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30/04/2008 | FRANCE | N°07NC01160

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 avril 2008, 07NC01160


Vu la requête enregistrée le 16 août 2007,présentée pour M. Mark X, demeurant ..., par Me Bertin, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 12 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2007du préfet du Doubs lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'invitation à effectuer toute démarche pour trouver un pays où il pourrait être admis et à ce qu'il soit ordonné au préfet d'une part, de lui délivrer une carte de séjour porta

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Vu la requête enregistrée le 16 août 2007,présentée pour M. Mark X, demeurant ..., par Me Bertin, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 12 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2007du préfet du Doubs lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'invitation à effectuer toute démarche pour trouver un pays où il pourrait être admis et à ce qu'il soit ordonné au préfet d'une part, de lui délivrer une carte de séjour portant mention vie privée et familiale, d'autre part, de l'assigner à résidence avec droit au travail ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant mention vie privée et familiale, à titre subsidiaire, de l'assigner à résidence avec droit au travail ;

4°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que

- le refus de titre de séjour emportant obligation de quitter le territoire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet, comme le tribunal, ont estimé à tort que les faits ayant justifié la condamnation pénale n'étaient ni isolés ni réparés par le projet civil et social qu'il a présenté ; il n'est pas suffisant qu'une condamnation pénale soit intervenue ; son comportement délictuel repose sur des faits anciens s'inscrivant dans un contexte particulier, d'isolement familial et affectif ; la condamnation pénale est un acte isolé, démenti par une volonté réelle d'insertion ;

- subsidiairement, il appartenait au préfet du Doubs, préalablement à la décision de refus de titre de séjour, de prononcer une assignation à résidence ou de l'inviter à se rapprocher de pays étrangers susceptibles de l'admettre au séjour ;


Vu le jugement et la décision attaqués ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2008, présenté par le préfet du Doubs ; le préfet conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que M. X ne justifie, ni n'établit qu'il ne peut se rendre dans aucun autre pays que la France ;


Vu, en date du 28 septembre 2007, la décision du bureau de l'aide juridictionnelle près du Tribunal de grande instance de Nancy, (section administrative) accordant à M. X le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Bertin pour le représenter ;


Vu l'ordonnance fixant au 15 mars 2008 la clôture de l'instruction ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole de New-York du 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;




Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2008 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;


Sur la légalité de l'arrêté du 28 février 2007 du préfet du Doubs :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (…)» ;

Considérant que M. X, de nationalité albanaise, entré irrégulièrement en France en juillet 2003 à l'âge de 17 ans, a obtenu, par décision de la Commission de recours des réfugiés, en date du 21 avril 2006, la protection subsidiaire prévue par l'article L. 712-1-b du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si l'intéressé a été condamné, par un jugement du Tribunal correctionnel de Besançon en date du 22 juin 2005, à une peine d'emprisonnement de trois ans dont la moitié avec sursis pour violence aggravée, cette condamnation est liée à des faits isolés, survenus alors que M. X, à peine âgé de vingt ans se trouvait isolé familialement et affectivement et sans encadrement véritable ; qu'au surplus, il ressort des témoignages produits et notamment de celui du directeur d'une entreprise d'insertion que M. X qui a suivi assidûment des cours de français, signé le 19 juin 2006 un contrat d'accueil et d'intégration, obtenu une attestation de formation civique et bénéficié de rapports très favorables dans les activités professionnelles exercées, manifeste une volonté réelle d'intégration à la société française ; qu'ainsi en estimant, pour refuser de délivrer à M. X le titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la présence de l'intéressé constituerait une menace à l'ordre public, le préfet du Doubs a fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : «Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution et qu'aux termes de l'article
L. 911-2 du même code : «Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé» ;

Considérant qu'eu égard aux motifs énoncés ci-dessus et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. X se serait modifiée, en droit ou fait, depuis l'intervention de la décision attaquée, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet du Doubs de délivrer à M. X, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. X de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


DÉCIDE :


Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 12 juin 2007 et l‘arrêté du préfet du Doubs en date du 28 février 2007 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à M. X une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 000 euros (mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mark X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Copie pour information au préfet du Doubs.

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N° 07NC01160


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01160
Date de la décision : 30/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : CABINET BERTIN , LE MEDIATIC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-04-30;07nc01160 ?
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