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24/05/2006 | FRANCE | N°01NC00949

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 24 mai 2006, 01NC00949


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 septembre 2001, complétée par mémoire enregistré le 11 janvier 2006, présentée pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, dont le siège est ..., par Me Robinet, avocat ;

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (S.N.C.F.) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 3 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée, solidairement avec la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen, à verser à la commune de Niederb

ronn-les-Bains la somme de 458 058,79 frs avec intérêts légaux à compter du 6 ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 septembre 2001, complétée par mémoire enregistré le 11 janvier 2006, présentée pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, dont le siège est ..., par Me Robinet, avocat ;

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (S.N.C.F.) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 3 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée, solidairement avec la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen, à verser à la commune de Niederbronn-les-Bains la somme de 458 058,79 frs avec intérêts légaux à compter du 6 mars 1996, ainsi qu'une somme de 5 000 frs au titre des frais irrépétibles ;

2°) à titre principal, de la déclarer hors de cause et de rejeter toutes les demandes dirigées contre elle ;

Elle soutient à cet effet que :

- le tribunal a commis plusieurs erreurs de droit et de fait ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu le bornage et non l'alignement comme procédé de délimitation du domaine public ;

- la S.NC.F. ne peut être considérée comme propriétaire du talus qui borde la voie ferrée ; au contraire, ce talus appartient à la commune dans la mesure où toute voie routière « comporte nécessairement la chaussée, les accotements, les fossés, talus, remblais ou déblais » ; le tribunal a fait une confusion entre la propriété des fondations de l'ouvrage routier et la propriété cadastrale des seuls terrains servant d'assiette à l'ouvrage en terre appartenant à la S.N.C.F. ;

- la commune s'est d'ailleurs comportée comme le propriétaire du talus en autorisant la réalisation des travaux litigieux, sauf à estimer qu'elle s'est rendue coupable d'une voie de fait ;

- le tribunal a omis de tenir compte de ce que la commune a assumé en fait l'entretien du chemin rural, et sa responsabilité peut être mise en cause par les usagers pour défaut d'entretien normal ;

- le lien de causalité entre le dommage et l'un des ouvrages de la S.N.C.F. n'est pas établi ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen et la société Pautler à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

Elle soutient à cet effet que :

- aucune faute de la S.N.C.F. n'est démontrée alors que le rapport d'expertise établit clairement les fautes de la commune, de la Régie intercommunale et de l'entreprise Pautler qui ont agi avec légèreté ;

- la commune n'aurait pas dû autoriser les travaux sans faire de réserves importantes ;

4°) de condamner in solidum la commune de Niederbronn-les-Bains, la Régie et la société Pautler à lui payer une somme de 15 000 frs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 février 2002, présenté pour la commune de Niederbron-les-Bains par Mes Thiel, X..., avocats ;

La commune conclut :

1°) au rejet de la requête de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS ;

A cet effet, la commune soutient que :

- le lien de causalité entre le dommage et l'affaissement du talus appartenant à la S.N.C.F. est établi ;

- le talus litigieux appartient dans son intégralité à la S.N.C.F., ainsi que cela résulte des mentions du cadastre et du livre foncier ;

- la S.N.C.F. engage sa responsabilité pour faute car elle n'a pas assuré l'entretien suffisant du talus et n'a pris aucune mesure pour remédier aux désordres lorsqu'ils sont apparus en 1990 ;

- la responsabilité de la S.N.C.F. est engagée sur le terrain de la responsabilité sans faute dès lors que l'ouvrage public a entraîné pour la commune, en sa qualité de tiers, un dommage anormal et spécial ;

2°) à la condamnation solidaire de la S.N.C.F. et de la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen à réparer l'intégralité du dommage qu'elle a subi et à lui verser une somme de 687 088,18 frs (107 745,92 €) avec les intérêts légaux à compter du 6 mars 1996 ;

A cet effet, la commune soutient que :

- la Régie intercommunale a commis une faute dans l'exécution du contrat la liant avec la commune de Niederbronn-les-Bains car elle a manqué aux règles de l'art en ne recherchant pas une autre solution en aérien ou par un autre tracé ;

- elle a en outre engagé sa responsabilité sans faute dans la mesure où l'affaissement du chemin trouve également son origine dans les travaux ;

- à l'inverse, la commune n'a pas commis de faute ; le maire a limité immédiatement, par arrêté du 22 juillet 1983, la circulation sur le chemin rural aux seuls engins agricoles et a interdit toute circulation dès le 12 mars 1991 ; enfin, elle s'est adressée à la Régie, qui connaissait les lieux et a réalisé des travaux en toute connaissance de cause ;

- le préjudice qui correspond au coût des travaux nécessaires à la réfection du chemin s'élève à 107 745,92 € (687 088,18 frs) ;

3°) à la condamnation de la S.N.C.F. et de la Régie intercommunale de Niederbronn-les Bains et de Reichshoffen à lui payer une somme 7 622,45 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 décembre 2005, présenté pour la Régie intercommunale de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen, par Me Alexandre, avocat ;

La Régie conclut :

1°) au rejet de la requête de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS ;

2°) à ce qu'elle soit mise hors de cause et à ce que la S.N.C.F. et la commune de Niederbronn-les-Bains soient déclarées entièrement responsables du dommage ;

A cet effet, elle soutient que le lien de causalité entre le dommage et l'exécution des travaux décidés par la Régie n'est pas établi ; l'origine du dommage se trouve dans l'instabilité du talus lié au bouleversement géologique dû à la saignée réalisée lors de la construction de la voie ferrée et dans le déboisement du talus opéré par la S.N.C.F. ; en outre, le dommage est lié à l'absence de mesures conservatoires prises par la commune ou la S.N.C.F. ;

3°) à la condamnation solidaire de la S.N.C.F et de la commune de Niederbronn-les-Bains à lui verser une somme de 2 500 € au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la lettre en date du 15 février 2006 informant les parties que la Cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande de première instance présentée par la commune de Niederbronn-les-Bains, qui dispose du pouvoir d'émettre un titre de perception pour recouvrer sa créance ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 février 2006, présenté pour la commune de Niederbronn-les-Bains, qui soutient que :

- les relations entre la commune et la Régie intercommunale étant de nature contractuelle, la commune n'était pas tenue d'émettre un titre exécutoire ;

- la créance ne présentait pas le caractère d'exigibilité, de certitude et d'exigibilité, pour permettre à la commune de prendre un titre exécutoire ;

- la créance de la commune ne peut trouver sa source que dans une décision juridictionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le décret n° 66-624 du 19 août 1966 modifié ;

Vu le décret du 8 octobre 1917 fixant les conditions de l'exploitation en régie des distributions d'énergie électrique par les communes ou les syndicats de commune ;

Vu la convention du 5 novembre 1921 approuvé le 22 février 1922 ;

Vu le cahier des charges approuvé le 18 janvier 1920 ;

Vu le code général des collectivités territoriales et notamment de l'article R. 2342-4 ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2006 :

; le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

- les observations de Me Robinet, avocat de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, de Me Jung, avocat de la commune de Niederbronn-les-Bains, et de Me Alexandre, avocat de la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen,

; et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant que consécutivement à l'affaissement du chemin rural dit chemin des Vignes sis au lieu-dit Zettelberg qu'elle impute à la fois à l'opération de travaux publics réalisée par la société Pautler pour le compte de la Régie intercommunale Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen et à l'effondrement d'un talus surplombant la voie ferrée, la commune de Niederbronn-les-Bains a demandé au Tribunal administratif de Strasbourg la condamnation solidaire de la S.N.C.F. et de la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains à réparer le préjudice résultant de ce dommage ;

Considérant que les personnes publiques étant irrecevables à demander au juge le prononcé de mesures qu'elles ont le pouvoir de prendre, une autorité administrative qui est habilitée à se délivrer à elle-même un titre exécutoire permettant le recouvrement de sa créance n'est pas recevable, en dehors du cas où elle se prévaut de stipulations contractuelles, à demander au juge administratif de condamner ses débiteurs au paiement de la somme qui lui serait due ;

Considérant qu'il suit de là que, nonobstant la complexité des questions juridiques soulevées par le litige, d'ailleurs sans incidence sur l'exigibilité de la créance, la commune de Niederbronn-les-Bains, qui a le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet de fixer les sommes qui lui sont dues en réparation du dommage subi, n'est pas recevable à demander au juge de condamner les auteurs dudit dommage à lui payer ces sommes ; que si la commune argue de l'existence de relations contractuelles avec la Régie intercommunale de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen, elle n'apporte à l'appui de ces allégations aucun élément permettant d'établir que la créance dont elle se prévaut à l'égard de cette régie personnalisée, établissement public local doté de la personnalité morale et de l'autonomie juridique et financière, trouverait son fondement dans un contrat ; qu'ainsi, les conclusions de la commune de Niederbronn-les-Bains tendant à ce que le juge administratif prononce directement la condamnation solidaire de la Régie intercommunale de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen et de la S.N.C.F. à payer les indemnités correspondant au montant des travaux et frais liés à la réfection du chemin rural n'étaient pas recevables ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a admis la recevabilité de la demande présentée par la commune de Niederbronn-les-Bains ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, il y a lieu d'annuler ledit jugement et, par voie de l'effet dévolutif, de rejeter la demande d'indemnité présentée par la commune de Niederbronn-les-Bains devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, en application des dispositions précitées de l'article L. 761-1, de faire droit aux conclusions susmentionnées de la commune de Niederbronn-les Bains ; qu'il n'y a pas lieu non plus, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées respectivement par la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS et par la Régie intercommunale de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 3 juillet 2003 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la commune de Niederbronn-les Bains devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Les conclusions respectives de la commune de Niederbronn-les Bains, de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS et de la Régie intercommunale de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (S.N.C.F.), à la commune de Niederbronn-les-Bains, à la Régie intercommunale d'électricité de Niederbronn-les-Bains et de Reichshoffen et à la société Pautler.

4

N° 01NC00949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC00949
Date de la décision : 24/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : JUNG-JUNG-HARTER-PALLUCCI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-05-24;01nc00949 ?
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