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02/08/2007 | FRANCE | N°06NC00347

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 02 août 2007, 06NC00347


Vu la requête enregistrée le 6 mars 2006, complétée par mémoire enregistré le 1er décembre 2006, présentée pour la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC (Aube), représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Colomes ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 29 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de M. Y et de Mme X, l'arrêté du 22 décembre 2004 du maire de la commune décidant d'exercer le droit de préemption sur le bien immobilier cadastré section AI n° 329, ainsi qu

e l'arrêté du 28 février 2005 précisant le précédent arrêté ;

2°) de rejete...

Vu la requête enregistrée le 6 mars 2006, complétée par mémoire enregistré le 1er décembre 2006, présentée pour la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC (Aube), représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Colomes ; la commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 29 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de M. Y et de Mme X, l'arrêté du 22 décembre 2004 du maire de la commune décidant d'exercer le droit de préemption sur le bien immobilier cadastré section AI n° 329, ainsi que l'arrêté du 28 février 2005 précisant le précédent arrêté ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X et M. Y devant le tribunal ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a censuré l'absence de mention dans l'arrêté du 22 décembre 2004 des dispositions de l'article R. 213-8 du code de l'urbanisme ; aucun texte ne prévoit que les dispositions que ledit article comporte doivent à peine de nullité être mentionnées dans une décision de préemption ; l'absence de mention de ces dispositions qui ne faisaient pas grief aux propriétaires intéressés doit être regardée comme sans effet sur la légalité de l'arrêté ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'arrêté du 22 décembre 2004 ne précisait pas la nature de l'équipement envisagé et que la commune ne justifiait pas avoir établi à la date de l'arrêté un quelconque projet de réalisation d'équipements collectifs ; l'objectif d'intérêt général et d'utilité publique ne peut être sérieusement contesté ; le projet existait antérieurement à l'acte attaqué ; la nature et l'objet des constructions envisagées étaient clairement précises ; il n'y avait pas obligation d'en formaliser l'architecture sous forme de plan ou de maquette ; la motivation d'un projet peut se faire par référence à une délibération antérieure ;

- le moyen tiré du détournement de pouvoir ou de procédure n'est aucunement fondé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2006, présenté pour Mme X et M. Y, par la SCP d'avocats Cirier et associés ; Mme X et M. Y concluent :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que l'arrêté du 22 décembre 2004 ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article R. 213-8 du code de l'urbanisme ; qu'il a été annulé à juste titre ; que l'existence réelle du projet n'est nullement démontrée à la date du 22 décembre 2004 ; que le droit de préemption a été exercé pour faire obstacle à la réalisation d'un projet immobilier, pourtant conforme aux prescriptions du plan local d'urbanisme ; que l'arrêté du 28 février 2005 n'a pu avoir pour effet de régulariser l'arrêté du 22 décembre 2004 ;

Vu l'ordonnance fixant au 7 décembre 2006 la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2007 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me Mathieu, de la SCP Colomes, avocat de la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC et de Mme X,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté du 22 décembre 2004 :

Considérant que l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dispose que : «Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (…)» ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : «Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objet de mettre en oeuvre une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre la restructuration urbaine, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. L'aménagement, au sens du présent code, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations.» ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain et qu'elles doivent définir ce projet de manière précise dans la décision de préemption ;

Considérant que, par arrêté du 22 décembre 2004, complété par celui du 28 février 2005, pris sur délégation du conseil municipal, le maire de la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC a décidé, compte tenu du besoin d'équipements publics dans la zone considérée et des potentialités offertes par cette dernière, d'exercer le droit de préemption sur le bien immobilier, cadastré section AI 329 d'une superficie de 6 954 m², appartenant en indivision aux consorts Y ; que l'opération qui fonde la décision de préemption concerne le transfert des services du centre municipal d'action sociale, à l'étroit dans des locaux mis à disposition, et l'extension des services de proximité et sociaux ; que si une telle opération, engagée dans l'intérêt général et répondant à l'un des objets définis à l'article L. 300-1 précité du code de l'urbanisme, justifie l'exercice du droit de préemption, il ressort des pièces du dossier et notamment des procès-verbaux des séances du conseil municipal du 29 juin et du 14 décembre 2004, qu'à la date de la décision de préemption du 22 décembre 2004, le projet qui avait varié en l'espace de six mois, en était au simple stade de l'hypothèse et n'avait encore donné lieu à aucune étude technique, architecturale ou financière ; qu'il présentait ainsi, alors même que les besoins d'équipement de la nature de celui projeté seraient réels, un caractère insuffisamment précis et certain, contraire aux exigences découlant des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme ; que l'arrêté du 22 décembre 2004 était, pour ce motif, entaché d'une illégalité qui a affecté, dans la même mesure, l'arrêté du 28 février 2005 par lequel le maire s'est borné à compléter, à la suite des observations du préfet de l'Aube, les dispositions manquantes de l'arrêté du 22 décembre 2004, relatives aux conditions de notification de l'offre par le titulaire du droit de préemption, telles qu'elles sont définies par l'article R. 213-8 du code de l'urbanisme ; que la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC, n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé lesdits arrêtés ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC, le paiement aux consorts Y de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC versera aux consorts Y la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LA CHAPELLE SAINT LUC, à Mme Anne-Marie X et à M. Francis Y.

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N° 06NC00347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00347
Date de la décision : 02/08/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SCP COLOMES JEAN-YVES, XAVIER et STANISLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-08-02;06nc00347 ?
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