Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Toulon à lui payer la somme de 34 407,50 euros, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa chute survenue à Toulon le 11 mai 2017.
Par un jugement n° 2103420 du 21 mars 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de Mme C....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 mai 2024, Mme C..., représentée par Me Clement, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 mars 2024 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de condamner la commune de Toulon à lui payer la somme de 34 407,50 euros ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Toulon la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a chuté sur la voie publique en trébuchant sur une chaîne attachée à un panneau de signalisation ;
- la commune de Toulon a commis une faute en ne supprimant pas l'obstacle ;
- aucune faute d'imprudence ne peut lui être reprochée ;
- elle a droit à l'indemnisation de l'ensemble de ses préjudices, pour un montant total de 34 407,50 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2024, la commune de Toulon, représentée par la SELURL Phelip, agissant par Me Phelip, conclut, à titre principal, au rejet de la requête ; à titre subsidiaire, à ce que le montant de l'indemnité réclamée soit ramené à de plus justes proportions ; en tout état de cause, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est tardive ;
- elle est irrecevable car fondée sur une cause juridique distincte de celle soulevée en première instance ;
- sa responsabilité ne peut être recherchée sur le fondement du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; la voie est une route nationale appartenant à l'État et la compétence en matière d'entretien de la voirie a en tout état de cause été transférée à la métropole Toulon-Provence- Méditerranée ;
- le maire n'a commis aucune faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police ;
- la victime a commis une faute d'imprudence ;
- l'indemnité susceptible d'être allouée devra être ramenée à de plus justes proportions.
Par une lettre, enregistrée le 11 juin 2024, la caisse primaire d'assurance maladie du Var a indiqué qu'elle n'entendait pas intervenir dans la présente instance et a précisé que Mme C... a été prise en charge au titre du risque maladie pour un montant de 5 759,10 euros.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Danveau ;
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., née le 26 novembre 1949, a été victime d'une chute survenue le 11 mai 2017, alors qu'elle marchait à l'angle de l'avenue Maréchal Juin et de la rue Paul Arène à Toulon. Elle impute sa chute à la présence d'une chaîne attachée à un panneau de signalisation et posée au sol. Deux expertises médicales ont été ordonnées par ordonnances n° 1704379 du 4 avril 2018 et n° 1901143 du 21 janvier 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Toulon, afin d'évaluer l'étendue des préjudices subis par Mme C... en lien avec sa chute. Les deux rapports de l'expert ont été respectivement remis les 5 juillet 2018 et 2 mars 2021. Mme C... a présenté une demande indemnitaire préalable qui a été rejetée par courrier de la commune de Toulon du 23 octobre 2017. Celle-ci relève appel du jugement du 21 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Toulon à l'indemniser des préjudices causés par cet accident.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Il appartient à l'usager victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public d'apporter la preuve, d'une part, de la réalité de ses préjudices, et, d'autre part, de l'existence d'un lien de causalité direct entre cet ouvrage et le dommage qu'il a subi. La collectivité en charge de l'ouvrage public peut s'exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit de l'entretien normal de l'ouvrage, soit de ce que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure.
3. Il résulte de l'instruction que le 11 mai 2017 vers quinze heures, alors qu'elle circulait sur le trottoir de l'avenue Maréchal Juin à Toulon, Mme C... a heurté une chaîne métallique attachée autour d'un panneau de signalisation et posée au sol. Cette chute lui a occasionné une fracture de l'extrémité distale du radius gauche. Ces faits, qui ne sont pas contestés par la commune de Toulon, ressortent notamment de l'attestation d'un témoin direct de l'accident ayant accompagné Mme C... à la clinique suite à son accident ainsi que des photographies produites. Toutefois, cette chaîne, constituée de mailles au diamètre important, qualifiée par la requérante de " chaîne de gros volume ", était, malgré sa couleur sombre, visible par un piéton prêtant une attention suffisante à son déplacement. De surcroît, sa présence au sol, à l'extrémité d'un seul côté du trottoir au niveau de l'intersection avec la rue Paul Arène que la requérante s'apprêtait à emprunter, ne constituait pas un obstacle excédant, par son emplacement et ses caractéristiques, ceux qu'un usager de la voie publique doit s'attendre à rencontrer en milieu urbain. Elle laissait en tout état de cause un espace de cheminement suffisant aux piétons désireux de traverser la rue Paul Arène ou souhaitant, comme Mme C..., rester sur le trottoir et bifurquer vers cette rue. Dès lors, l'accident dont a été victime Mme C..., qui a au demeurant eu lieu en plein jour, ne peut être regardé comme imputable à un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public mais résulte d'une faute d'inattention de sa part. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune de Toulon sur le fondement du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public.
4. Au vu des éléments exposés au point précédent, Mme C... n'apporte pas la preuve d'une carence du maire de Toulon dans l'exercice de ses pouvoirs de police. Par suite, et à supposer que la requérante ait entendu invoquer ce fondement de responsabilité, celle-ci n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune à ce titre.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir soulevées en défense, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur la déclaration d'arrêt commun :
6. La caisse primaire d'assurance maladie du Var a fait valoir devant la cour qu'elle n'entendait pas intervenir dans l'instance. Par suite, il y a lieu de lui déclarer le présent arrêt commun.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu de mettre les frais de l'expertise confiée au docteur B..., ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, et liquidés et taxés aux sommes de 780 euros et 900 euros par deux ordonnances du 17 septembre 2018 et du 3 mai 2021 de la magistrate en charge des expertises et de la présidente du tribunal administratif de Toulon, à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Toulon, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme C..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme demandée par la commune de Toulon, au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés aux sommes de 780 euros et 900 euros par deux ordonnances du 17 septembre 2018 et du 3 mai 2021, sont mis à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Toulon présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Var.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Me Clément, à la commune de Toulon et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- Mme Rigaud, présidente-assesseure,
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juin 2025.
N° 24MA01377