Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2024 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2402501 du 26 novembre 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2024, M. B... A..., représenté par Me Caillouet-Ganet, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 novembre 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2024 du préfet du Var ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de l'admettre à titre provisoire à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la circonstance qu'il a été condamné le 1er septembre 2020 par le tribunal correctionnel de Toulon à une peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours commis le 7 mars 2020 en présence d'un mineur par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité n'établit pas qu'il représente un risque de trouble à l'ordre public au sens de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il a repris une vie commune avec sa conjointe et que cette condamnation remonte à plus de 4 ans à la date de l'arrêté attaqué ; il a toujours assumé ses obligations parentales et été victime d'un accident grave en septembre 2024 ; par suite, l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ; elle méconnaît également les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article L. 424-3 du même code, compte tenu de sa qualité de parent de mineur auquel le statut de réfugié a été reconnu ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il ne pouvait en outre faire l'objet d'une mesure d'éloignement compte tenu de ce qu'il doit bénéficier d'un titre de plein droit en sa qualité de parent d'un mineur auquel le statut de réfugié a été reconnu.
La requête a été communiquée au préfet du Var, qui n'a pas produit de mémoire.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 24 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la Cour a désigné Mme Courbon, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement de la 1ère chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Claudé-Mougel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité nigériane, demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 novembre 2024 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du 3 juillet 2024 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Sur l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président. ".
3. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Il n'y a donc plus lieu de statuer sur sa demande tendant à l'octroi de cette aide à titre provisoire.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, et d'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. (...) " Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la qualité de réfugié a été reconnue en application du livre V se voit délivrer une carte de résident d'une durée de dix ans. " Aux termes de l'article L. 424-3 du même code : " La carte de résident prévue à l'article L. 424-1, délivrée à l'étranger reconnu réfugié, est également délivrée à : / (...) 4° Ses parents si l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié, sans que la condition de régularité du séjour ne soit exigée. (...) "
6. Enfin, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle et actuelle pour l'ordre public, ces conditions étant appréciées en tenant compte également de sa situation individuelle, et notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été a été condamné le 1er septembre 2020 par le tribunal correctionnel de Toulon à six mois d'emprisonnement avec sursis pour des violences commises sur son épouse le 7 mars 2020, en présence de l'un de ses enfants. Si M. A... soutient qu'il a repris la vie commune et assume ses obligations familiales, il ressort seulement de l'attestation de son épouse du 12 janvier 2024 qu'elle l'héberge à titre gratuit à Hyères, sans davantage de précision. Aucune des pièces qu'il produit ne vient établir la réalité et la consistance de cette vie commune, ni que M. A... contribuerait à l'entretien et à l'éducation de ses enfants. Il ne produit pas davantage d'éléments justifiant de son intégration sociale ou professionnelle sur le territoire depuis son arrivée en France, la commission du titre de séjour, constatant en outre qu'il ne parle pas français, ayant émis pour cette raison un avis défavorable à la délivrance d'un titre de séjour. Ainsi, eu égard à la gravité de ces faits, le préfet du Var n'a pas inexactement apprécié la situation du requérant en considérant que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public. Par suite, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Var n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni celles de l'article L. 424-3 du même code.
8. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que la décision rejetant la demande de titre de séjour à M. A... est légale. Il ne peut donc soutenir, par voie d'exception, que l'illégalité de cette décision entraîne l'illégalité de celle l'obligeant à quitter le territoire.
9. En troisième lieu, pour le même motif que celui exposé au point 7, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au même point, il ne peut bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en qualité de parent d'un mineur réfugié, il ne pouvait faire l'objet d'une telle mesure d'éloignement.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 26 novembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 3 juillet 2024 du préfet du Var. Ses conclusions à fin d'injonction doivent également, et par voie de conséquence, être rejetées.
D É C I D E
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire de M. A....
Article 2 : Le surplus de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Caillouet-Ganet.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 5 juin 2025, où siégeaient :
- Mme Courbon, présidente,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller,
- M. Martin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 juin 2025.
N°24MA03260 2