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08/07/2025 | FRANCE | N°24MA01157

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 08 juillet 2025, 24MA01157


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par deux requêtes distinctes, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision du 26 août 2021 par laquelle le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a refusé de renouveler son contrat, ainsi que la décision du 16 décembre 2021 rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis.



Par un jugement n° 2106655, 22018

94 du 27 février 2024, le tribunal administratif de Nice a condamné l'Etat à verser à Mme B... un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision du 26 août 2021 par laquelle le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a refusé de renouveler son contrat, ainsi que la décision du 16 décembre 2021 rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis.

Par un jugement n° 2106655, 2201894 du 27 février 2024, le tribunal administratif de Nice a condamné l'Etat à verser à Mme B... une somme de 1 042 euros en réparation de ses préjudices, et a rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 mai 2024, Mme B..., représentée par Me Persico, demande à la Cour :

1°) d'infirmer le jugement n° 2106655, 2201894 du 27 février 2024 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a refusé de renouveler son contrat ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non-respect du délai de prévenance, ainsi que la somme de 39 827 euros, majorée des intérêts de droit à compter de la date de la première demande d'indemnisation formée le 17 janvier 2022 avec capitalisation des intérêts échus à compter de cette même formalité, en réparation des autres préjudices subis ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Nice est entaché d'erreur de droit ;

- la décision par laquelle l'administration n'a pas renouvelé son contrat est entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 45 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 dès lors que le délai de prévenance n'a pas été respecté et qu'elle a été privée d'un entretien préalable ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'aucun élément ne démontre que ses compétences professionnelles se seraient dégradées ;

- elle n'est pas justifiée par l'intérêt du service et méconnaît l'article L. 133-2 du code général de la fonction publique dès lors que ses conditions de travail se sont dégradées depuis septembre 2019 et qu'elle a dû être placée en arrêt maladie ; le refus de renouveler son contrat, pris en considération de sa personne, constitue un agissement de plus envers elle et démontre une volonté de lui nuire ; rien n'a été fait pour la protéger face aux agissements malveillants qu'elle a subis ;

- dès lors, elle est fondée à demander la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices subis du fait des fautes commises par l'administration, résultant du non-respect du délai de préavis et de l'absence d'entretien préalable, à hauteur d'un montant de 3 000 euros ;

- l'Etat devra également être condamné à l'indemniser du fait du harcèlement moral et de l'illégalité fautive de la décision de non-renouvellement de son contrat ; ainsi, elle a subi un préjudice financier du fait du harcèlement moral dont elle a été victime, qui a entraîné son placement en congé maladie causant une perte de revenu à hauteur de 840 euros ; elle a également subi une perte de revenu du fait du non-renouvèlement de son contrat, préjudice évalué à 2 059 euros ; l'Etat lui est par ailleurs redevable d'une somme de 3 230,50 euros au titre du solde de congé non pris, soit un reliquat de 2 188 euros après le jugement de première instance, et d'une somme de 580 euros au titre des jours figurant sur son compte épargne temps ;

- elle a subi des troubles dans les conditions d'existence, qu'il conviendra d'indemniser à hauteur de 5 000 euros, ainsi qu'un préjudice moral évalué à 30 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés et s'en remet aux écritures produites en première instance.

Par une ordonnance du 6 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Persico, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée en qualité d'éducatrice au sein de l'unité éducative d'hébergement collectif (UEHC) de Nice par contrat à durée déterminée pour la période courant du 9 avril au 31 août 2018. Son contrat a été renouvelé à plusieurs reprises à compter du 1er septembre 2018 jusqu'au 31 août 2021, date à laquelle, par arrêté du 26 août 2021, le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a mis fin à son engagement. Par courrier du 26 août 2021, Mme B... a formé un recours gracieux contre la décision de refus de renouvellement de son contrat, lequel a été rejeté par un courrier du 16 décembre 2021. Elle a ensuite saisi l'administration d'une demande indemnitaire par courrier du 17 janvier 2022, reçue le 18 janvier suivant, laquelle a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Par un jugement du 27 février 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de contrat, a condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 042 euros en réparation du préjudice financier résultant du non-paiement de ses congés et des jours épargnés non soldés, et a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de l'intéressée. Par la présente requête, Mme B... doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de renouvellement du contrat de Mme B... :

2. En premier lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La requérante ne peut donc utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de droit.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 45 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat, dans sa version applicable au litige : " Lorsque l'agent non titulaire est recruté par un contrat à durée déterminée susceptible d'être renouvelé en application des dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : / (...) / - un mois avant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée supérieure ou égale à six mois et inférieure à deux ans ; / - deux mois avant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée supérieure ou égale à deux ans ; - trois mois avant le terme de l'engagement pour l'agent dont le contrat est susceptible d'être renouvelé pour une durée indéterminée en application des dispositions législatives ou réglementaires applicables. / La notification de la décision doit être précédée d'un entretien lorsque le contrat est susceptible d'être reconduit pour une durée indéterminée ou lorsque la durée du contrat ou de l'ensemble des contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans. / Pour la détermination de la durée du délai de prévenance, les durées d'engagement mentionnées aux deuxième, troisième et quatrième alinéas sont décomptées compte tenu de l'ensemble des contrats conclus avec l'agent, y compris ceux effectués avant une interruption de fonctions, sous réserve que cette interruption n'excède pas quatre mois et qu'elle ne soit pas due à une démission de l'agent. / Lorsqu'il est proposé de renouveler le contrat, l'agent non titulaire dispose d'un délai de huit jours pour faire connaître, le cas échéant, son acceptation. En cas de non-réponse dans ce délai, l'intéressé est présumé renoncer à l'emploi ".

4. D'une part, il résulte de ces dispositions que la décision de ne pas renouveler le contrat d'un agent doit être précédée d'un entretien notamment dans le cas où l'ensemble des contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans. Toutefois, hormis le cas où une telle décision aurait un caractère disciplinaire, l'accomplissement de cette formalité, s'il est l'occasion pour l'agent d'interroger son employeur sur les raisons justifiant la décision de ne pas renouveler son contrat et, le cas échéant, de lui exposer celles qui pourraient justifier une décision contraire, ne constitue pas pour l'agent, eu égard à la situation juridique de fin de contrat sans droit au renouvellement de celui-ci, et alors même que la décision peut être prise en considération de sa personne, une garantie dont la privation serait de nature par elle-même à entraîner l'annulation de la décision de non renouvellement, sans que le juge ait à rechercher si l'absence d'entretien a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision.

5. Il ressort des pièces du dossier, particulièrement du bilan de fin de contrat réalisé le 7 juin 2021 par le directeur de l'établissement au sein duquel Mme B... a exercé ses fonctions, que la décision portant refus de renouvellement de son contrat, qui résulte de considérations tenant essentiellement à sa manière de servir, ne revêt pas un caractère disciplinaire. Dans ces conditions, s'il est constant que la notification de cette décision n'a pas été précédée de l'entretien prévu par les dispositions citées au point 3 de l'article 45 du décret du 17 janvier 1986, une telle circonstance, eu égard à la situation juridique de fin de contrat sans droit au renouvellement de celui-ci dans laquelle se trouvait Mme B..., ne l'a privée d'aucune garantie. Elle ne peut davantage être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision, et n'est, par suite, pas susceptible d'affecter la légalité de la décision attaquée.

6. D'autre part, si la méconnaissance, par l'administration, du délai qui lui est imparti pour notifier à l'agent son intention de renouveler ou non l'engagement, est susceptible d'engager sa responsabilité, une telle circonstance est toutefois sans incidence sur la légalité de la décision de non-renouvellement du contrat. Par suite, le moyen tiré du non-respect du délai de prévenance prévu par l'article 45 du décret du 17 janvier 1986 ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.

8. D'une part, pour justifier du non renouvellement du dernier contrat de l'appelante, le garde des sceaux, ministre de la justice, se prévaut du bilan de fin de contrat cité au point 5, aux termes duquel l'exécution du travail demandé est aléatoire et régulièrement réalisée sans respect des délais fixés, et la qualité du travail fourni moyenne compte tenu des difficultés de l'agent avec les écrits professionnels et le rendu compte avec la hiérarchie. Ce bilan précise par ailleurs que Mme B... est régulièrement en retard pour ses prises de service et pour les réunions d'unité, qu'elle a une faible capacité d'organisation et d'anticipation des échéances, qu'elle travaille peu en équipe, qu'elle a généré des conflits avec un adjoint administratif et un cadre éducatif, et qu'elle ne respecte pas sa hiérarchie. Si Mme B... soutient que les reproches ainsi formulés sont infondés et en contradiction avec le bilan réalisé en 2019, il ressort toutefois du compte rendu d'entretien professionnel réalisé au titre de l'année 2020 que les objectifs fixés avaient déjà été, au mieux, partiellement atteints, voire non atteint pour l'un d'entre eux. Par ailleurs, la circonstance que l'intéressée n'aurait pas été à l'origine du conflit l'ayant opposée à un autre agent, et qu'elle n'aurait pas fait preuve d'agressivité, n'est pas de nature, par elle-même, à révéler que la décision de non renouvellement de son contrat aurait été guidée par des considérations ne relevant pas de l'intérêt du service. Enfin, aucune des autres pièces du dossier, notamment pas les deux attestations produites par Mme B..., ne permettent de remettre en cause l'appréciation réalisée par son employeur sur sa manière de servir.

9. D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier qu'à compter de l'année 2019, Mme B... a été confrontée, comme, du reste, l'ensemble des agents de l'unité éducative, à l'arrivée d'un jeune homme mineur particulièrement virulent, à l'encontre duquel elle a été amenée à porter plainte à deux reprises pour des insultes et menaces, une telle circonstance n'est pas de nature, par elle-même, à remettre en cause l'appréciation portée par sa hiérarchie sur sa manière de servir. Il est certes exact, par ailleurs et ainsi que le soutient Mme B..., qu'une vive altercation l'a opposée à un adjoint administratif lors d'une réunion qui s'est tenue le 14 janvier 2020 au sujet, précisément, de la gestion de ce mineur, et qu'à la suite de cet incident, une note de fonctionnement de l'UEHC, établie par la référente laïcité et citoyenneté de l'administration, expose que ce conflit serait venu " interpeller " la question des relations entre les agents de l'équipe, notamment les relations entre les femmes et les hommes. La note propose à cet égard plusieurs axes d'amélioration dans le fonctionnement de la structure. Néanmoins, ni l'altercation survenue le 14 janvier 2020, et pas davantage l'organisation et le fonctionnement de l'UEHC tels que révélées par la note précitée, sont de nature, là encore, à remettre en cause l'appréciation portée sur la manière globale de servir de Mme B....

10. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que, par la décision attaquée, le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a refusé de renouveler le contrat de Mme B....

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 26 août 2021 par laquelle le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse sud-est a refusé de renouveler son contrat.

Sur les conclusions indemnitaires de Mme B... :

En ce qui concerne la responsabilité :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à rechercher l'engagement de la responsabilité de l'administration à raison de l'illégalité fautive entachant la décision par laquelle son contrat de travail n'a pas été renouvelé.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable au litige : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ".

14. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.

15. Si Mme B... réitère son affirmation selon laquelle son employeur a manqué à son obligation de sécurité, en ce qu'il n'est pas intervenu alors qu'elle était victime de faits de harcèlement moral perpétrés tant par le mineur évoqué au point 9 que par des collègues de travail, et qu'elle justifie d'ailleurs avoir déposé une main courante le 30 janvier 2020 en raison des agissements de ses collègues, elle n'apporte pas plus en cause d'appel qu'en première instance d'éléments de nature à faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. A cet égard, la seule attestation d'un psychologue, lui-même pris à partie par les mêmes agents selon ses propres déclarations, ne suffit pas, à elle seule et en l'absence de tout autre élément, à faire présumer de l'existence d'un tel harcèlement. S'il est certes exact que Mme B... a été placée en congé maladie à compter du 26 mars 2021, et que selon un certificat médical établi le 9 décembre 2019, elle souffre d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel, ce certificat se borne néanmoins à indiquer, sur la base des seules déclarations de l'appelante, que ce syndrome serait en lien avec une situation récurrente de harassement psychologique sur le lieu de travail, sans autre forme de précision. Enfin, Mme B... n'établit pas avoir alerté sa hiérarchie des faits qu'elle affirme avoir subis. Dans ces conditions, et alors que l'intéressée ne produit pas davantage d'éléments de fait susceptibles de faire présumer de l'existence d'un harcèlement moral, et que la décision portant refus de renouvellement de son contrat, qui n'est pas illégale, ne saurait être regardée comme étant l'une des manifestations d'un tel harcèlement, son employeur n'a pas méconnu son obligation de sécurité.

En ce qui concerne les préjudices :

16. En premier lieu, il résulte de qui a été exposé aux points 12 à 15 du présent arrêt que Mme B... n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à l'indemniser d'un préjudice financier, de troubles dans les conditions d'existence et d'un préjudice moral résultant du harcèlement moral qu'elle prétend avoir subi, et du non renouvellement de son contrat de travail. S'agissant plus particulièrement du préjudice financier résultant du non-paiement des congés et des jours épargnés non soldés avant la fin du contrat, celui-ci n'est en tout état de cause pas imputable aux fautes que le tribunal administratif de Nice a retenues dans le jugement attaqué, à savoir la méconnaissance du délai de prévenance et l'absence d'entretien préalable avant la notification de la décision de non-renouvellement du contrat.

17. En second lieu, si Mme B... soutient que le non-respect du délai de prévenance et l'absence d'entretien avant la notification de la décision de refus de renouvellement de son contrat lui ont causé un préjudice, elle ne décrit pas avec suffisamment de précision la nature de ce préjudice, qui ne fait d'ailleurs pas l'objet d'une évaluation différente de celle réalisée en première instance, alors que seule la réparation d'un préjudice imputable au non-respect du délai de prévenance prévu par l'article 45 du décret du 17 janvier 1986 était sollicitée devant les premiers juges.

18. Il suit de là que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice lui a alloué une indemnité d'un montant de 1 042 euros. Par voie de conséquence, elle n'est pas fondée à demander la majoration du montant de cette indemnité, et ses conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes indemnitaires, ainsi que celles tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme totale de 42 827 euros, et celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 8 juillet 2025.

N° 24MA01157 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01157
Date de la décision : 08/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : PERSICO

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-08;24ma01157 ?
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