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12/03/2009 | FRANCE | N°08NC00141

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 12 mars 2009, 08NC00141


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 janvier 2008, complétée par mémoire enregistré le 4 juin 2008, présentée pour la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE (MACIF), ayant son siège à Niort (79000) et une direction régionale 21 avenue de Luxembourg à Illzach (68317), agissant par son représentant légal, par Me Bourgaux, avocat ;

La MACIF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 25 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui ve

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 janvier 2008, complétée par mémoire enregistré le 4 juin 2008, présentée pour la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE (MACIF), ayant son siège à Niort (79000) et une direction régionale 21 avenue de Luxembourg à Illzach (68317), agissant par son représentant légal, par Me Bourgaux, avocat ;

La MACIF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 25 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 10 440 euros majorée des intérêts au taux légal, les intérêts étant eux-mêmes capitalisés, en réparation du préjudice subi par M. X du fait de l'incendie de son véhicule le 12 novembre 2005 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 440 euros majorée des intérêts au taux légal, à compter du 17 novembre 2006, les intérêts étant eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée sur le fondement de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; les violences qui se sont exercées sur les biens sont la conséquence directe et certaine des rassemblements publics, protestataires et revendicatifs des jeunes des cités ; l'état d'urgence qui a été décrété démontre le caractère visible et non clandestin des mouvements de protestation ; l'incendie survenu le 12 novembre a été le fait d'un groupe de jeunes parfaitement identifiés ;

- la responsabilité sans faute de l'Etat du fait des attroupements ou rassemblements est d'application large ; l'obligation pour l'Etat d'assurer la sécurité des personnes et des biens s'exerce quelle que soit la nature du rassemblement et quels que soient les risques sociaux en cause ;

- subsidiairement, la responsabilité de l'Etat est engagée à raison d'une rupture d'égalité devant les charges publiques ;

- plus subsidiairement, la responsabilité de l'Etat est engagée sur le fondement d'une faute, en raison de la carence à prendre les mesures destinées à restaurer l'ordre public ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 16 mai et le 23 juillet 2008, présentés par le préfet du Haut-Rhin ; le préfet conclut au rejet de la requête,

Il soutient que la condition liée à la présence d'un attroupement ou d'un rassemblement n'est pas remplie ; que les opérations commando perpétrées, comme ce fut le cas, par des groupes opérant subrepticement et disparaissant leur forfait accompli ne rentrent pas dans le champ des prévisions de la loi ; que la responsabilité de l'Etat pour rupture d'égalité devant les charges publiques ne saurait davantage être retenue, en l'absence de lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'action de l'administration ; qu'aucune faute lourde n'est imputable aux services de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2009 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me Dupied, avocat de la MACIF,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales : L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. » ; que l'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou de délits déterminés commis par des rassemblements ou des attroupements précisément identifiés ; que lesdits dommages doivent revêtir un caractère accidentel et survenir à l'occasion de l'action dont la finalité n'était pas de causer des dommages aux tiers ;

Considérant que le véhicule appartenant à M. X, au droit duquel intervient la MACIF en sa qualité d'assureur, a été incendié le 12 novembre 2005 à Mulhouse où réside l'intéressé ; qu'en admettant même que cette destruction ait été perpétrée, sur fond d'émeutes urbaines, avec le concours de plusieurs individus, elle présente la caractère d'une action préméditée dont la finalité était de causer des dommages aux tiers ; que lesdits dommages ne peuvent, dès lors, être regardés comme étant le fait d'un attroupement ou d'un rassemblement au sens des dispositions précitées de l'article L. 2216-3 précité du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, la MACIF n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de l'Etat sur le fondement desdites dispositions ;

Considérant, en second lieu, que l'action menée par les auteurs du sinistre est la cause directe du dommage subi par la MACIF ; qu'en outre, eu égard au contexte particulier de violences urbaines qu'a connu le territoire national au cours du mois de novembre 2005, les autorités investies du pouvoir de police se sont trouvées dans l'impossibilité de prévenir, compte tenu de leur nature et de leur soudaineté, les agissements en cause lesquels ne peuvent donc être imputés à une carence de l'Etat ; qu'ainsi, en l'absence d'un lien de causalité direct entre le dommage et le fait de l'administration, la responsabilité de l'Etat ne peut être recherchée ni sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques, ni sur celui de la faute ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la MACIF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat , qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la MACIF demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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08NC00141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC00141
Date de la décision : 12/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : BOURGAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-03-12;08nc00141 ?
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