Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 462 euros en réparation de ses préjudices subis du fait de la gestion de la validation de ses services auxiliaires et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2007771 du 29 mai 2024, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2024, M. A... B..., représenté par Me Monchauzou, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 14 284 euros en réparation des préjudices causés par les erreurs de gestion dans le cadre de sa demande de validation, pour la retraite, des services accomplis en qualité d'auxiliaire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'Etat a commis plusieurs fautes en ne traitant pas sa demande déposée en 1991, en appliquant, pour le calcul de la retenue légale, l'indice détenu en 2008 et non celui détenu en 1991, et en traitant sa demande dans un délai anormalement long ;
- ces fautes sont à l'origine de préjudices dont il entend obtenir réparation.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 février 2025, le ministre de l'éducation, de la jeunesse, des sports, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vincent,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Monchauzou pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a accompli des services d'auxiliaire du 18 mai 1978 au 30 juillet 1987 en qualité de surveillant d'externat et maître d'internat. Il a réussi le concours de conseiller principal d'éducation en 1991 et a été nommé dans ce corps en qualité de stagiaire à compter du 1er septembre 1991 au 5ème échelon de son grade. Il a été titularisé le 1er septembre 1992. M. B... aurait présenté, dès sa nomination en 1991, une demande tendant à la validation, au titre de la retraite, des services accomplis précédemment en qualité d'auxiliaire en application des dispositions de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Une demande, présentée le 22 décembre 2008, a donné lieu à une décision en date du 29 août 2016 par laquelle ses services accomplis en qualité d'auxiliaire ont été validés. Cette décision précisait également que le montant des retenues rétroactives s'élevait à 11 784 euros. M. B... a signé, le 10 janvier 2017, un protocole d'accord prévoyant, pour le paiement de ces retenues, des prélèvements mensuels de 5 % sur le traitement net. Ces prélèvements n'ont, dans un premier temps, pas été mis en place et l'administration a fait pratiquer, le 28 janvier 2019, une saisie à tiers détenteur sur les comptes de M. B..., laquelle s'est révélée infructueuse, d'un montant global de 12 962 euros comprenant une majoration de 10 %. Par une lettre en date du 13 février 2020, M. B... estimant que son dossier avait été mal géré, a présenté à son administration une demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estimait avoir subis de ce fait. Un refus lui a été opposé le 14 août 2020. M. B... interjette appel du jugement en date du 29 mai 2024 par lequel le tribunal administratif de Marseille, après avoir retenu un délai anormalement long de traitement de sa demande, a néanmoins rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la faute :
2. En premier lieu, s'il est constant que M. B... a bénéficié, au titre d'une reprise d'ancienneté, des années accomplies en qualité d'auxiliaire et a été ainsi nommé, à compter du 1er septembre 1991, au 5ème échelon de la classe normale du corps des conseillers principaux d'éducation, il ne résulte, en revanche, pas de l'instruction, en dépit d'une demande adressée en ce sens par la Cour, que M. B... aurait, comme il le prétend, déposé en 1991, au titre de la retraite et en application des dispositions de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite, une demande de validation des services accomplis antérieurement. Par suite, les moyens tirés de ce que l'administration aurait commis une faute en ne traitant pas sa demande déposée en 1991 et en faisant application, pour le calcul des retenues rétroactives, de l'indice qu'il détenait en 2008 et non en 1991 doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction applicable à la date de la demande du 22 décembre 2008 : " (...) Peuvent également être pris en compte pour la constitution du droit à pension les services d'auxiliaire, de temporaire, d'aide ou de contractuel, y compris les périodes de congé régulier pour longue maladie, accomplis dans les administrations centrales de l'Etat, les services extérieurs en dépendant et les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel et commercial, si la validation des services de cette nature a été autorisée pour cette administration par un arrêté conjoint du ministre intéressé et du ministre des finances et si elle est demandée dans les deux années qui suivent la date de la titularisation ou d'entrée en service pour les militaires sous contrat. / Le délai dont dispose l'agent pour accepter ou refuser la notification de validation est d'un an. "
4. Il résulte de l'instruction que tandis que M. B... a déposé sa demande le 22 décembre 2008 et a, après les demandes tendant à compléter son dossier qui lui ont été adressées par lettres des 20 septembre 2010 et 8 décembre 2015, adressé l'ensemble des pièces requises, celle-ci n'a été validée que le 29 août 2016, soit 8 ans plus tard. Si l'administration fait valoir à cet égard qu'elle devait procéder à des échanges avec les services de la CARSAT et de l'IRCANTEC et que les dossiers des agents devant prochainement partir à la retraite étaient prioritaires, ces circonstances ne sauraient expliquer le délai anormalement long de traitement de la demande de M. B.... Ainsi que le fait valoir le requérant et que l'ont estimé les premiers juges, le délai de traitement de la demande de M. B... était anormalement long et, par suite, fautif. Le requérant est donc fondé à prétendre à une indemnisation au titre des préjudices subis du fait de cette faute.
En ce qui concerne les préjudices :
5. En premier lieu, à supposer que M. B... ait entendu solliciter une indemnisation au titre d'un préjudice matériel, il est constant que des retenues rétroactives d'un montant de 11 784 euros étaient, quelles qu'en soient les modalités de paiement, dues en contrepartie de la validation des services accomplis en qualité d'auxiliaire. Par suite, le préjudice matériel n'est, à supposer qu'il soit allégué, pas établi.
6. En second lieu, en revanche, il résulte de l'instruction que, du fait du délai de traitement anormalement long de sa demande, M. B... a été amené à régler, à compter de sa mise à la retraite le 21 août 2020, non plus des mensualités de 5 % sur son traitement net mais des mensualités de 20 % sur sa pension, ce qui a été de nature à générer, au regard de l'ampleur desdits prélèvements de l'ordre de 700 euros bruts par mois jusqu'en décembre 2021, des troubles dans ses conditions d'existence ainsi qu'un préjudice moral. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 4 000 euros.
7. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions indemnitaires. Il y a lieu, dès lors, d'annuler ledit jugement et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 000 euros.
Sur les frais d'instance :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros qui sera versée à M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2007771 du 29 mai 2024 du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. B... la somme de 4 000 euros.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2025, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mai 2025.
N° 24MA01933 2
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