Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2006, présentée pour M. Didier , demeurant ..., par Me Sarron, avocat ;
M. demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n°0400859 du Tribunal administratif de Nancy en date du 18 avril 2006 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à condamner l'Etat à réparer le préjudice subi à raison du caractère inconstructible de terrains pour lesquels il avait reçu une autorisation de lotir ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 106 566 € avec intérêts légaux à compter du 10 février 2004 ;
3°) de mettre une somme de 2 000 € à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que l'Etat a commis une faute engageant sa responsabilité en lui accordant un permis de lotir sans réserves en ce qui concerne les glissements de terrain alors que la direction départementale de l'équipement disposait depuis plusieurs années d'indications et d'études exposant les risques potentiels de glissements de terrain sur la commune et spécifiant une zone rouge susceptible de mouvements actifs de terrain dans le périmètre loti ;
- que le préfet de Meurthe-et-Moselle a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation propre à engager la responsabilité de l'Etat en n'attirant pas l'attention sur les précautions élémentaires à prendre quant à la réalisation et à la mise en oeuvre de constructions dans cette zone ;
- que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu une faute de sa part en sa qualité de lotisseur, dès lors qu'il s'est entouré de professionnels hommes de l'art pour procéder à l'étude de sol qu'il lui incombait de réaliser et qu'il n'est pas indiqué quelle autre étude il aurait dû faire et en quoi l'étude géotechnique et celle de faisabilité auraient été insuffisantes, ces études n'ayant d'ailleurs fait l'objet de la part de l'administration d'aucune réserve ni demande de complément ;
- que l'autorisation de lotir, qui implique la vérification préalable de ses conditions d'octroi, dont la stabilité du terrain et l'absence de risques, aurait dû être refusée ou assortie de prescriptions spéciales en vertu notamment des articles R. 311-3-1 et R. 111-14-2 du code de l'urbanisme ;
- que son préjudice s'élève à 106 566 €, se décomposant en une perte financière de 76 224 € résultant de l'impossibilité de vendre deux parcelles en terrain à bâtir, en frais de VRD et frais financiers ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 août 2007, présenté par le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables ;
Le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens énoncés par le requérant ne sont pas fondés ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 12 octobre 2007, présenté pour M. , qui conclut aux mêmes fins que sa requête et à ce que l'indemnité à lui payer soit portée à la somme de 119 905 € ;
Il soutient en outre :
- qu'il établit avoir engagé des frais de VRD à hauteur de 24 909 F, 13 266 F, 25 205 F, 125 580 F et 222 381 F ;
- que ses frais financiers sont constitués par le débit de son compte et le solde créditeur totalement absorbé, soit une somme de 3 215 € ;
- qu'il est fondé à être indemnisé des travaux de chaussée et de trottoirs à terminer, représentant une somme de 13 161,50 € ;
- que c'est à tort que le Tribunal administratif a arrêté à 30 000 € l'estimation de la perte due aux parcelles invendues sans expliquer cette évaluation ;
- que son préjudice global doit ainsi être estimé à 76 224 € concernant la perte sur parcelles invendues, à 13 161,50 € concernant les travaux de chaussée et de trottoirs à terminer, à 2/5ème des 60 764,73 € de frais de VRD exposés en pure perte, soit 24 305 €, et à 3 215 € de frais financiers ;
Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la Cour, fixant la clôture de l'instruction au 23 novembre 2007 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2007 :
- le rapport de M. Vincent, président,
- les observations de Me Sarron, avocat de M. ,
- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 24 décembre 1999 modifié le 9 juin 2000, le préfet de Meurthe-et-Moselle a autorisé M. à lotir un terrain de 4 650 m2 dénommé « Les Hurautes » sur le territoire de la commune de Vittonville ; que, toutefois, par lettre du 8 décembre 2000, le préfet a informé le maire de Vittonville, auquel avait été communiqué au mois de juillet précédent un « atlas des glissements de terrain » du département établi en décembre 1999 et faisant apparaître un glissement circulaire actif à l'est du village, correspondant à l'implantation du lotissement, que toute construction nouvelle serait désormais interdite dans les « zones rouges », à l'exception des abris légers sans fondation ; qu'ainsi les lots n° 4 et 5 n'ont pu être vendus en tant que terrains à bâtir ; que, par jugement du 18 avril 2006 dont M. relève appel, le Tribunal administratif de Nancy, après avoir retenu une faute du préfet de Meurthe-et-Moselle pour avoir accordé le permis de lotir sur une zone à risques dont il ne pouvait ignorer l'existence, a estimé que la responsabilité de l'Etat devait être atténuée à concurrence de moitié en raison de la faute du lotisseur pour n'avoir pas fait réaliser une étude de sol et limité par ailleurs l'indemnisation du préjudice subi à la valeur résiduelle des lots n° 4 et 5 et à des frais bancaires s'élevant à 1 932 euros ;
Considérant, en premier lieu, que si M. fait valoir qu'il a subi un préjudice lié à la perte de valeur vénale des lots n° 4 et 5 du fait de leur inconstructibilité, il est constant que, même si cette situation n'avait pas été portée à sa connaissance antérieurement à la décision susrappelée du 24 décembre 1999, le caractère impropre à la construction des terrains dont s'agit préexistait à celle-ci ; que le préjudice allégué à cet égard par le requérant, qu'il estime insuffisamment réparé par le Tribunal administratif, est ainsi en tout état de cause sans lien de causalité avec la faute de l'Etat et ne saurait par suite donner lieu à condamnation de ce dernier à son profit ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que les premiers juges auraient fait une évaluation insuffisante du préjudice subi de ce chef ;
Considérant, en second lieu, que si M. est en revanche fondé à obtenir réparation du préjudice qui résulterait directement de la décision préfectorale en tant que les frais d'aménagement encourus pour viabiliser le lotissement auraient été chiffrés pour cinq lots et non pour les seuls trois lots vendus, il n'est pas contesté que les travaux correspondants aux lots n° 4 et 5, situés en amont des autres par rapport à l'agglomération, n'ont pas été réalisés ; que si M. fait valoir que ces travaux devaient être effectués en deux phases, la seconde phase devant intervenir après la construction d'une majorité de pavillons, et qu'il a été sommé par les acquéreurs des lots n° 1 et 2 d'achever les travaux de voirie devant leur parcelle et qu'ainsi la réalisation de ces travaux aurait été retardée du fait de l'absence de vente des lots n° 4 et 5, il n'établit pas, en admettant même le bien-fondé d'une telle explication, que le coût desdits travaux aurait été plus élevé que celui prévu initialement ; qu'il s'ensuit que sa demande d'actualisation de tels coûts ne saurait être accueillie ; que si le requérant est également fondé à demander l'indemnisation du surcroît de frais financiers qui seraient demeurés à sa charge du fait de l'impossibilité de vendre les lots n° 4 et 5, il n'établit pas en tout état de cause le lien entre les frais de cautionnement dont il fait état et l'évolution de la situation de son compte courant auprès du crédit agricole de Lorraine dont il use pour chiffrer son préjudice ni ne précise davantage en quoi l'évaluation des frais financiers arrêtée par le tribunal serait insuffisante ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient à tort retenu sa responsabilité, dès lors que l'évaluation par le Tribunal, confirmée par la Cour, du seul préjudice résultant directement de la décision litigieuse est en tout état de cause inférieure à l'indemnité globale accordée par le Tribunal, que la requête de M. ne peut qu'être rejetée ; que, par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Didier et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
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06NC01039