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25/04/2025 | FRANCE | N°24MA01862

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 25 avril 2025, 24MA01862


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'arrêté du 28 février 2024 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2305505 et 24017

26 du 3 juillet 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté les deux requêtes.





Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'arrêté du 28 février 2024 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2305505 et 2401726 du 3 juillet 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté les deux requêtes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2024, Mme C..., représentée par Me Lucaud-Ohin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2024 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie dès lors qu'elle justifie résider depuis l'année 2014 sur le territoire français ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a été pris en méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations des articles 3-1 et 9-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il méconnaît les termes de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Danveau.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante sri-lankaise, née le 8 octobre 1973, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Elle a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et, d'autre part, l'arrêté du 28 février 2024 par lequel le même préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 3 juillet 2024 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2024.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France en 2014, sous couvert d'un visa Schengen valable pour l'Italie du 29 janvier 2014 au 12 février 2015, et délivré par les autorités italiennes pour motif familial. Elle s'est mariée le 12 juin 2010 avec un compatriote en situation régulière sur le territoire français, titulaire d'un titre de séjour " entrepreneur - profession libérale " d'une durée d'un an en cours de validité, et avec lequel elle a eu deux enfants nés en France en 2015 et 2016. Toutefois, l'intéressée ne justifie pas résider en France de manière continue depuis 2014 ainsi qu'elle l'allègue, en particulier au titre des années 2014 à 2022, compte tenu des pièces produites, constituées principalement de quelques pièces médicales, des certificats de scolarité de ses enfants, d'un avis d'imposition de la taxe d'habitation concernant l'année 2020 et de quittances de loyer limitées à de courtes périodes en 2021 et 2022. L'arrêté attaqué précise en outre que l'intéressée s'est maintenue irrégulièrement en France malgré un précédent refus de séjour édicté à son encontre le 5 octobre 2021 et qu'elle était titulaire d'une carte de séjour délivrée par les autorités italiennes sur la période du 13 février 2018 au 23 avril 2020. Celle-ci ne justifie pas davantage d'une insertion particulière en France, en se limitant à justifier, d'une part, du suivi de cours de français à compter du mois d'octobre 2022, d'autre part, d'une promesse d'embauche du 10 février 2023 pour exercer un emploi de magasinière au sein de la société gérée par son époux, enfin, d'éléments postérieurs à l'arrêté attaqué, tels qu'une proposition d'un contrat à durée indéterminée pour exercer un emploi d'agent de service et une attestation relative à une activité de bénévole au sein d'une association culturelle. Mme C... n'établit pas non plus que l'arrêté contesté portant refus de titre de séjour ferait obstacle, eu égard à son objet et à ses effets, au maintien de sa cellule familiale et à la scolarisation de ses enfants au A... B.... Enfin, la circonstance que certains membres de sa famille, notamment une sœur, un oncle et une tante, résident en France et sont de nationalité française ne permet pas d'établir qu'elle serait dépourvue de toute attache personnelle et familiale au A... B..., où elle a vécu jusqu'à l'âge de 41 ans. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

4. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

5. Les circonstances évoquées par la requérante et exposées au point 3 du présent arrêt ne constituent pas des motifs exceptionnels et ne relèvent pas non plus de considérations humanitaires au sens des dispositions précitées. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes, en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché son appréciation d'une erreur manifeste.

6. Il résulte par ailleurs de ce qui a été développé au point 3 du présent arrêt que Mme C... ne justifie pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Dès lors, et comme l'ont à bon droit retenu les premiers juges, le préfet des Alpes-Maritimes n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de prendre le refus de séjour litigieux. Le vice de procédure doit ainsi être écarté.

7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".

8. Si Mme C... est mère de deux enfants nés en France, elle n'établit pas que la cellule familiale qu'elle forme avec le père de ses enfants, également ressortissant sri-lankais et seulement titulaire d'un titre de séjour d'une durée d'un an, ne pourrait être transférée au A... B.... Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

9. Aux termes du 1 de l'article 9 de la même convention : " Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant ".

10. La requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés.

11. Mme C... ne peut utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision en litige, des termes de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, laquelle, relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, se borne à énoncer des orientations générales que le ministre de l'intérieur a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées. Par suite, doivent également être rejetées ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2025, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2025.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01862
Date de la décision : 25/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : LUCAUD-OHIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-25;24ma01862 ?
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