Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 2001994 du 10 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 septembre 2023, M. A..., représenté par Me Maillard, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 juillet 2023 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration fiscale, en faisant abstraction des quotes-parts de résultats déclarées par les sociétés civiles immobilière (SCI) La Laurence, CAJN, Renoir 2, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas et lui revenant, ainsi qu'à son épouse, a insuffisamment motivé sa proposition de rectification, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, combiné avec l'article 8 du code général des impôts ;
- la rectification des revenus fonciers correspondant au montant des sommes provenant des SCI CAJN, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, combiné avec l'article 8 du code général des impôts ;
- l'administration l'a privé de la possibilité de bénéficier de la garantie attachée à la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires en qualifiant les sommes versées par les sociétés CAJN, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas de revenus fonciers, alors qu'elles relevaient d'une autre catégorie d'imposition ;
- la rectification relative à la somme de 6 000 euros versée par la SCI Les Alizés au cours de l'année 2012 n'est pas motivée ;
- l'administration n'a pas rapporté la preuve du caractère imposable des sommes versées par des sociétés de personnes dont son épouse n'était pas associée et des sociétés dont lui-même n'était pas associé ;
- l'administration ne pouvait l'imposer à raison de la totalité des sommes reçues de sociétés dont il détenait seulement la moitié du capital ;
- l'administration n'était pas fondée à faire application de la majoration pour manquement délibéré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2011 à 2013, à l'issue duquel l'administration fiscale les a assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des trois années considérées résultant notamment du rehaussement de leurs revenus fonciers. M. A... relève appel du jugement du 10 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande tendant à la décharge de ces suppléments d'impôt, et des pénalités correspondantes.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
3. La proposition de rectification du 22 décembre 2014 adressée à M. et Mme A..., relative à l'année 2011, qui mentionne les impôts concernés, l'année d'imposition et le montant des rectifications, précise les motifs pour lesquels le vérificateur a estimé que les bénéfices industriels et commerciaux déclarés et provenant de la SCI La Laurence ainsi que les revenus fonciers déclarés et provenant des SCI CAJN, Renoir 2, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas, dont les montants déclarés sont précisés, devaient être rehaussés. Il en va de même de la proposition de rectification du 6 octobre 2015, relative aux années 2012 et 2013, qui mentionne de la même manière les impôts concernés, les années d'imposition et le montant des rectifications, et précise notamment d'une part les motifs pour lesquels le vérificateur a estimé que devaient être imposées dans la catégorie des revenus fonciers les discordances entre les sommes versées par les SCI CAJN, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas et les revenus fonciers déclarés à raison de ces sociétés et, d'autre part, les raisons pour lesquelles la somme de 6 000 euros versée à M. A... par la SCI Les Alizés au cours de l'année 2012 a été regardée comme correspondant à une commission perçue au titre d'une vente immobilière. Ainsi, les propositions de rectification, qui mentionnaient les motifs de droit relatifs à ces rectifications, énonçaient de façon suffisamment précise les motifs de fait les fondant. Par conséquent, alors que le caractère suffisant de la motivation d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé des motifs sur lesquels celle-ci est fondée, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des propositions de rectification doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I.-La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; (...) ".
5. Il résulte de l'instruction que l'administration a constaté l'existence d'encaissements sur les comptes bancaires de M. et Mme A... de sommes provenant des SCI CAJN, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas au cours des années 2012 et 2013. Elle a rehaussé les revenus fonciers déclarés par M. et Mme A... du montant des discordances entre ces encaissements et les revenus fonciers déclarés, soit respectivement 108 163 euros et 128 069 euros au titre des années 2012 et 2013. M. A..., qui ne conteste pas avoir lui-même indiqué au cours d'un entretien avec le vérificateur, le 11 mars 2015, puis dans une lettre adressée à l'administration le 17 juin 2015, que des crédits bancaires non identifiés correspondant à des virements et à des encaissements de chèques pour des sommes globales de 149 352 euros au titre de l'année 2012 et de 145'300 euros au titre de l'année 2013 correspondaient à des revenus fonciers, se borne à soutenir que les sommes ainsi encaissées relevaient d'une autre catégorie d'imposition, et notamment de celle des bénéfices industriels et commerciaux, sans apporter aucune précision ni produire aucun élément permettant de démontrer que ces encaissements ne constituaient pas des revenus fonciers. Par conséquent, il n'est pas fondé à soutenir que l'administration l'aurait privé de la possibilité de bénéficier de la garantie attachée à la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires en qualifiant à tort les sommes en cause de revenus fonciers.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
6. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " (...) les associés des sociétés en nom collectif (...) sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) / Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". Aux termes de l'article 239 ter du même code : " I. - Les dispositions du 2 de de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social. / Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés (...) ". Aux termes de l'article 14 de ce code : " (...) sont compris dans la catégorie des revenus fonciers, lorsqu'ils ne sont pas inclus dans les bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale, d'une exploitation agricole ou d'une profession non commerciale : / 1° Les revenus des propriétés bâties (...) ".
7. D'une part, l'administration, en se fondant sur les discordances non contestées entre la quote-part de revenus revenant à Mme A... mentionnée sur les déclarations de la SCI La Laurence, dans laquelle l'intéressée était associée, et les revenus déclarés par M. et Mme A... à raison des bénéfices industriels et commerciaux des années 2011 et 2012, établit le caractère imposable des sommes correspondantes.
8. D'autre part, l'administration, en se fondant sur la discordance non contestée entre les quotes-parts de revenus revenant à M. et Mme A... mentionnées sur les déclarations des SCI CAJN, Falcone Roucas, France Espace Publicitaire et Renoir 2, dans lesquelles les contribuables étaient associés, et les revenus déclarés par M. et Mme A... à raison des revenus fonciers de l'année 2011, établit le caractère imposable de la somme correspondante.
9. Enfin, l'administration, ainsi qu'il a été dit précédemment, a rehaussé les revenus fonciers déclarés par M. et Mme A... au titre des années 2012 et 2013 du montant des discordances entre les sommes qui leur ont été versées par les SCI CAJN, France Espaces Publicitaires et Falcone Roucas et les revenus fonciers déclarés à raison des résultats de ces sociétés, soit respectivement 108 163 euros et 128 069 euros. En se fondant sur l'existence et la provenance de ces encaissements, et alors que M. A..., ainsi qu'il a été dit précédemment, a au demeurant lui-même indiqué que les encaissements en cause correspondaient à des revenus fonciers, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère imposable des sommes correspondantes, alors même que certains des chèques émis par les SCI Falcone Roucas et France Espace Publicitaire, dont seule Mme A... était associée, ont été établis au nom du requérant. Pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait imposer M. et Mme A... à raison de la totalité des sommes ainsi encaissées.
Sur les pénalités :
10. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".
11. M. et Mme A..., qui étaient associés des SCI CAJN, Falcone Roucas, France Espace Publicitaire et Renoir 2, lesquelles étaient dirigées par l'un ou l'autre et ne pouvaient ainsi ignorer le caractère imposable des revenus fonciers provenant de ces sociétés, ont omis de déclarer une partie importante de ces revenus de façon répétée au cours des trois années considérées. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, l'administration, qui doit être regardée comme établissant le caractère délibéré de ses omissions, était fondée à faire application de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 24 avril 2025, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
- M. Mérenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mai 2025.
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N° 23MA02390