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26/06/2008 | FRANCE | N°07NC01584

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 26 juin 2008, 07NC01584


Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2007, présentée pour Mme Rada X, demeurant ..., par Me Moser ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702976 en date du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mai 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer une carte de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé la Roumanie comme pays de destination ;

2°) d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour

temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à ...

Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2007, présentée pour Mme Rada X, demeurant ..., par Me Moser ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702976 en date du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mai 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer une carte de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé la Roumanie comme pays de destination ;

2°) d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient :

- qu'elle peut prétendre à la délivrance d'une carte de séjour temporaire compte tenu de son état de santé ;

- que le refus de séjour qui lui a été opposé méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article

L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2008, présenté par le préfet du Haut-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens énoncés par la requérante ne sont pas fondés ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la cour, fixant la clôture de l'instruction au 31 mars 2008 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2008 :

- le rapport de M. Vincent, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, de nationalité roumaine, qui ne conteste pas ne pas entrer dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, conclut à l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mai 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «... la carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» est délivrée de plein droit :... 7° A l'étranger... dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus...» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, entrée en France en 1999, a été accueillie par sa nièce, Mme Raducanu, titulaire d'une carte de résident, et s'occupe des deux enfants de celle-ci, de nationalité française, dont un garçon, âgé de 10 ans et présentant un trouble mental sévère ; que Mme X apporte, notamment par la production d'un certificat médical en date du 31 mai 2007, de fortes présomptions tendant à faire apparaître qu'elle n'a jamais quitté la France depuis son arrivée, nonobstant la prise à son encontre d'un arrêté de reconduite à la frontière en date du 20 juin 2000, dont il n'est pas allégué qu'il ait été exécuté ; qu'il résulte du certificat médical susrappelé que l'état de l'enfant de Mme Raducanu nécessite une surveillance et un accompagnement constants par un adulte, que seule la requérante est en mesure d'exercer pendant les heures de travail de Mme Raducanu, elle-même seule à pouvoir subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants ; que s'il n'est pas contesté que Mme X, veuve et sans enfant, n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, en tant que deux de ses soeurs y demeurent, il ne ressort pas des pièces du dossier que ses liens avec celles-ci, à supposer qu'ils aient été maintenus, seraient d'une intensité telle qu'elle pourrait retrouver auprès d'elles un degré comparable de relations que celui l'unissant à sa nièce et aux enfants de celle-ci ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'eu égard à l'intensité, à l'ancienneté et à la stabilité de ses liens en France ainsi qu'au caractère indispensable de sa présence auprès de sa nièce et de ses enfants, Mme X est fondée à soutenir que la décision attaquée porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et méconnaît ainsi tant les dispositions précitées que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a ainsi lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, d'annuler l'arrêté susrappelé du préfet du Bas-Rhin ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ladite décision ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : «Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution» ;

Considérant que la présente décision implique nécessairement que le préfet du Bas-Rhin délivre à Mme X une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» ; qu'il y a lieu d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de délivrer ce titre de séjour à l'intéressée dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros que demande Mme X au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, à verser à son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 23 octobre 2007 est annulé ainsi que l'arrêté du 18 mai 2007 du préfet du Bas-Rhin.

Article 2 : Le préfet du Bas-Rhin est enjoint de délivrer à Mme X une carte de séjour portant la mention «vie privée et familiale» dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Moser la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celle-ci s'engage à reverser la fraction correspondant à la part contributive de l'Etat de l'aide juridictionnelle perçue par Mme X.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Rada X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 07NC01584


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01584
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : MOSER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-06-26;07nc01584 ?
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