoni et la SA Molinari à verser à la COMMUNE DE LA BRESSE la somme de 170 479,09 euros ; qu'il a condamné L'Etat et la SA Trapdid-Bigoni à se garantir mutuellement des condamnations prononcées à leur encontre à concurrence respectivement de 30 % et de 70% ;

En ce qui concerne l'appel principal de la COMMUNE DE LA BRESSE :

Considérant, en premier lieu, que le coût des travaux de réfection des ouvrages doit être évalué à la date à laquelle la cause et l'étendue des dommages étant connues, il pouvait être procédé auxdits travaux ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, réalisé le 30 mars 2005, que les coûts de la reconstruction des murs, seule solution permettant de mettre un terme aux désordres, a été estimé par l'expert, au vu d'un devis, à la somme de 154 980,99 € HT ; qu'en se bornant en soutenir qu'elle a dû en fin de compte supporter la somme de 247 682,6 € HT pour la réalisation desdits travaux en application d'un nouveau marché signé le 22 mai 2007, la COMMUNE DE LA BRESSE ne justifie pas de la nécessité de ce surcoût au regard de l'estimation faite par l'expert ; que par suite, elle n'établit pas la réalité de son préjudice ;

Considérant en second lieu que LA COMMUNE DE LA BRESSE fait valoir qu'elle a subi un trouble de jouissance du fait de l'impossibilité des usagers et des services municipaux d'accéder à la partie longitudinale du stade et que les désordres litigieux ont généré, pour ses agents, un surcroît de travail ; que ces deux chefs de préjudice ne sont cependant pas établis, la requérante ne faisant état d'aucune dépense ou coût précis relatifs aux troubles dont elle s'estime être victime ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE LA BRESSE n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a limité le montant des travaux de réfection à une somme de 154 980,99 euros H.T. ;

En ce qui concerne l'appel incident de la S.A. Trapdid-Bigoni :

Considérant que, compte tenu de la technicité des travaux à entreprendre et de la surveillance qu'il convenait d'apporter lors de leur exécution, les données contenues dans le rapport d'expertise ne suffisaient pas, contrairement à ce que soutient la S.A. Trapdid-Bigoni, à assurer un bon déroulement du chantier ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont intégré dans l'indemnisation accordée à la COMMUNE DE LA BRESSE des honoraires de maîtrise d'oeuvre dont l'exagération des coûts n'est pas établie ; que les conclusions de la S.A. Trapdid-Bigoni, tendant à ce que l'indemnisation à laquelle elle a été condamnée soit minorée des frais de maîtrise d'oeuvre, doivent en conséquence être rejetées ;

En ce qui concerne l'appel provoqué de la S.A. Trapdid-Bigoni :

Considérant, d'une part, qu'en l'absence d'aggravation de sa situation par la requête d'appel de la COMMUNE DE LA BRESSE, les conclusions d'appel provoqué présentées par la S.A. Trapdid-Bigoni, après l'expiration du délai d'appel, tendant à la condamnation de l'Etat à la garantir des condamnations prononcées à son encontre et à ce que les frais d'expertise soient mis à sa charge, sont irrecevables ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des motifs du jugement contesté que les premiers juges ont jugé que les conclusions de la S.A. Trapdid-Bigoni tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser des travaux urgents et des mesures conservatoires étaient irrecevables ; que la COMMUNE DE LA BRESSE ne contestant pas en appel le motif d'irrecevabilité retenu par le Tribunal, il n'appartient pas à la Cour de s'interroger d'office sur le bien-fondé de cette irrecevabilité ; qu'il s'ensuit que ces conclusions ne peuvent, en tout état de cause, être que rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que, d'une part, l'Etat et la S.A.R.L. Molinari, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnés à verser à la COMMUNE DE LA BRESSE, la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et d'autre part, pour les même motifs, l'Etat soit condamné à verser à la S.A. Trapdid-Bigoni la somme qu'elle réclame sur le fondement des mêmes dispositions ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE LA BRESSE et de la S.A. Trapdid-Bigoni les sommes que chacune réclame au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LA BRESSE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la S.A. Trapdid-Bigoni sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LA BRESSE, à la S.A. Trapdid-Bigoni, à la S.A.R.L. Molinari et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

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08NC00628


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC00628
Date de la décision : 11/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-02-11;08nc00628 ?
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