Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Sous le numéro 2100606, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision n° 2020 850 1091 du 8 décembre 2020 par laquelle le directeur de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille (AP-HM) l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé du 17 mai 2020 au 16 novembre 2020 ainsi que la décision du 8 décembre 2020 n° 2020 850 1093 par laquelle cette même autorité l'a maintenue à demi-traitement du 17 novembre 2020 jusqu'à la notification de son inaptitude absolue et définitive.
Sous le numéro 2204492, Mme A... a demandé à ce même tribunal de condamner l'AP-HM à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 60 000 euros en réparation de son préjudice financier résultant, selon elle, de la carence de cet établissement public dans la mise en œuvre de la procédure de son reclassement.
Par un jugement n° 2100606, 2204492 du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Marseille a, après avoir joint ces deux demandes, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 8 décembre 2020 n° 2020 850 1093 et rejeté le surplus des demandes de Mme A....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 septembre et 10 octobre 2023, Mme A..., représentée par Me Ganne, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2023 rendu par le tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler les décisions du 8 décembre 2020 numérotées 2020 850 1091 et 2020 850 1093 ;
3°) de reconnaître son droit au reclassement rétroactif à compter du 2 juillet 2020 jusqu'à sa mise à la retraite ;
4°) de condamner l'AP-HM à lui verser la somme de 70 000 euros ;
5°) de mettre à la charge de l'AP-HM la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne ses conclusions à fin d'annulation :
S'agissant de l'absence d'adaptation de son poste de travail :
- pour écarter son moyen, le tribunal s'est fondé sur les avis des comités médicaux en date des 26 octobre 2017 et 24 mai 2018 ainsi que sur des décisions du 7 novembre 2017 et du 1er juin 2018 alors que ces pièces n'avaient pas été versées au débat ;
- ses demandes de prolongation de congé maladie n'ont jamais été produites au cours de l'instance devant le tribunal ;
- le tribunal aurait dû reconnaître une obligation d'aménagement de son poste de travail dès le 27 janvier 2020, date correspondant à l'avis d'aptitude à la reprise rendu par la médecine du travail ;
- en application de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 alors en vigueur, il appartenait à l'administration de lui proposer un aménagement de poste dans un premier temps et, seulement si l'adaptation du poste de travail se révélait impossible, de lui proposer un reclassement ;
- aucune prolongation " à la demande de l'intéressée " ne saurait être reconnue dès lors qu'elle s'est trouvée contrainte d'accepter ces prolongations de mise en disponibilité faute d'adaptation de son poste de travail ;
- l'avis du comité médical en date du 2 juillet 2020 constituait le point de départ de l'obligation qui pesait sur l'administration en termes d'adaptation et de reclassement de son poste de travail ;
S'agissant de l'absence de reclassement :
- le tribunal a omis de répondre à son moyen selon lequel l'administration était tenue d'adapter son poste ou de la reclasser à compter du 2 juillet 2020, date à compter de laquelle le comité médical avait retenu son aptitude à la reprise du travail ;
- il incombait à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement préalablement à toute décision de reclassement ;
- le tribunal a commis une erreur sur la date retenue puisque ce n'est pas l'avis du comité médical du 26 novembre 2020 qui a fondé la décision du 8 décembre 2020 litigieuse mais l'avis du 15 septembre 2020 ;
- le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré de ce qu'aucune prolongation " à la demande de l'intéressée " ne saurait être reconnue dès lors qu'elle s'est trouvée contrainte d'accepter ces prolongations de mise en disponibilité faute d'adaptation de son poste de travail ;
- il existait bien une obligation de reclassement pour l'administration à compter du 2 juillet 2020 ;
- l'administration ne démontre pas avoir satisfait à son obligation de reclassement ;
En ce qui concerne ses conclusions indemnitaires :
S'agissant des fautes commises par l'administration :
- l'administration était tenue d'adapter son poste ou de lui proposer un entretien dès le 2 juillet 2020 ;
- l'administration a manqué à son obligation de reclassement ;
- l'attitude objective de l'AP-HM tenant à l'absence de proposition d'adaptation de poste, de reclassement, ou de refus de mi-temps thérapeutique et corroboré par les explications fournies dans ses écritures suffit à démontrer l'existence d'une discrimination en raison de son âge et de son handicap ;
S'agissant des préjudices :
- son préjudice moral lui ouvre droit à réparation par le versement de la somme de 10 000 euros ;
- elle a subi des préjudices financiers pour un montant de 60 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2024, l'AP-HM, représentée par Me Pichon, de la Selarl Cornet - Vincent - Segurel, conclut au rejet de la requête de Mme A... ainsi qu'à la mise à la charge de celle-ci de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la décision en date du 8 décembre 2020 par laquelle l'AP-HM prévoit la mise en disponibilité d'office de Mme A... pour la période du 17 mai 2020 au 16 novembre 2020 n'est qu'une décision confirmative de la décision en date du 9 juillet 2020 prolongeant la mise en disponibilité d'office de Mme A... et, par conséquent, les conclusions en annulation contre cette décision en date du 08 décembre 2020 doivent être rejetées comme étant irrecevables ;
- le moyen tiré de ce que le tribunal n'a pas apprécié la légalité des décisions des 7 novembre 2017 et 1er juin 2018 est inopérant dans le cadre de la contestation de la décision en date du 8 décembre 2020 ;
- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;
- les préjudices allégués ne sont assortis d'aucune pièce.
Par une décision du 26 juillet 2024, Mme A... n'a pas été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;
- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;
- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mahmouti,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Par deux décisions du 8 décembre 2020, l'une numérotée 2020 850 1091 et l'autre 2020 850 1093, l'AP-HM a, respectivement, prolongé du 17 mai 2020 au 16 novembre 2020 le placement en disponibilité d'office pour raison de santé de Mme A..., et maintenu celle-ci à demi-traitement " à compter du 17 novembre 2020 jusqu'à la notification de l'inaptitude absolue et définitive ". Par deux requêtes distinctes, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler ces deux décisions et, d'autre part, de condamner l'AP-HM à réparer les préjudices qu'elle estime liés à son absence de reclassement. Par un jugement du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Marseille a, après avoir joint ces deux demandes, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision n° 2020 850 1093 et rejeté le surplus des demandes de Mme A.... Cette dernière relève appel de ce jugement.
Sur la régularité jugement attaqué :
2. Si Mme A... soutient que le tribunal s'est fondé sur les avis des comités médicaux en date des 26 octobre 2017 et 24 mai 2018 ainsi que sur des décisions du 7 novembre 2017 et du 1er juin 2018 alors que ces pièces n'auraient pas été versées au débat, il ressort des pièces versées au dossier de première instance enregistré sous le numéro 2204492 que ce moyen manque en fait. En outre, si la requérante soutient que le tribunal n'a pas apprécié la légalité des décisions des 7 novembre 2017 et 1er juin 2018, une telle critique est inopérante dès lors que seules étaient contestées les décisions en date du 8 décembre 2020. Enfin, il résulte des termes du jugement attaqué, et en particulier de ceux mentionnés à son point 7, que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre au détail de l'argumentation que lui était soumise, a répondu au moyen tiré de ce que l'AP-HM aurait été tenue de rechercher l'adaptation du poste de Mme A... à son état physique. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier ne peut être qu'écarté.
Sur le bien-fondé jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... :
S'agissant de la décision n° 2020 850 1091 du 8 décembre 2020 prolongeant du 17 mai 2020 au 16 novembre 2020 le placement en disponibilité d'office pour raison de santé de Mme A... :
3. D'une part, aux termes de l'article 17 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière : " Lorsque le fonctionnaire est dans l'incapacité de reprendre son service à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service qu'après l'avis favorable du comité médical. / Si l'avis du comité médical est défavorable, le fonctionnaire est soit mis en disponibilité, soit, s'il le demande, reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme des agents des collectivités locales. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " La mise en disponibilité prévue aux articles 17 et 35 du présent décret est prononcée après avis du comité médical ou de la commission départementale de réforme sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. / Elle est accordée pour une durée maximale d'un an et peut être renouvelée à deux reprises pour une durée égale. / Toutefois, si à l'expiration de la troisième année de disponibilité le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, mais s'il résulte d'un avis du comité médical qu'il doit normalement pouvoir reprendre ses fonctions avant l'expiration d'une nouvelle année, la disponibilité peut faire l'objet d'un troisième renouvellement. / L'avis est donné par la commission de réforme lorsque le congé antérieur a été accordé en vertu du deuxième alinéa du 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical. Toutefois, lors du dernier renouvellement de la mise en disponibilité, c'est la commission de réforme qui est consultée. ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 7 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa version applicable au litige : " Les comités médicaux (...) sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : (...) 5. L'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après congé ou disponibilité ; 6. La mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement ; 7. Le reclassement dans un autre emploi à la suite d'une modification de l'état physique du fonctionnaire, ainsi que dans tous les autres cas prévus par des textes réglementaires. (...) ". Aux termes de l'article 13 du même décret : " La commission de réforme est consultée notamment sur : (...) 7. L'application, s'il y a lieu, des dispositions réglementaires relatives à la mise en disponibilité d'office pour raison de santé. ".
5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une hernie discale constatée le 18 juin 2013, Mme A... a sollicité le 21 mars 2017 le bénéfice d'un congé de longue maladie au titre de ses pathologies et de son état dépressif. Lors de sa séance du 1er juin 2017, le comité médical départemental a émis un avis défavorable en l'absence de critère de gravité et d'invalidité. Par décision du 9 juin 2017, l'AP-HM l'a alors placée en congé ordinaire de maladie de plus de six mois, à compter du 17 novembre 2016. Le recours contre cette décision du 9 juin 2017 a été rejeté par un jugement, définitif, n° 1705106 du 6 mai 2019 rendu par le tribunal administratif de Marseille. Puis, après une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois et compte tenu d'avis du comité médical du 26 octobre 2017 concluant à son inaptitude à reprendre le travail, la requérante a été placée en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 17 novembre 2017. Cette mise en disponibilité d'office a été renouvelée, à chaque fois pour des périodes de six mois, par des décisions successives du 1er juin 2018, 20 décembre 2018 et 18 décembre 2019, cette dernière l'ayant prolongée jusqu'au 16 mai 2020. Par une décision du 9 juillet 2020 qui n'a pas été contestée et qui est, par suite, définitive, l'AP-HM a, au visa de l'avis émis le 26 mai 2020 par le médecin spécialiste agréé concluant à une " Reprise du travail possible sur poste adapté " et de l'avis émis le 2 juillet 2020 par le comité médical, prolongé ce placement " à compter du 17 mai 2020 jusqu'à la date de reprise effective des fonctions à temps complet ". Le 26 novembre 2020, le comité médical a conclu à " l'inaptitude absolue et définitive au poste et à tout poste dans la fonction publique sans possibilité de reclassement professionnel à gérer par l'administration de l'agent ". Enfin, par la décision du 8 décembre 2020 contestée, l'AP-HM a placé Mme A... en disponibilité d'office à compter du 16 mai 2020 au 16 novembre 2020.
6. Mme A... soutient que la décision du 8 décembre 2020 qu'elle conteste ne pouvait la placer en disponibilité d'office à compter du 16 mai 2020 au 16 novembre 2020 alors même que, durant cette période, son état lui permettait médicalement de reprendre une activité adaptée à son état de santé.
7. L'AP-HM fait toutefois valoir que la décision en date du 8 décembre 2020 par laquelle elle a mis Mme A... en disponibilité d'office pour la période du 17 mai 2020 au 16 novembre 2020 n'est qu'une décision confirmative de la décision en date du 9 juillet 2020 prolongeant la mise en disponibilité d'office de Mme A... " à compter du 17 mai 2020 jusqu'à la date de reprise effective des fonctions à temps complet ".
8. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressée n'avait pas repris ses fonctions au 16 novembre 2020. Par suite, la décision n° 2020-850-1091 du 8 décembre 2020 doit être regardée comme une décision modifiant uniquement le terme de sa mise en disponibilité et abrogeant la décision du 9 juillet 2020 à compter du 17 novembre 2020. D'où il suit que la décision contestée est purement confirmative de celle, définitive, du 9 juillet précédent ayant placé la requérante en disponibilité d'office pour raison de santé, pour la période courant du 17 mai au 16 novembre 2016. Dans ces conditions, les conclusions en annulation contre la décision en date du 8 décembre 2020 doivent être rejetées comme étant irrecevables. La fin de non-recevoir opposée en défense aux conclusions de la requérante tendant à l'annulation de ladite décision doit, par suite, être accueillie.
S'agissant de la décision n° 2020 850 1093 du 8 décembre 2020 maintenant Mme A... à demi-traitement " à compter du 17 novembre 2020 jusqu'à la notification de l'inaptitude absolue et définitive " :
9. Par une décision n° 2020 850 709 du 6 août 2021 devenue définitive, le directeur général de l'AP-HM a retiré la décision n° 2020 850 1093 du 8 décembre 2020 contestée par Mme A... et qui n'a pas été remplacée par une décision ayant la même portée. Dès lors et comme l'a jugé le tribunal sans être contesté sur ce point, les conclusions dirigées par Mme A... contre la décision n° 2020 850 1093 ont perdu leur objet et il n'y donc plus lieu d'y statuer.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation présentées par Mme A... :
10. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ".
11. Aux termes de l'article 1er du décret du 8 juin 1989 pris pour l'application de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et relatif au reclassement des fonctionnaires pour raisons de santé, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis du médecin du travail, dans l'hypothèse où l'état du fonctionnaire n'a pas nécessité l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical, si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un poste de travail correspondant à son grade dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l'intéressé d'assurer ses fonctions. ". Aux termes de l'article 2 de ce même décret, dans sa rédaction alors applicable : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental. ".
12. Mme A... soutient qu'elle aurait dû bénéficier d'une adaptation de son poste dès le 17 novembre 2016, date à laquelle l'AP-HM l'a placée en congé maladie ordinaire, et se voir, à défaut, proposer un reclassement.
S'agissant de l'obligation d'adaptation du poste de travail de l'agent à son état physique :
13. Il résulte de l'instruction que si Mme A... soutient qu'elle pouvait reprendre un poste aménagé dès le 14 novembre 2016, le rapport établi ce jour-là par la médecine du travail déclarait, au contraire, l'agent inapte aux fonctions d'entretien des surfaces et, contrairement à ce que soutient la requérante, ne se bornait pas à énoncer des restrictions liées au port de charges supérieures à 5 kilogrammes, mais concluait à la nécessité de la changer de poste. Il résulte de l'expertise du 18 janvier 2017 réalisée à la demande de Mme A... qui sollicitait la reconnaissance d'une maladie professionnelle que le médecin a conclu que " l'état de Mme A... est incompatible avec le poste d'ASH en service " et que son arrêt de travail du 17 novembre 2016 est médicalement justifié. Il s'en suit que son placement en congé maladie était médicalement nécessaire et que, contrairement à ce qu'elle prétend, il n'était pas possible de l'affecter alors sur un poste d'aide-soignante, même aménagé. Il résulte également de l'instruction que, le 21 mars 2017, elle a elle-même sollicité le bénéfice d'un congé de longue maladie au titre de ses pathologies et de son état dépressif, tout en faisant part de sa colère en réaction à la proposition de sa direction de reprendre son poste d'aide-soignante " non pas en service mais dans les parties communes ainsi que les escaliers " selon ses termes. Il résulte également de l'instruction que le comité médical a conclu à l'inaptitude de Mme A... à reprendre son travail par des avis émis les 26 octobre 2017, 24 mai et 13 décembre 2018, 6 juin et 12 décembre 2019, dont l'intéressée ne conteste d'ailleurs pas le sens et qu'elle n'a pas non plus contestés devant le comité médical supérieur. Il en résulte encore que Mme A... n'a pas, pendant ces périodes, demandé un aménagement de poste à son administration et, au contraire, a sollicité le 1er octobre 2018, le 20 mars 2019 et le 25 septembre 2019 le prolongement de sa mise en disponibilité d'office pour raison de santé. Dans ces conditions et du fait de son inaptitude à reprendre ses fonctions sur un poste aménagé entre le 14 novembre 2016 et le 16 mai 2020, Mme A... ne saurait faire grief à l'AP-HM de ne pas avoir procédé à l'aménagement de son poste pour cette période.
14. En revanche, il résulte de l'instruction qu'ainsi que l'avait constaté le médecin de prévention dès le 26 mai 2020, l'état physique de Mme A... lui permettait une reprise de ses fonctions sur un poste aménagé. L'AP-HM n'établit pas avoir recherché la possibilité d'adapter le poste de travail de Mme A... et se borne à faire valoir sans le démontrer que le poste d'ASQH ne pouvait faire l'objet d'une quelconque adaptation. Enfin, si le comité médical a émis le 26 novembre 2020 un avis défavorable à la reprise du travail de Mme A..., il ne s'est pas prononcé sur la situation antérieure à la date à laquelle il a été émis. Dans ces conditions, l'AP-HM n'avait pas effectivement recherché la possibilité d'adapter son poste de travail. D'où il suit que, comme le soutient Mme A..., l'AP-HM a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
15. Enfin, s'agissant de la période postérieure au 16 novembre 2020, le comité médical conclut à " l'inaptitude absolue et définitive au poste et à tout poste dans la fonction publique sans possibilité de reclassement professionnel à gérer par l'administration de l'agent ". D'où il suit que pour cette période Mme A... ne pouvait pas prétendre à bénéficier d'un poste aménagé.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est uniquement fondée à engager la responsabilité de l'AP-HM à n'avoir pas mis en œuvre son obligation d'adaptation du poste de travail de l'agent à son état physique durant la période allant du 2 juillet 2020 au 16 novembre 2020. Cette faute lui ouvre droit à réparation par le paiement de la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que, compte tenu des contraintes à respecter pour aménager son poste d'aide-soignant, elle aurait sérieusement perdu une chance de trouver un poste lui ouvrant droit à plein traitement comme elle le demande.
S'agissant de l'obligation de reclassement :
17. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en œuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement.
18. Il résulte de l'instruction que le comité médical départemental dans sa séance du 24 juin 2021 a confirmé l'inaptitude définitive de Mme A... à occuper son poste d'aide-soignante, mais a émis un avis favorable au reclassement. Par suite et contrairement à ce qu'elle soutient, son droit à présenter une demande de reclassement n'est pas antérieur à cette date. En outre, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, qu'un poste d'accueil a été envisagé le 23 juillet 2021 mais que la candidature de Mme A... n'a pas été retenue parmi les candidatures d'agent en situation de reclassement. Puis, le 16 novembre 2021, elle a été reçue en entretien d'entrée dans la période de préparation au reclassement. Enfin, l'AP-HM a accepté la demande de mise à la retraite formulée par Mme A... le 3 mars 2022. Dans ces conditions, il résulte de l'instruction que l'AP-HM a mis en œuvre son obligation à laquelle elle était tenue de chercher à reclasser Mme A.... Cette dernière n'est donc pas fondée à soutenir que l'AP-HM a commis une faute de nature à engager sa responsabilité dans la mise en œuvre de son obligation de reclassement.
19. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que Mme A... est uniquement fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande indemnitaire en tant qu'elle est inférieure ou égale à la somme de 1 000 euros et, d'autre part, que l'AP-HM doit être condamnée à lui payer une somme de 1 000 euros.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
20. Par voie de conséquence de ce qui vient d'être dit, le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution et en particulier pas celle de " reconnaître un droit au reclassement " comme le demande Mme A.... Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par celle-ci doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
21. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 juillet 2023 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A... tendant à la condamnation de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui payer une somme inférieure ou égale à 1 000 euros.
Article 2 : L'assistance publique des hôpitaux de Marseille est condamnée à payer une somme de 1 000 euros à Mme A....
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à l'assistance publique des hôpitaux de Marseille.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025 où siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- Mme Rigaud, présidente-assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juin 2025.
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N° 23MA02353