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16/05/2025 | FRANCE | N°24MA00884

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 16 mai 2025, 24MA00884


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par trois requêtes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler pour excès de pouvoir la décision verbale du 7 novembre 2020 portant affectation au sein de la direction des travaux de la communauté d'agglomération de Bastia, la décision du 22 juillet 2021 par laquelle le directeur général des services de la communauté d'agglomération de Bastia lui a notifié une délibération du conseil communautaire datée du 19 juillet 2021 et l'a invité à prend

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler pour excès de pouvoir la décision verbale du 7 novembre 2020 portant affectation au sein de la direction des travaux de la communauté d'agglomération de Bastia, la décision du 22 juillet 2021 par laquelle le directeur général des services de la communauté d'agglomération de Bastia lui a notifié une délibération du conseil communautaire datée du 19 juillet 2021 et l'a invité à prendre ses dispositions pour libérer le logement de fonction qu'il occupe, la délibération du 19 juillet 2021 par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération de Bastia a modifié la liste des emplois bénéficiaires d'un logement de fonction et l'arrêté du 28 août 2021 par lequel le président de la communauté d'agglomération a mis fin à la concession de logement de fonction pour nécessité absolue de service.

Par un jugement n°s 2100925, 2100926 et 2101150 du 15 février 2024, le tribunal administratif de Bastia a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 avril 2024, M. B..., représenté par Me Albertini, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia n°s 2100925, 2100926 et 2101150 du 15 février 2024 ;

2°) d'annuler la décision verbale du 7 décembre 2020 portant affectation au sein de la direction des travaux de la communauté d'agglomération de Bastia ;

3°) d'annuler la décision du 22 juillet 2021 par laquelle le directeur général des services de la communauté d'agglomération de Bastia lui a notifié une délibération du conseil communautaire datée du 19 juillet 2021 et l'a invité à prendre ses dispositions pour libérer le logement de fonction qu'il occupe ;

4°) d'annuler la délibération du 19 juillet 2021 par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération de Bastia a modifié la liste des emplois bénéficiaires d'un logement de fonction ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Bastia la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision du 7 décembre 2020 :

- la décision verbale du 7 décembre 2020 lui fait grief ; c'est à tort que les premiers juges ont jugé sa demande irrecevable ;

- cette décision verbale est entachée d'un vice d'incompétence ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, faute de consultation préalable du comité technique paritaire ;

- il n'a pas eu communication de son dossier avant son déplacement d'office ;

- la décision de changement de poste est dénuée de fondement ;

- la décision de changement de poste est une sanction disciplinaire déguisée ;

- il a été réaffecté sur un poste qui n'était pas vacant.

En ce qui concerne la décision du 22 juillet 2021 :

- la décision fait grief et n'est pas une simple mesure préparatoire ;

- cette décision est entachée d'un vice d'incompétence ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 21 de la loi du 28 novembre 1990.

En ce qui concerne la délibération du 19 juillet 2021 :

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- aucune raison ne justifie la suppression du logement de fonction sur le site de la Carbonite ; la décision a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 21 de la loi du 28 novembre 1990.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2024, la communauté d'agglomération de Bastia, représentée par Me Verne, demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de M. B... le paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance en date du 30 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mars 2025.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Point, rapporteur,

- les conclusions de M. Olivier Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Verne pour la communauté d'agglomération de Bastia.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est adjoint technique de première classe. Il a été recruté le 1er mars 2012 par la communauté d'agglomération de Bastia et affecté sur le poste de gardien du complexe sportif de la Carbonite à Bastia, où il est en charge de l'entretien et de la maintenance technique des équipements, ainsi que de la surveillance du site. Par une décision verbale du 7 décembre 2020, le directeur des travaux et un représentant de la directrice des ressources humaines l'ont informé du transfert de son poste à la direction des travaux. Par une délibération du 19 juillet 2021, notifiée à l'intéressé par lettre du 22 juillet 2021, le conseil de la communauté d'agglomération a décidé de modifier la liste des emplois bénéficiaires d'un logement de fonction. Enfin, par un arrêté du 28 août 2021, le président de la communauté d'agglomération lui a demandé de libérer le logement qui lui a été concédé pour nécessité absolue de service. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 7 décembre 2020 et 22 juillet 2021, ainsi que de la délibération du 19 juillet 2021.

Sur la régularité du jugement :

2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable.

S'agissant des conclusions aux fins d'annulation de la décision du 7 décembre 2020 :

3. Comme l'ont jugé les premiers juges, la décision par laquelle le poste occupé par M. B... a été rattaché à la direction des travaux a eu lieu dans le cadre d'une réorganisation interne des services de la communauté d'agglomération de Bastia, ayant pour but de spécialiser les directions de la collectivité. Ce rattachement n'a pas entrainé de réaffectation de M. B..., lequel demeurait affecté sur le même poste de gardien du complexe sportif de la Carbonite. Le rattachement en cause n'a eu par lui-même aucune incidence sur la situation matérielle de M. B... et n'a entraîné aucune dégradation de sa situation professionnelle. En outre, la décision ne manifeste aucune intention de l'administration de porter atteinte à la situation de l'intéressé. Un tel acte n'a donc pas le caractère d'un déplacement d'office ou d'une sanction déguisée. Par suite, la décision verbale du 7 décembre 2020 par laquelle M. B... a été informé de la réorganisation administrative et du rattachement de son poste à une nouvelle direction est une mesure d'ordre intérieur insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté sa demande tendant à l'annulation de cette décision comme irrecevable.

S'agissant des conclusions aux fins d'annulation de la décision du 22 juillet 2021 :

4. Par le courrier daté du 22 juillet 2021, le directeur général des services de la collectivité a informé M. B... de l'adoption de la délibération du 19 juillet 2021 relative à la modification de la liste des emplois bénéficiaires d'un logement pour nécessité absolue de service et lui a communiqué ladite délibération. Ce même courrier lui indiquait qu'il pourrait bénéficier d'un accompagnement pour trouver un nouveau logement. Un tel acte, en tant qu'il informe M. B... qu'il devra libérer son logement de fonction, constitue une simple mesure préparatoire à l'arrêté du 28 août 2021 par lequel le président de la collectivité a mis fin à la concession du logement occupé par M. B.... Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 juillet 2021 comme irrecevable.

S'agissant des conclusions aux fins d'annulation de la délibération du 19 juillet 2021 :

5. Le requérant soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la collectivité n'avait pas respecté les dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, qu'il avait soulevé dans sa demande introductive de l'instance n° 2100926. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que les premiers juges ont visé ce moyen, sans y répondre. Toutefois, les dispositions en cause, applicables jusqu'au 1er mars 2022, avaient trait au reclassement du fonctionnaire concerné par la suppression d'un emploi. Ces dispositions n'étaient donc pas applicables à une délibération ayant pour objet la modification de la liste des emplois donnant accès à un logement de fonction, dont elles ne constituaient pas la base légale. Par suite, le moyen était inopérant et les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre. Ce moyen doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la délibération du 19 juillet 2021 :

Sur la légalité externe :

6. La délibération du 19 juillet 2021 par laquelle le conseil communautaire a modifié la liste des emplois bénéficiaires d'un logement de fonction a un caractère réglementaire. En l'absence de toute disposition expresse imposant à l'autorité administrative de motiver une telle décision, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la délibération du 19 juillet 2021 est inopérant et doit par suite être écarté.

Sur la légalité interne :

7. Aux termes de l'article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent la liste des emplois pour lesquels un logement de fonction peut être attribué gratuitement ou moyennant une redevance par la collectivité (...). Les décisions individuelles sont prises en application de cette délibération par l'autorité territoriale ayant le pouvoir de nomination ".

8. M. B... soutient que la délibération du 19 juillet 2021 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle n'intègre pas dans la liste des emplois pour lesquels un logement de fonction peut être attribué l'emploi de gardien du site de la Carbonite. Il fait valoir à cet effet que le site de la Carbonite est ouvert toute l'année, y compris les dimanches et jours fériés, avec une amplitude horaire de 11 heures à 18 heures 30, et que le site présente des enjeux de sécurité. Toutefois, au regard de la fiche de poste versée au dossier, les missions de gardiennage, entretien ou maintenance du site de la Carbonite sont exercées principalement lors des horaires d'ouverture, de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 17 heures. La fiche de poste mentionne en outre la fermeture des installations à 22 heures. Ni ces missions, ni les horaires d'ouverture du site ne sont de nature à caractériser une nécessité absolue de service, justifiant l'octroi d'un logement de fonctions. Par ailleurs, l'existence d'enjeux de sécurité particuliers au site de la Carbonite n'est pas établie. Enfin, la circonstance qu'un autre site serait dépourvu d'enjeu de sécurité est sans incidence sur la non-inscription de l'emploi de gardien du site de la Carbonite sur la liste des emplois bénéficiaires d'un logement de fonctions. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la délibération attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération de Bastia, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la communauté d'agglomération de Bastia présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération de Bastia présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté d'agglomération de Bastia.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Anne-Laure Chenal-Peter, présidente,

- Mme Aurélia Vincent, présidente assesseure,

- M. François Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2025.

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N° 24MA00884


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00884
Date de la décision : 16/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation - Affectation.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Logement de fonction.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: M. François POINT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : ALBERTINI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-16;24ma00884 ?
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