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08/10/2009 | FRANCE | N°08NC01631

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 octobre 2009, 08NC01631


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2008, présentée pour l'Etat, par le PREFET DU BAS-RHIN ;

Le PREFET DU BAS-RHIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802927 du 9 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, sur demande de M. A, l'arrêté en date du 3 avril 2008 par lequel le PREFET du BAS-RHIN lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que :

- il n'était p

as tenu d'examiner d'office la situation de M. A au regard de l'article

L. 313-14 du code de ...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2008, présentée pour l'Etat, par le PREFET DU BAS-RHIN ;

Le PREFET DU BAS-RHIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802927 du 9 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, sur demande de M. A, l'arrêté en date du 3 avril 2008 par lequel le PREFET du BAS-RHIN lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que :

- il n'était pas tenu d'examiner d'office la situation de M. A au regard de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni en conséquence de saisir la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour ;

- M. A peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ;

- le refus de séjour, au regard de la situation familiale de M. A, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'éloignement n'est pas contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaquées ;

Vu, enregistré le 10 juin 2009, le mémoire en défense présenté pour M. A, par

Me Mengus ;

M. A conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au PREFET du BAS-RHIN de lui délivrer un titre de séjour d'un an, à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 500 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le Tribunal a jugé que l'arrêté du préfet avait porté à son droit à une vie familiale normale une atteinte excessive ;

- la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour aurait dû être saisie ;

- il ne pourra accéder aux soins dont il a besoin en Algérie ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 23 janvier 2009, admettant

M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2009 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Erdogan, avocat de M. A ;

Sur les conclusions d'annulation :

- En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le Tribunal :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

Considérant que si M. A réside sur le territoire depuis 2001, qu'il a bénéficié à compter de 2003 de titres de séjour en raison de son état de santé dont des troubles ophtalmologiques graves et que son frère, de nationalité française, chez lequel il vit, lui procure assistance et soutien, il ressort des pièces du dossier que sa mère, ses quatre enfants mineurs, un frère et deux de ses soeurs résident en Algérie ; que dans ces conditions, compte tenu des conditions de séjour de l'intéressé jusqu'alors justifiées par son état de santé et de la présence de plusieurs membres de sa famille en Algérie, la décision par laquelle le préfet du Bas-Rhin lui a refusé un certificat de résidence vie privée et familiale n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, ni n'est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET du BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision du 3 avril 2008 par laquelle il a refusé la carte de résident à

M. A, le Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur la circonstance que cette décision avait été prise en violation des stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié et était entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant en première instance qu'en appel par

M. A à l'encontre de ladite décision ;

- En ce qui concerne les autres moyens :

Sur la légalité du refus de certificat de résidence :

Considérant, en premier lieu, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle ; que M. A ne peut donc utilement se prévaloir des dispositions particulières de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile introduit par la loi du 24 juillet 2006 relative à la maîtrise de l'immigration et à l'intégration instituant, après avis de la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour, une admission au séjour justifiée par des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié : le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) : 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, qui souffrait d'une éviscération de l'oeil gauche, a suivi des soins ophtalmiques importants et a bénéficié de la mise en place d'une prothèse ; qu'il présente un oeil fonctionnellement non voyant équipé par épiprothèse et une acuité visuelle de l'oeil droit réduite à 1/10ème ; qu'un traitement par collyre, de lutte contre la sécheresse oculaire et antiseptique, lui a été prescrit ; qu'il présente par ailleurs des troubles anxio-dépressifs nécessitant la prise d'antidépresseurs et de neuroleptiques ; que si c'est à l'administration, qui ne conteste pas la gravité des risques qu'entraînerait pour l'intéressé une éventuelle interruption des traitements qu'il suit en France, de démontrer qu' il existe des possibilités de traitement approprié dans son pays d'origine, le préfet produit l'avis du médecin inspecteur de santé publique en date du 28 janvier 2008 qui précise que l'état de santé de M. A, qui nécessite des soins de suite, peut être traité dans son pays d'origine ; que M. A n'établit pas que les collyres qui lui ont été prescrits ne sont pas disponibles en Algérie ; que s'agissant des troubles psychiques, le PREFET du BAS-RHIN démontre, au moyen d'une fiche établie le 25 octobre 2006 par le ministère de l'intérieur que, de façon générale, les états dépressifs et les états de stress post-traumatique sont traités par des centres hospitaliers sur tout le territoire algérien ; que le bénéfice d'une protection sociale importante en France est sans influence sur la légalité du refus de titre pour raisons de santé ; que par suite M. A n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant le certificat de résidence étranger malade , le préfet a méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien ;

Considérant, en troisième lieu, qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, rappelées ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant à M. A le séjour, le PREFET du BAS-RHIN a porté à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, il y a lieu de rejeter les moyens tirés du défaut de saisine de la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour, de la méconnaissance de l'article 6 5) de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que M. A, comme il a été dit ci-avant, devrait pouvoir suivre, en Algérie, un traitement adapté à son état de santé ; que M. A n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement contesté et de rejeter la demande de M. A ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la requête aux fins d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être que rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°0802927 du 9 octobre 2008 susvisé est annulé.

Article 2 : La demande de M. A est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et développement solidaire et à M. Henni A.

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08NC01631


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 08/10/2009
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08NC01631
Numéro NOR : CETATEXT000021345241 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-10-08;08nc01631 ?
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