Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2410908 du 28 janvier 2025, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 février 2025, Mme C... D..., représentée par Me Kuhn-Massot, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 janvier 2025 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 1er juillet 2024 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour le titre de séjour sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- l'arrêté litigieux méconnaît les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié dès lors qu'elle justifie résider en France depuis plus de 10 ans à la date de cet arrêté ;
- cet arrêté méconnaît les stipulations du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié dès lors qu'elle est mariée à un ressortissant de nationalité française ;
- il méconnaît également les stipulations du 5 de cet accord et celle de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en prenant l'arrêté litigieux, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Claudé-Mougel,
- et les observations de Me Kuhn-Massot, représentant Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... D..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 28 janvier 2025 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ;/ 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ;/ (...) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) "
3. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise notamment l'accord franco-algérien susvisé et la demande d'admission au séjour présentée par Mme D..., dont il mentionne les date et lieu de naissance ainsi que l'adresse de résidence, sur le fondement du 2 de l'article 6 de cet accord, applicable au ressortissant algérien marié avec un ressortissant de nationalité française. Il mentionne que si Mme D... justifie être entrée à Malte le 12 février 2015 sous couvert d'un visa d'une validité de 29 jours délivré par les autorités consulaires maltaises à Alger et déclare être entrée en France le 20 février 2015, elle ne justifie pas du caractère régulier de cette entrée, et a la possibilité de régulariser sa situation en retournant dans son pays d'origine et en obtenant le visa nécessaire auprès du consulat de France. Il ajoute que dans la mesure où l'intéressée n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 39 ans, lui refuser l'admission au séjour et prononcer une mesure d'éloignement à son encontre ne sont pas contraires à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas de cette motivation que le préfet des Bouches-du-Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme D....
4. En deuxième lieu, Mme D... affirme dans sa requête être entrée sur le territoire le 20 février 2015. Elle ne justifie donc pas résider en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, et n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône a méconnu les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé.
5. En troisième lieu, Mme D... ne justifie pas davantage en cause d'appel qu'en première instance du caractère régulier de son entrée sur le territoire français. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux aurait été pris en méconnaissance des stipulations du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... a été mariée avec M. F..., ressortissant de nationalité française, le 28 avril 2017, lequel est décédé le 4 janvier 2018, et est désormais mariée avec M. B... A..., également de nationalité française, depuis le 9 octobre 2021. Cependant, elle ne fait état d'aucun élément démontrant une vie commune avec son premier époux, et, pour démontrer une vie commune avec son second époux, produit seulement une attestation sur l'honneur de ce dernier du 9 août 2019 attestant d'une vie commune au 32 boulevard Charles Mattéi à Marseille (13014) depuis le 30 avril 2018, une autre du 4 septembre 2023 pour une adresse au 1, impasse Laurent Poudrette également à Marseille (13015) attestant d'une vie commune depuis la même date, un relevé d'identité bancaire mentionnant le nom des époux et leur domiciliation au 4, rue du docteur E... toujours à Marseille (13004), ainsi qu'une lettre d'un fournisseur d'électricité du 11 juillet 2024 attestant d'un abonnement électrique depuis le 1er septembre 2020 à l'impasse Laurent Poudrette ainsi qu'un avis d'impôt sur le revenu commun pour l'année 2022. Aucune des attestations de connaissance, peu circonstanciées, qu'elle produit n'atteste d'une vie commune des époux ni, par ailleurs, d'aucune autre élément de nature à établir l'intégration de Mme D... dans la société française. Par ailleurs, l'appelante n'établit pas davantage une intégration professionnelle suffisante en produisant des bulletins de paie pour les mois d'aout 2020 à décembre 2020 au sein d'un établissement de confection de pâtisserie orientale, des bulletins de paie CESU pour trois mois en 2018 et 4 mois en 2019 ainsi qu'un contrat à durée indéterminée conclu le 20 juin 2024 pour un emploi en qualité de préparatrice de colis, dix jours avant l'arrêté litigieux. M. B... A... et Mme D... n'ont pas d'enfant, alors que les deux enfants de cette dernière, ainsi que ses parents et sa fratrie résident tous en Algérie, et qu'elle n'y est donc pas dépourvue d'attaches familiales. Dans ces circonstances, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux aurait été pris en méconnaissance des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. En cinquième et dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste qu'aurait commis le préfet des Bouches-du-Rhône en prenant l'arrêté litigieux doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, et celles fondées sur les dispositions de des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'Intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 3 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente-assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe 17 juillet 2025.
N° 25MA00494 2
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